MADANIYA
Les assassins de la mémoire
Pierre Stambul
Jeudi 6 février 2020
Note de la rédaction madaniya.info
: La visite controversée
d’Emmanuel Macron en Israël, les 22 et
23 janvier 2020, à l’occasion de la
commémoration du 75e anniversaire de la
libération du camp de concentration
d’Auschwitz-Birkenau, de même que la
divulgation par le président américain
Donald Trump de la «Transaction du
siècle» remettent en mémoire
l’hypersensibilité du fait juif dans le
Monde Occidental particulièrement en
France en raison de son passé
collaborationniste avec le nazisme sous
Vichy.
Concocté par le gendre présidentiel
américain Jared Kushner, membre influent
du lobby juif américain, la «transaction
du siècle» vise à instaurer un
«Bantoustan» palestinien pour solde de
tout compte par les «grandes démocraties
occidentales» en connivence avec leurs
laquais pétromonarchiques.
S’insurgeant contre l’ignominie
résultant d’une compensation sur bien
d’autrui, la forme la plus achevée de la
perversion triangulaire en ce qu’elle
exonère un criminel et pénalise un
innocent, sans pour autant donner
pleinement satisfaction au bénéficiaire
de la compensation, sans apaiser sa soif
vindicative, le site «Ar Rai Al Yom» de
l’influent journaliste arabe Abdel Bari
Atwane se pose la question de savoir si
les Palestiniens ne représentent-ils pas
l’ultime conséquence catastrophique du
nazisme. Fin de la Note
Les assassins de la
mémoire.
Par Pierre
Stambul
Membre du Bureau National de l’Union
Juive Française pour le Paix, avec son
aimable autorisation : https://www.ujfp.org/
«Les assassins de
la Mémoire». Pierre Vidal-Naquet a
utilisé cette expression contre les
faussaires et les négationnistes qui
niaient ou minimisaient l’ampleur et la
préméditation de l’extermination
perpétrée par les Nazis contre les
Juifs, les Roms, les communistes, les
homosexuels … Je l’utilise contre ceux
qui se sont approprié l’histoire, la
mémoire et les identités juives pour
bâtir, au nom des Juifs, un État
d’apartheid qui rappelle sur bien des
plans, selon l’historien Zeev Sternhell,
l’Allemagne des années 1930.
Israël, une société
à la dérive.
Le résultat des
élections israéliennes de 2019 donne une
photographie plus qu’inquiétante de
cette société. 100 députés élus (sur
120) sont ouvertement pour l’apartheid.
La «loi sur Israël État-Nation du peuple
juif» fait largement consensus. Elle
rappelle par beaucoup d’aspects
l’arsenal juridique que l’apartheid
sud-africain avait fabriqué. Des propos
qui devraient normalement conduire leurs
auteurs devant un tribunal servent
d’argument électoral.
Citons-en
quelques-uns: Lieberman proposant de
décapiter ses opposants à la hache après
avoir proposé autrefois de bombarder le
canal de Suez. Bennet expliquant qu’il a
«tué beaucoup d’Arabes et ne voit pas où
est le problème». Shaked proposant
d’exterminer les mères palestiniennes
puisqu’elles «mettent au monde des
terroristes». Yitzhak Yossef, grand
rabbin, qualifiant les Afro-Américains
de singes. Pardon pour tous ceux que
cette énumération oublie.
Deux criminels de
guerre en compétition pour les
élections.
L’élection
israélienne d’avril 2019 a opposé deux
criminels de guerre. Ntanyahou s’est
allié aux «Kahanistes» (mouvement
raciste fondé en 1971 par Meir Kahane
longtemps interdit pour ses appels au
meurtre) et, tout en promettant
l’annexion de la Cisjordanie, il a
martelé qu’Israël était un État
seulement pour les Juifs. Son
adversaire, Benny Ganz, était à la tête
de l’armée pendant le massacre
de«Bordure Protectrice» (2014) et il
s’était vanté de faire revenir Gaza à
l’âge de pierre. Les barrières morales
se sont écroulées. Pendant les marches
du retour, on a pu voir des vidéos où
des soldats poussent des cris de joie
quand ils tuent ou estropient, comme à
la fête foraine, un journaliste, une
infirmière ou un simple jeune gazaoui.
L’ambiance
ressemble à celle du sud des États-Unis
à l’époque où les lynchages étaient un
spectacle public de divertissement.
L’école, l’armée et la propagande
officielle abrutissent et formatent
toute une société à l’image de ce qui se
passe dans diverses sociétés
totalitaires. Cet État qui était censé
donner un refuge aux Juifs persécutés a
des valeurs qui le rapprochent
infiniment plus de ceux qui ont commis
le génocide nazi que de ceux qui l’ont
subi. En Israël, ne pas adhérer à ce
déchaînement de violence, de haine ou de
stigmatisation de l’autre, fait de vous
un.e traître.
Les Palestiniens
d’Israël (20% de la population, ils
descendent de ceux qui ont
miraculeusement échappé au nettoyage
ethnique prémédité de 1948) sont devenus
des étrangers dans leur propre pays. La
moitié d’entre eux se sont abstenus, ils
refusent de cautionner leur propre
ségrégation. Certains ne voulaient pas
cela. Une partie de la société
israélienne voudrait vivre dans un pays
normal, sans le pseudo messianisme
meurtrier, sans l’intégrisme colonial et
sans la guerre éternelle comme unique
perspective. Elle a la nostalgie des
kibboutz ou de la déclaration
d’indépendance.
Une singulière
amnésie.
Singulière amnésie:
Israël s’est construit sur la base d’un
nettoyage ethnique programmé.
L’historien sioniste Benny Morris a
reconnu les nombreux crimes de la guerre
de 1948 en expliquant qu’ils étaient
indispensables pour construire un État
juif.
Les fondateurs de
cet État ont pensé dès le départ le
suprématisme et une stricte séparation.
Les Palestiniens qui ont échappé à
l’expulsion de 1948 ont toujours été des
sous-citoyens soumis aux lois militaires
et au couvre-feu jusqu’en 1966. Israël
n’a jamais été l’État de tous ses
citoyens.
La conquête de 1967
et la colonisation ne sont pas des
accidents de l’Histoire. Elles ont été
préméditées et réalisées par les
fondateurs d’Israël. L’apartheid, le
racisme, les propos fascisants et le
militarisme sont la suite logique de
cette histoire. Ceux qui regrettent que
le sionisme ait engendré un monstre ou
qui trouvent qu’Israël est à l’antithèse
de leur judaïsme, doivent s’interroger.
Comme le dit
l’écrivaine Ofra Yeshua-Lyth, la
création d’un État juif n’était pas une
bonne idée. Comme le dit l’ambassadeur
palestinien Élias Sanbar, à l’origine de
cette guerre, il y a eu un «grand
remplacement» qu’il faut réparer.
Imaginer un Israël
humaniste, paisible et démocratique,
sans revenir sur le crime fondateur de
1948, est illusoire.
Le goût de
l’apartheid
Dominants/dominés,
comment le colonisateur a pris goût à la
colonisation et à l’apartheid. Les Juifs
ont été les parias de l’Europe. Le
sionisme a fait des Juifs israéliens des
colons européens en Asie. Les lois qui
ont suivi la guerre de 1948 (notamment
la loi sur les «présents/absents» qui a
permis de s’emparer des terres des
Palestiniens expulsés) leur ont donné la
propriété quasiment exclusive de la
terre.
Les nouveaux
parias, les Palestiniens, sont devenus
un peuple de réfugiés, rejetés et
discriminés partout. La «loi du retour»
a organisé, pour les nouveaux immigrants
juifs, le vol des terres, des maisons et
des biens palestiniens. Après 1967, le
vol s’est amplifié dans les territoires
nouvellement occupés. Ce qui diffère,
c’est que les occupants légitimes de la
terre sont toujours là, confrontés
quotidiennement à la violence des colons
et de l’armée.
Aux rescapés du
génocide et aux immigrants arrachés de
leur terre d’origine on a dit qu’ils
avaient un pays bien à eux et que c’était«une
terre sans peuple pour un peuple sans
terre». On a offert à des Polonais, des
Soviétiques, des Marocains, un pays et
ses richesses qui ne leur appartenaient
pas. Pour les Juifs orientaux, il y
avait une condition, qu’ils se
débarrassent de leur «arabité». On a
inventé un roman national pour justifier
le grand remplacement et le vol: «nous
avons été en exil et nous rentrons chez
nous». «Dieu a donné cette terre au
peuple juif». Ce discours continue de
fonctionner pour justifier la conquête
coloniale.
Tous les Premiers
ministres israéliens depuis 50 ans ont
amplifié la colonisation. Tous ont
multiplié les lois suprématistes. Tous
ont accompagné le glissement régulier
vers l’apartheid décomplexé. On n’a
jamais vu un privilégié accepter
volontairement de renoncer à ses
privilèges. L’occupation offre des
avantages sans limites pour Israël: des
terres, de l’eau, des richesses, le fait
de ne pas avoir à payer quoi que ce soit
pour l’occupé et la possibilité
d’expérimenter les armes et les
technologies les plus sophistiquées sur
les Palestiniens pour mieux les vendre …
Comme pays
colonisateur, Israël s’est brièvement
posé la question: «va-t-on chercher un
compromis comme l’ont fait les Blancs
sud-africains ou écraser jusqu’au bout
le peuple autochtone comme l’OAS a tenté
de le faire en Algérie?» Cette dernière
stratégie ne fait plus de doute pour
personne. Continuer à propager le mythe
des «deux États vivant côte à côte»,
tolérer qu’on associe Israël à la
mémoire du génocide nazi, accepter les
mensonges propagandistes du style
«Israël a le droit de se défendre»,
c’est être complice.
Israël,
poisson-pilote du fascisme qui vient.
Ce qui se passe
aujourd’hui aurait été impossible il y a
quelques années. Un fasciste assumé,
Bolsonaro, va au mémorial Yad Vashem au
bras de son ami Nétanyahou. Il explique
que les Nazis étaient de gauche et qu’il
faut pardonner l’holocauste.
Nétanyahou lui-même
explique qu’Hitler ne voulait pas tuer
les Juifs, et que c’est le grand mufti
de Jérusalem qui est à l’origine de
cette idée. En visite en Hongrie chez
son ami Victor Orban, il apporte son
appui à la campagne antisémite menée par
Orban contre Georges Soros. Orban
réhabilite le régime nazi de l’Amiral
Horthy qui a participé à l’extermination
des Juifs hongrois et Nétanyahou se
contente de dire que Soros est un ennemi
d’Israël.
Le basculement vers
le fascisme de ceux qui parlent au nom
des Juifs a lieu aussi en France où le
président du CRIF est un ancien du Bétar,
cette milice violente, régulièrement
alliée à l’extrême droite. Cette
présence d’une idéologie fascisante chez
certains dirigeants sionistes n’est pas
vraiment nouvelle, mais autrefois ça se
faisait discrètement. Aujourd’hui il n’y
a plus aucune retenue.
Rappelons qu’il y a
un siècle, le courant «révisionniste» du
sionisme fondé par Jabotinsky (eux-mêmes
avaient choisi cet intitulé) était très
proche du fascisme italien. Ce courant a
vite versé dans le terrorisme aveugle
contre les Palestiniens puis contre les
Britanniques. Une des branches de ce
courant (le groupe Stern dirigé par le
futur Premier ministre Yitzhak Shamir) a
collaboré avec les Nazis en assassinant
des soldats et des dignitaires anglais
en pleine guerre mondiale. On a fait
semblant de croire que ces pratiques
avaient disparu avec la création de
l’État d’Israël.
C’est totalement
faux. Les dirigeants israéliens ont
utilisé dès le début des méthodes
expéditives: refus d’appliquer la
résolution 194 sur le retour des
réfugiés palestiniens en 1948,
destruction systématique des villages
palestiniens, effacement des traces de
la Palestine. Ils ont montré avec
application qu’ils se moquaient
totalement du droit international et ne
croyaient qu’en le fait accompli.
L’attaque de 1967, le refus d’évacuer
les territoires nouvellement occupés et
le lancement de la colonisation des
nouvelles terres conquises sont des
actes cyniques de gangstérisme.
Le père de
Nétanyahou a été le secrétaire de
Jabotinsky. Sa façon d’agir puise dans
une longue tradition. Avec Trump, avec
la complicité de dirigeants arabes (MBS
en Arabie Saoudite, Sissi en Égypte …),
avec Orban, Bolsonaro ou les Chrétiens
évangéliques, Nétanyahou pense être dans
une situation hégémonique où tout est
permis. Quand ce membre de la nouvelle
internationale fascisante aux méthodes
expéditives se réclame de la mémoire de
l’antisémitisme et des victimes du
génocide nazi, il se comporte aussi en
assassin de la mémoire.
Complicité et
impunité, la responsabilité colossale de
la communauté internationale.
En mai 2017,
Richard Falk et Virginia Tilley
établissent pour le compte de la CESAO
(Commission Économique pour l’Asie
Occidentale) un rapport prouvant avec un
nombre considérable d’éléments qu’Israël
est coupable du crime d’apartheid, tel
qu’il a été internationalement défini et
unanimement reconnu. Aussitôt, le
secrétaire général de l’ONU, Antonio
Guterres interdit la publication du
rapport. Sans autre prétexte qu’une
évidence: ce rapport déplait aux
dirigeants états-uniens et israéliens.
Cette pantalonnade n’est que la suite
d’une série ininterrompue d’actes de
lâcheté et de complicité.
En 1948, l’envoyé
de l’ONU le Comte Bernadotte, est
assassiné avec le Colonel Sérot. Les
assassins, membres du groupe Stern, sont
connus. L’ONU n’exige pas leur
arrestation. Ils se retrouvent peu après
dans le premier gouvernement d’Union
Nationale de Ben Gourion. Quelques mois
plus tard, Israël est admis à l’ONU avec
un texte précisant que ce pays accepte
et respecte le droit international: or
il vient de fouler au pied la résolution
194 sur le retour des réfugiés et est en
train de raser les villages
palestiniens. Depuis plus de 70 ans, les
provocations israéliennes n’ont jamais
cessé. En 1967, en réponse à la
résolution 242 exigeant le retrait des
territoires occupés, Israël lance le
rouleau compresseur colonial qui,
depuis, s’est sans cesse amplifié.
Quand en 2010,
Obama et Biden demandent un «gel» de la
colonisation, le gouvernement israélien
annonce aussitôt de nouvelles
constructions. Quand l’aviation et les
tanks israéliens rasent Gaza en 2014,
l’ambassade de France à Tel-Aviv
organise un bal de solidarité … avec
Israël.
Pourquoi cette
complicité qui dépasse l’indécence?
Les dirigeants
occidentaux sont aussi des assassins de
la mémoire. Ils se prétendent les
défenseurs des Juifs victimes du
suprématisme nazi en soutenant
inconditionnellement des suprématistes
juifs qui s’acharnent à singer les
bourreaux d’hier. Ils se débarrassent de
leur culpabilité certaine en ce qui
concerne l’antisémitisme et le génocide
nazi sur le dos des Palestiniens qui
n’ont rien à voir avec cette barbarie
européenne. En voulant réhabiliter le
Maréchal Pétain pour son rôle dans la
boucherie de Verdun et en invitant
Nétanyahou pour l’anniversaire de la
Rafle du Vel d’Hiv (un crime bien
français, qu’est-ce qu’Israël a à voir
avec cela?), Macron est aussi un
assassin de la mémoire: il brouille
toute compréhension.
Permettre aux
dirigeants sionistes de se réclamer de
la mémoire des Juifs persécutés, c’est
leur rendre un service fantastique, ils
n’ont aucun droit à se réclamer de ce
passé qu’ils piétinent.
Le crime se
poursuit contre les Palestiniens parce
qu’Israël est devenu le bras avancé de
l’Occident: ses dirigeants donnent
l’exemple d’une reconquête coloniale
aboutie, d’une économie fondée sur les
technologies de pointe et les armes les
plus efficaces, des méthodes les plus
abouties pour commettre des meurtres
impunis. Ils sont les maîtres en ce qui
concerne la surveillance et
l’enfermement des populations supposées
dangereuses. Ils montrent que le racisme
le plus décomplexé, le militarisme et la
corruption sont ce qu’il y a de plus
efficace pour gouverner. Cette
complicité obscène, il est plus
qu’urgent de la briser.
Les Juifs israéliens
sur la trace des Pieds Noirs d’Algérie?
En Algérie aussi,
des Européens, français pour la plupart,
appartenant souvent aux couches les plus
défavorisés, sont devenus des
colonisateurs. On ne leur avait pas dit
que l’Algérie était«une terre sans
peuple pour un peuple sans terre», mais
juste que, les autochtones étant tous
des «arriérés», il était licite de
prendre leurs terres, de les priver de
tout droit civique et de les utiliser
comme main d’œuvre exploitable et
corvéable à merci.
Et quand les
Algériens se sont révoltés, il est
devenu «légitime» de brûler leurs
villages, de violer les femmes, de
torturer, de faire disparaître les
corps, de multiplier les «corvées de
bois». Au bout du compte, la grande
majorité des Pieds Noirs (même ceux qui
étaient là depuis plusieurs générations)
et des Juifs algériens (qui étaient des
autochtones, ils ont été assimilés au
colonisateur par le décret Crémieux) a
dû partir.
Sans doute, s’il
avait existé un courant politique
conséquent, chez les Pieds Noirs, pour
négocier leur maintien dans une Algérie
indépendante, ce maintien aurait été
possible. Mais c’est un mouvement
fasciste, l’OAS, qui s’est exprimé en
leur nom.
L’équivalent de
l’OAS est au pouvoir en Israël, sans
réelle alternative. Comme les Pieds
Noirs, les Israéliens sont sûrs d’avoir
la force avec eux. Ils sont sûrs que les
pertes énormes infligées à l’adversaire,
les humiliations, les enfants arrêtés,
les tortures … leur assureront une
domination éternelle. Cette domination
est une évidence renforcée par la vague
populiste fascisante dans de nombreux
pays. Beaucoup d’Israéliens pensent que
ce rapport de force sera éternel. Aucun
rapport de force n’est éternel.
Les Juifs israéliens
à la différence des Pieds Noirs n’ont
pas de Métropole.
Les Juifs
israéliens, à la différence des Pieds
Noirs, n’ont pas de métropole. En ce
sens la politique de type OAS menée
actuellement n’est pas seulement
criminelle contre les Palestiniens.
Elle est suicidaire
pour les Juifs israéliens et menace
aussi les Juifs du monde entier. On ne
réparera pas le nettoyage ethnique de
1948 par un autre nettoyage ethnique.
Cela impose d’en finir avec le rouleau
compresseur colonial.
Notre mémoire: le
vivre ensemble, l’égalité, la
solidarité.
Pendant des
décennies, la majorité des Juifs ont
considéré que leur émancipation, comme
population discriminée, passait par
l’émancipation de l’humanité. On peut
discuter à l’infini pour savoir si
l’engagement massif des Juifs/ves dans
des combats pour la démocratie, pour la
révolution, contre le fascisme et le
colonialisme, étaient ou non une
«transposition laïque» du messianisme.
Révolutionnaires,
scientifiques, écrivain-e-s, cinéastes,
militant-e-s ouvriers, ces Juifs/ves,
même quand ils/elles ne revendiquaient
pas cette identité, ont été à
l’antithèse des fascistes au pouvoir en
Israël. Les valeurs de ces hommes et
femmes étaient l’égalité, la solidarité,
l’esprit critique, l’universalisme,
l’engagement. La figure du Juif, ça a
longtemps été Hannah Arendt ou Abraham
Serfaty. Aujourd’hui, ce sont les
soudards Lieberman ou Nétanyahou.
Après le génocide
nazi, le cri des rescapés a été: «que
cela n’arrive plus jamais»! Les
sionistes disent: «que cela ne NOUS
arrive plus jamais»! Et cela veut dire
exactement l’inverse. Ils ont repris à
leur compte toutes les «valeurs» des
bourreaux d’hier: racisme décomplexé,
négation des droits et de la dignité de
l’autre, destruction systématique de la
société de l’autre, meurtres gratuits,
suprématisme. Ils imitent ce que les
États-Uniens ont fait contre les
Amérindiens avec la même bonne
conscience. Ils pensent qu’ils ont tous
les droits. Ils ne sont pas seulement
des assassins du peuple palestinien. Ils
assassinent aussi la mémoire du
judaïsme, qu’il soit laïque ou
religieux.
Pour aller plus
loin sur ce thème :
En complément
Dossier spécial Palestine : La
transaction du siècle qui dynamite les
paramètres du conflit
israelo-palestinien tels qu’ont été
établis par les Nations Unies marque le
début du discrédit de l’Occident et de
sa primauté morale. Le début de son
déclin.
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Illustration:
Israeli Prime
Minister Benjamin Netanyahu, right,
speaks with Israeli Chief of Staff Lt.
Gen. Benny Gantz, during a graduation
ceremony of navy officers in the
northern port city of Haifa, Israel,
Wednesday, Sept. 11, 2013. Netanyahu has
praised the Russian initiative for Syria
to relinquish its chemical weapons but
said its backers must verify that
Damascus actually follows through and
disarms itself of all chemical weapons.(AP
Photo/Dan Balilty).
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