MADANIYA
Palestine: Le recentrage du Hamas,
un exercice de grand écart idéologique
et stratégique
René Naba
Mardi 9 mai 2017
Ismail Haniyeh a été élu samedi 6 Mai
2017 chef du bureau politique du Hamas
par vidéo conférence, vainqueur d’une
consultation qui l’a opposé à deux
concurrents, Mohamad Abou Marzouk et
Mohamad Nazzal.
La vidéo
conférence s’est tenue entre Doha, lieu
d’exil de son prédécesseur Khaled
Mechaal, et Gaza, où se trouvent la
majorité des cadres militaires du
mouvement.
Natif du
camp d’Al Chatt, à l’Ouest de la bande
de Gaza, en 1963, Ismail Haniyeh est
titulaire d’un baccalauréat en langue
arabe de l’Université islamique de Gaza,
où il a fait preuve de son militantisme
en présidant la section étudiante de la
confrérie des Frères musulmans au sein
de cet établissement.
Condamné
à trois reprises à des peines de prison
de la part des autorités d’occupation
israélienne, en 1987 (18 jours de
prison), en 1998 (6 mois de prison) et
en 1989 (trois ans de prison), Ismail
Haniyeh sera expulsé vers le Sud Liban
en compagnie de dix autres dirigeants du
Hamas, en 1992, l’année de la signature
des accords d’Oslo entre Israël et
l’OLP.
Un
accord conclut directement sans
intermédiaires dont il contestera
violemment la ligne politique pendant 25
ans avant que son mouvement n’opère un
infléchissement considérable de son
programme politique pour se conformer à
celui de la centrale palestinienne.
«Celui dont le nom
patronymique «Khaled Mecha’al- Eternel
flambeau» le prédestinait à être le
flambeau guidant son peuple vers
l’indépendance, s’est révélé être, au
terme d’un parcours erratique, un phare
déréglé, projetant son peuple sinon vers
l’abîme à tout le moins vers l’impasse».
1 – La déclaration
du 1 er mai 2017 et l’élection d’Ismail
Haniyeh à la tête du Hamas (1).
Le Hamas
a procédé en 2017 à son recentrage
infléchissant sa ligne maximaliste tout
en propulsant un militaire à la tête de
son fief de Gaza, dans un mouvement
visant à rompre son isolement, qui
apparaît néanmoins à bon nombre
d’observateurs comme un exercice de
grand écart idéologique et stratégique
de l’ultime mouvement palestinien de
lutte armée de confession sunnite.
Au prix
d’un quadruple reniement, -de son
combat, de son idéologie, de la
solidarité combattante avec ses anciens
compagnons de lutte et de son
organisation mère la Confrérie des
Frères Musulmans-, le Hamas tente
apparemment de concilier deux objectifs
inconciliables: Renouer avec ses anciens
frères d’armes, l’Iran, le Hezbollah et
la Syrie, d’une part, obtenir sa
reconnaissance auprès du camp
atlantiste, d’autre part.
Ismail
Haniyeh, ancien chef du gouvernement
palestinien à Gaza, a en effet été élu à
la tête du mouvement, alors que son
mouvement vient d’annoncer le 1 er Mai
2017 un infléchissement de sa ligne
maximaliste, modifiant son programme
politique pour admettre, pour la
première fois de son histoire, un État
palestinien limité aux frontières de
1967 et non sur la totalité de la
Palestine du mandat britannique.
Insistant sur le caractère politique et
non religieux du conflit avec Israël, le
document qui s’ajoute à la charte
originelle de 1988, affirme que le Hamas
est « en conflit avec le projet sioniste
et non avec les juifs en raison de leur
religion ».
Le Hamas
est considéré comme « terroriste » par
les États-Unis, l’Union européenne et
Israël et nombre de ses dirigeants sont
visés par des sanctions.
Le Hamas a procédé à ces changements en
vue de mettre un terme à son isolement
résultant de son alignement sectaire sur
les pétromonarchies sunnites à
l’occasion de la Guerre de Syrie. Ce
faisant, il espère lever ainsi
l’ostracisme de l’Union Européenne et
des États Unis qui le frappe depuis sa
prise de contrôle de Gaza, il y a dix
ans.
Toutefois l’abandon de la ligne
maximaliste a été faite depuis Doha, la
capitale d’un pays qui abrite la plus
importante base américaine du tiers
monde dont la zone de compétence s’étend
du Marocà l’Afghanistan, de surcroît
sous le parrainage de la Turquie,
l’allié stratégique d’Israël dans la
zone.
Ainsi donc, au terme de trente ans de
rivalité avec l’OLP, le mouvement
islamiste palestinien consent en fin de
compte à s’aligner sur les positions de
la centrale palestinienne et de se
démarquer de la Confrérie des Frères
Musulmans, sa mère nourricière depuis sa
naissance.
Pour
justifier son évolution, le Hamas a
invoqué le même argument que l’OLP:
Rompre l’isolement. Sauf qu’un tel motif
a conduit la centrale a proclamé en 1988
un État Palestinien virtuel, avant de
signer avec Israël les accords de paix
d’Oslo, quatre ans plus tard, en 1992,
scellant sa renonciation à la lutte
armée, déblayant ainsi la voie à une
annexion rampante de la Palestine,
particulièrement de Jérusalem.
Le Hamas
feint d’ignorer que le camp atlantiste,
le principal soutien d’Israël, ne
concède rien sans de substantielles
contreparties, et avec parcimonie, en
fonction des rapports de force sur le
terrain.
2 – Un recentrage
sous la vigilance de Yahya Sanwar, chef
de la branche militaire du Hamas.
Soucieux
sans doute de prévenir une évolution
conforme à celle de l’OLP, -une coquille
sans vie, un leadership sans relief
vivotant à Ramallah sous la coupe de
l’«usurpateur de la Palestine»-, le
Hamas a accompagné sa renonciation à sa
ligne maximaliste par la nomination à la
tête de l’enclave de Gaza, d’un
dirigeant de la branche militaire du
Hamas, responsable au premier chef du
combat anti-israélien.
La
substitution d’Ismail Haniyeh à son
ancien mentor Khaled Mécha’al a, en
effet, été précédée par l’élection de
Yahya Sanwar à la tête de l’enclave de
Gaza dans une opération destinée à
verrouiller le processus décisionnaire
au sein du Hamas.
La
propulsion de ce militaire confirmé et
rompu à la guerre contre Israël a
répondu au souci de la branche militaire
du Hamas de reprendre en main le
mouvement palestinien dans la
perspective d’un enterrement en grande
pompe de la solution à deux états en
Palestine par le tandem xénophobe Donald
Trump et Benyamin Netanyahu et sa
substitution par un «état croupion»,
pour solde de tout compte d’un conflit
centenaire.
La
présence de cet ancien prisonnier de
guerre palestinien à la tête de
l’enclave, dont Hamas a le contrôle
depuis 2007, s’est faite à la faveur
d’élections clandestines dégageant une
majorité confortable en sa faveur, signe
indiscutable d’une profonde adhésion des
cadres du mouvement au projet de
recentrage, en même temps qu’un aveu
indirect des errements passés.
Fondateur de la branche militaire du
Hamas, particulièrement des «Brigades
Ezzedine al Qassam» et chef de la force
d’intervention «Majd», Yahya Sanwar
compte aussi à son actif la restauration
de l’ordre à Gaza, en proie à
l’insécurité. Il sera secondé par Khalil
Alfeet, vice président de l’enclave.
Originaire du camp de réfugiés de Khan
Younès, Yahya Sanwar a vécu dans la
bourgade de Majd Yahya. Il passe pour
avoir ordonné la liquidation de 12
agents palestiniens à la solde d’Israël
et a purgé 23 ans de détention dans les
geôles des autorités d’occupation
israéliennes, avant de retrouver la
liberté lors de la transaction visant à
la libération de Gilad Shalit, le
caporal de l’armée israélienne capturé à
Gaza par le Hamas.
3- La mission
prioritaire de Yahya Sanwar, le
rétablissement des relations
stratégiques avec l’Iran et le
Hezbollah.
Bénéficiant d’un grand respect auprès
des cadres militaires palestiniens et de
nombreuses personnalités palestinienne,
Yahya Sanwar a succédé à Ismail Haniyeh,
l’ancien premier ministre palestinien,
en vue d’une sérieuse reprise en main du
mouvement palestinien tant sur le plan
idéologique que stratégique.
Sa
mission prioritaire sera de renouer avec
ses anciens compagnons de lutte, l’Iran
et le Hezbollah, en une démarche qui
apparaît comme un coup d’arrêt à une
dérive sectaire de l’unique mouvement de
libération national du Monde arabe de
sensibilité sunnite; une séquence
calamiteuse pour le combat palestinien.
La
défection du Hamas avait entraîné son
déclassement dans l’échelle des
priorités de l’Iran, qui avait
privilégié le «Jihad Islamique», son
rival sur le double plan islamique et
palestinien, de même que «Les Brigades
Abou Ali Moustapha», la branche
militaire de l’organisation laïque FPLP
(Front Populaire Pour la Libération de
la Palestine).
L’Opposition du Jihad
Islamique
Le Jihad
Islamique, l’organisation palestinienne
rivale sur le plan islamique Gaza, a
proclamé son opposition au nouveau
programme politique du Hamas, faisant
valoir l’impasse dans laquelle se trouve
l’OLP du fait des infléchissements
successifs de ses revendications.
«L’acceptation de frontières de 1967
constitue une atteinte grave aux
fondamentaux du combat palestinien
d’autant plus inopportune que les
guerres de Syrie et du Yémen ont relégué
au second plan de l’actualité l’affaire
palestinienne», a déclaré son porte
parole.
Revers
stratégique pour le Hamas, l’opposition
du Jihad islamique pourrait mettre à mal
la coopération instaurée depuis vingt
ans à Gaza entre les deux formations
militaires islamistes palestiniennes. Le
ralliement du Hamas à une solution des
deux états propulse le Jihad Islamique
au rang d’unique formation palestinienne
de lutte armée a réclamer la libération
de la totalité de la Palestine.
A en
juger par la série d’autocritiques qui
ont précédé cette mutation, le Hamas
paraît soucieux en effet de rompre son
isolement vis a vis de son principal
ravitailleur en armes et en expertise,
l’Iran chiite et son allié libanais. Le
président syrien Bachar Al-Assad s’est
montré réservé à une normalisation à ce
stade avec le Hamas, considérant la
défection de son ancien obligé, Khaled
Mecha’al, comme un «coup de poignard
dans le dos», selon son expression.
4 – Le recentrage du
Hamas, un cinglant désaveu de Khaled
Mecha’al, la sanction d’un parcours
erratique.
Le
nouveau dirigeant politique de la
branche palestinienne de la confrérie
des Frères Musulmans devra, ainsi, sans
délai, mettre un terme à l’alignement
inconditionnel du Hamas sur les
pétromonarchies du golfe dans la guerre
de Syrie et tourner définitivement la
page de son prédécesseur Khaled Mecha’al.
Le
remplacement de Khaled Mecha’al devrait
se doubler d’une prise de distance
progressive à l’égard de l’organisation
mère de la confrérie, -la branche
égyptienne des Frères Musulmans-, dans
un geste de bonne volonté à l’égard de
l’Égypte en vue de favoriser la levée du
blocus de Gaza.
4 – Le choix de
Doha, une tâche indélébile dans le
parcours du Hamas
Khaled
Mecha’al a donc été finalement déchargé
de ses responsabilités à la tête du
Hamas, terme ultime d’une séquence
calamiteuse; un dégagement intervenu
dans la foulée d’une confession publique
de ses «erreurs» s’apparentant à une
capitulation idéologique en rase
campagne de la branche palestinienne de
la Confrérie des Frères Musulmans.
Son
évacuation en douceur par la voie
administrative a été motivée par le fait
que le chef du bureau politique du Hamas
ne pouvait postuler à un quatrième
mandat. Un procédé identique à celui
emprunté pour le dégagement de son
commanditaire, l’Émir du Qatar, en 2013;
un subterfuge qui n’aura échappé à
personne, sauf à ceux qui veulent bien
le croire. Exit donc Khaled Mecha’al
pour solde de tout compte d’une séquence
corrosive pour le combat national
palestinien.
Contrairement à Hassan Nasrallah, chef
du Hezbollah libanais, demeuré aux
commandes sur le théâtre des opérations,
au Liban face à Israël, en Syrie, face
aux djihadistes, de surcroît traqué par
les Services de renseignements d’Israël,
de la quasi totalité des pays de l’Otan
et de la totalité des pétromonarchies du
Golfe, le leadership sunnite des pays du
champ de bataille a, en contrechamps,
déserté, lui, le combat: Khaled Mecha’al
à Doha, Saad Hariri, l’ancien premier
ministre et chef du bloc majoritaire au
parlement libanais à Ryad, à Ahmad Al
Assir, la dague salafiste du Qatar sur
le flanc du Hezbollah, intercepté à
l’aéroport de Beyrouth en fuite vers le
Nigeria. Et cela fait tâche.
Son
retour en Palestine, à Gaza, pour y
accueillir son bienfaiteur, en décembre
2012, qui devait constituer son
apothéose, a servi de prétexte à Israël
pour se livrer à une nouvelle expédition
punitive, un mois après cette visite
pourtant qualifiée d’«historique» par la
presse atlantiste et célébrée par les
intellectuels organiques français et
leurs affidés qatarologues comme «le
triomphe du soft power» de la
principauté pétrolière.
Une
gesticulation diplomatique et médiatique
qui a pris la dimension d’un effroyable
gâchis, accentuant la précarité et le
dénuement de la population de
l’enclave..
En
quinze ans de pouvoir, le dauphin
désigné par le fondateur du Hamas,
Cheikh Ahmad Yassine, aura placé le
mouvement islamiste, dans un
invraisemblable retournement d’alliance,
en porte à faux avec ses alliés
naturels, ses partenaires de l’axe de
résistance à l’hégémonie
israélo-américaine (Iran- Syrie-
Hezbollah libanais).
Bénéficiant de l’hospitalité de la
Syrie, depuis sa tentative
d’empoisonnement par les Israéliens à
Amman en 1996, de l’encadrement du
Hezbollah et du soutien logistique de
l’Iran, Khaled Mecha’al a rallié le camp
islamo-atlantiste à la faveur du
«printemps arabe», se plaçant dans le
sillage du Qatar, un des marche-pieds
des États Unis dans le golfe et
ravitailleur énergétique de l’empire
atlantiste. Dans le sillage aussi de la
Turquie, unique pays musulman membre de
l’Otan, de surcroît partenaire
stratégique d’Israël, l’adversaire le
plus résolu aux aspirations du Monde
arabe, particulièrement du peuple
palestinien.
Cas
unique dans les annales des guerres de
libération nationale que cette
aberration mentale qui a équivalu, dans
l‘ordre symbolique, à se placer sous la
coupe de son bourreau, équivalant à
l’implantation du QG du FLN algérien à
proximité de Taverny, le PC de la force
stratégique aérienne française, ou du
Viêt-Cong vietnamien à Pearl Harbour, la
plus importante base américaine de la
zone Asie-Pacifique, ou encore les «barbudos»
cubains à Guantanamo.
Un virage par solidarité islamique ou
par sectarisme sunnite? Par nécessité
stratégique ou corporatisme opportuniste
?
5 – La capitulation
idéologique en rase campagne de Khaled
Mecha’al.
Prenant
prétexte d’un colloque organisé par le
Centre des Études de la chaîne du Qatar
«Al Jazira», samedi 24 septembre 2016,
s’est livré à une confession publique
sur «les erreurs» du Hamas durant la
séquence du «printemps arabe».
1 e
erreur: «Hamas a commis une erreur en
monopolisant le pouvoir à Gaza après sa
rupture avec le Fatah, dans la foulée de
sa victoire électorale en 2006.
2 me
erreur: «Nous avons commis l’erreur de
penser que l’ère du Fatah, (la matrice
des formations de la guérilla
palestinienne) était révolue et que
l’ère du Hamas débutait. Sur la base de
cette fausse estimation, nous avons
commis l’erreur de chercher à les
évincer.
3 me
erreur: «Le mouvement islamique a commis
l’erreur de surestimer son importance
dans la séquence dite du «printemps
arabe», faisant preuve d’un manque
d’expérience en ce domaine, d’un manque
d’informations précises, ce qui a
provoqué une perturbation dans nos
rapports avec nos partenaires».
4 me
erreur: Réaffirmation du principe de la
non ingérence dans les conflits qui
agitent la région. «Nous nous rangeons
du côté des peuples, en faveur de la
stabilité de la nation, en prenant en
considération nos intérêts et les
impératifs de notre combat en tant que
Mouvement de Libération Nationale et de
Mouvement de Résistance. En cas de
conflits d’intérêt, nous devons nous
ranger du côté de nos principes».
En 2012,
à l’expiration de son 2eme mandat, le
chef politique de la branche
palestinienne de la confrérie des Frères
Musulmans a avoué à Abdel Bari Atwane,
directeur du journal en ligne «Ar Rai Al
Yom», lors d’un entretien en Turquie,
qu’il ne «souhaitait pas briguer un 3eme
mandat, mais qu’il a dû postuler à la
demande pressante du Mohamad Morsi, à
l’époque président néo-islamiste Égypte,
du président turc Reccep Tayeb Erdogan
et de Youssef Qaradawi, le milliardaire
mufti de l’Otan basé à Qatar.
L’influent journaliste arabe d’origine
palestinienne révèle cet épisode dans
son compte rendu de la confession su ce
lien.
Commentant la confession télévisée de
l’exilé de Doha, Abdel Bari Atwane a
jugé qu’elle pêchait pas certaines
omissions, énumérant ses principaux
griefs à l’encontre du mouvement
palestinien:
1er
grief: «Hamas a non seulement cherché à
monopoliser le pouvoir à Gaza et ne
s’est pas contenté d’évincer le Fatah
mais également la plupart des autres
formations palestiniennes , qui
constituent la majorité du peuple
palestinien.
2eme
grief: Hamas a cherché à traiter
uniquement avec les formations
islamistes, un comportement d’un grand
sectarisme: «Au plus fort de l’euphorie
dans leur phase ascendante du «printemps
arabe», les islamistes avaient veillé à
éliminer toute discordance au sein de
l’opinion, ne tolérant la moindre
critique. Il est judicieux que «Mecha’al
ait demandé à ses partisans islamistes
de respecter les critiques formulées à
l’égard du Hamas».
3eme
grief: La plus grande erreur a résidé
dans le comportement du Hamas de ne pas
admettre le principe du «partenariat»
dans la gestion des affaires publiques.
Ce comportement est aberrant et «non les
erreurs d’appréciation, le manque
d’expérience et d’informations
précises», a souligné M. Atwane.
4eme
grief: «Le fait d’émettre des fatwas
frappant d’apostasie des dirigeants
arabes, dans le but de servir les menées
militaires étrangères contre les pays
arabes, ou de décréter le +Jihad+ en
Syrie».
5eme
grief: «FERMER L’ AMBASSADE DE SYRIE AU
CAIRE, TOUT EN MAINTENANT OUVERTE
L’AMBASSADE ISRAÉLIENNE», sous la
mandature Morsi.
«Khaled
Mécha’al aurait fait preuve de courage
en mentionnant ces graves erreurs, tout
en omettant pas de rappeler la
provenance de son arsenal, certainement
pas des pays auxquels il s’est rallié
(Qatar, Arabie Saoudite, Turquie), en
gardant surtout présent à l’esprit le
fait que la CAUSE PALESTINIENNE DOIT SE
PLACER AU DESSUS DES DIVISIONS INTERNES
ET DES DISSENSIONS CONFESSIONNELLES CAR
LA CAUSE PALESTINIENNE EST, EN PREMIER
LIEU, LA CAUSE DES ARABES, DES
MUSULMANS, ENFIN UNE CAUSE
INTERNATIONALE.
6- L’auto-critique
explicite d’un dirigeant du Hamas, la
branche palestinienne des Frères
Musulmans.
Anticipant ce dégagement, Ahmad Youssef,
ancien conseiller politique d’Ismail
Haniyeh, a pointé sans ambages les
erreurs du Hamas, spécifiant les erreurs
que l’exilé de Doha a omis de
mentionner:
«Le
Hamas a considéré que l’heure des Frères
Musulmans avait sonné avec la conquête
du pouvoir dans plusieurs pays arabes au
début du printemps arabe et qu’il
importait en conséquence de s’adapter au
nouveau contexte de manière à se
conformer à la nouvelle carte
géopolitique de la zone», a-t-il
déclaré.
«Les
islamistes en Égypte et en Palestine
n’ont pas fait preuve de lucidité
politique» lors de leur accession au
pouvoir, a-t-il ajouté lors de son
interview au quotidien libanais «Al
Akhbar», en date du 9 juin 2016, soit
quinze jours après la proposition du
tunisien Rached Ghannouchi de séparer le
politique du religieux.
Voici
les passages importants de cette
interview dont le texte intégral pour le
lecteur arabophone est sur ce lien
http://www.al-akhbar.com/node/259389
-«Le
dossier syrien a été le plus difficile à
gérer car cette affaire s’est répercutée
sur nos relations avec l’Iran et le
Hezbollah, avec lesquels nous sommes
liés par des liens historiques de
solidarité. Hamas a pâti dans cette
affaire; Ce fut une véritable perte pour
Hamas».
-«Avec
l’éviction de Mohamad Morsi, nous avons
perdu l’Égypte. Mais nous devons
néanmoins préserver nos relations avec
ce pays, dont nous n’oublions pas sa
contribution au combat pour la
Palestine, notamment le lourd tribut
payé par Nasser en ce domaine. «La
Palestine est la question centrale du
combat de la Oumma et nous nous devons
de maintenir une égale distance dans nos
rapports avec les capitales arabes et
islamiques.
-«L’incapacité du Hamas à se concilier
les autres forces, de même que le blocus
dont il a fait l’objet tant de la part
des Israéliens que des autres états, ont
quasiment paralysé sa capacité à
gouverner.
7- Le boulet de la
défection du prince vert
Au delà
de la bévue stratégique de Doha, le
Hamas traîne comme un boulet la
défection de Moss’ab Hassan Youssef, un
des fils du fondateur du Hamas.
L’une
des plus célèbres taupes israéliennes,
l’homme, son forfait accompli, s’est
réfugié en Californie, se convertissant
au catholicisme après avoir subi une
opération de chirurgie esthétique pour
le rendre méconnaissable.
Les
informations que Mossa’b Youssef a
livrées aux Israéliens ont conduit aux
arrestations d’Ibrahim Hamid, un chef
militaire du Hamas en Cisjordanie et de
Marwan Barghouti, la figure emblématique
du Fatah en Cisjordanie. Il était
surnommé par ses agents traitants le
«prince vert», vert comme la couleur de
l’islam. Et prince parce qu’il devait
leur rappeler le «prince rouge»: Ali
Hassan Salameh, l’homme des premiers
contacts entre l’OLP de Yasser Arafat et
la CIA que le Mossad assassina à
Beyrouth dans la décennie 1980.
N’était-ce la corruption du camp rival
et l’impéritie de son chef Mahmoud
Abbas, brasseur d’air par excellence, le
Hamas aurait été plongé dans une
disgrâce durable. Son débaucheur,
l’ancien Émir du Qatar, Cheikh Hamad Ben
Khalifa, le perturbateur en chef du
Moyen-Orient, a, lui, depuis belle
lurette sombré dans l’oubli, zappé par
son mentor américain.
8- Khaled Mecha‘al
du Hamas en body building à Doha
Au
Qatar, dans cet émirat mirage, le
paradis de Khaled Mecha’al est devenu un
enfer. Le chef politique de l’unique
mouvement de libération nationale
sunnite du Monde arabe s’est morfondu à
Doha dans sa luxueuse résidence, devenue
au fil du temps une résidence
surveillée.
Interdit de parole publique, dont les
déplacements étaient strictement limités
au prétexte de sa sécurité.
Oisif, alors que la zone est carbonisée
par une guerre régionale d’une rare
violence qui scellera le sort de la
Palestine, il meublait son temps à faire
de la gymnastique pour se maintenir en
forme ou ne pas sombrer dans la déprime.
9 – Les impératifs
de combat d’un mouvement de libération
nationale.
Quitter
le pays qui lui a offert l’hospitalité
et se tenir à l’écart d’un conflit
fratricide est un acte respectable en
soi.
Rallier les ennemis d’un pays dont on a
été hôte pendant seize ans et contribuer
indirectement à sa destruction et
affaiblir du coup le camp de ses «Frères
d’armes»…Quel cauchemar interminable
pour l’exilé de Doha. Quelle longue nuit
noire de remords. Un point noir
indélébile sur son parcours jusqu’à
présent sans faute.
Un
mouvement de libération nationale qui
renonce de facto à libérer son pays
occupé pour privilégier un alignement
sectaire, non sur sa religion, mais sur
une école de pensée religieuse, cesse
ipso facto d’être un mouvement de
libération.
Le choix
de Doha bien que collectif a été, en
dernier ressort, un choix personnel. Il
demeurera, quoiqu’il en soit, demeurera
comme une tâche indélébile dans le
parcours du Hamas. Il posera de façon
permanente, de manière sous-jacente, la
question de sa fiabilité et de la
viabilité de ses engagements.
Celui qui se rêvait en destin de
Libertador s’est révélé un fossoyeur de
la cause palestinienne. Celui dont le
nom patronymique «Khaled Mecha’al-
Eternel flambeau» le prédestinait à être
le flambeau guidant son peuple vers
l’indépendance, s’est révélé être, au
terme d’un parcours erratique, un phare
déréglé, projetant son peuple sinon vers
l’abîme à tout le moins vers l’impasse.
La
démission de Khaled Mecha’al est donc
une mesure de salubrité publique,
conforme à l’éthique du commandement. La
sanction d’un échec personnel.
Une décision qui s’imposait
impérativement à l’honneur de l’homme, à
la dignité de sa fonction, au prestige
de son mouvement et à la crédibilité de
son combat.
Pour aller plus loin sur ce
sujet
Le sommaire de René Naba
Le
dossier Hamas
Les dernières mises à jour
|