Arrêt sur Info
Alep – L’information mensongère continue
Nabil Antaki
Dimanche 1er mai 2016
Nous avons demandé au Dr.
Nabil Antaki si les informations
rapportées depuis une semaine dans les
pays francophones sur la situation à
Alep correspondaient à ce qu’il constate
sur place. Voici sa réponse.
Par Dr Nabil Antaki
Au sujet des récents événements, je
constate que les médias [traditionnels,
ndlr] continuent de mentir par omission.
Depuis le début de la guerre à Alep il y
a 4 ans, ils ne rapportent pas du tout
les faits dans leur ensemble.
Nous sommes très révoltés ici à Alep
par leur manque d’impartialité et
d’objectivité. Ils ne parlent que des
souffrances et des pertes humaines dans
la zone Est de la ville contrôlée par
al-Nosra, un groupe terroriste affilié à
al-Qaïda, qu’ils qualifient toujours de
« rebelle » ce qui est une manière de le
rendre respectable. Et ils restent muets
sur les pertes et les souffrances
endurées quotidiennement dans nos
quartiers de l’Ouest d’Alep à cause des
tirs d’obus lancés par les terroristes.
Ils ne parlent pas davantage du blocus
et des coupures totales d’eau et
d’électricité qu’ils nous infligent…
Ils n’ont rien dit des bombardements
continus et des carnages qui ont eu lieu
depuis une semaine dans la partie Ouest
de la ville où aucun quartier n’a été
épargné et où il y a tous les jours des
dizaines de morts. Ces omissions sont
d’autant plus révoltantes que ces
quartiers représentent 75 % de la
superficie d’Alep et comptent 1.5
millions d’habitants – contre 300.000
dans la partie Est occupée par les
groupes terroristes. Cette information
tronquée laisse entendre que les groupes
terroristes qui nous attaquent sont les
victimes. Pire, les médias ont détourné
notre appel « SAUVER ALEP » en
laissant croire que cet appel exigeait
l’arrêt des hostilités par « les forces
d’Assad ». Ce qui est faux. D’ailleurs,
il n’y a pas de «forces d’Assad » : il y
a les forces de l’armée régulière
syrienne qui défendent l’Etat syrien.
Ils [les médias traditionnels,
ndlr] auraient pu au moins avoir la
décence de mentionner les carnages
causés par les tirs des terroristes qui
ont fait de nombreux morts. Comme cela
s’est encore produit hier, vendredi, où
un de leurs tirs a frappé une mosquée à
l’heure de la prière. Les attaques et
les pertes dont nous souffrons sont
présentées de manière à laisser le
public dans le flou quant aux véritables
responsables de ces crimes (*) (**).
Depuis trois jours les médias
accusent le « régime Assad » d’avoir
bombardé et détruit un hôpital soutenu
par l’ONG Médecins sans Frontières à
l’Est d’Alep et tué le dernier
pédiatre de la ville. Cela
montre bien que, pour les médias, seule
compte cette poche occupée par les
rebelles, et que les trois quarts de la
ville d’Alep administrée par l’Etat
syrien, où pratiquent encore de nombreux
pédiatres, ne comptent pas. Nous avions
constaté la même partialité quand le
plus grand hôpital d’Alep (Al Kindi)
avait été frappé par les obus
terroristes, puis incendié
intentionnellement, il y a 2 ou 3 ans :
les médias l’avaient ignoré. Nous sommes
écœurés et révoltés par cette
désinformation permanente.
Nabil Antaki, 30 avril 2016
***
La brutalité
du « régime syrien ». Vraiment ?
Par Silvia Cattori
Les deux exemples,
ci-dessous – tout comme les propos tenus
par les archevêques Mgr Boutros
et Mgr Antoine Audo plus loin
– illustrent l’information
déséquilibrée dénoncée par le Dr Antaki.
(*)Deux commentaires du TJ,
19.30 par la RTS le jeudi 28 avril, qui
illustrent le biais que dénonce plus
haut le Dr Nabil Antaki.
Journaliste: « La trêve en
vigueur depuis le 27 février est en
train de voler en éclats. Les forces d’Assad
préparent une offensive majeure pour
reprendre les quartiers rebelles d’Alep.
C’est ce qui explique ces bombardements
meurtriers qui ont fait plus de cent
morts en une semaine« .
Un homme, qui de toute évidence
sert la propagande des gentils
« rebelles », dit : « Les missiles
russes ainsi que ceux d’Assad ont
perpétré deux massacres. Ces attaques
ont pris pour cible des civils femmes et
enfants et ont fait des dizaines de
martyrs.. ».
Journaliste: « De leur côté les
rebelles répliquent au mortier, comme
ici dans ce village au nord d’Alep».
Les « rebelles répliquent ». Il n’est
pas précisé que les gentils « rebelles »
bombardent de leur côté les quartiers
d’Alep où vivent 1,5 millions de
Syriens.
Chacun peut se rendre compte que tout
dans les commentaires vise à convaincre
les téléspectateurs que les Russes et
Assad sont des meurtriers qui tuent
délibérément des civils…
http://www.rts.ch/play/tv/19h30/video/syrie-la-treve-nest-plus-du-tout-respectee?id=7684776_
(**)France culture, le 29
avril 2016.
Les commentaires se fondent
uniquement sur la version des faits
propagés par des acteurs qui parlent de
la partie Est d’Alep. L’accent est mis
sur « la grande brutalité d’Assad« .
C’est uniquement « l’Est d’Alep
contrôlé par les rebelles » qui est
soumis à « des bombardements
incessants depuis une semaine« .
On évoque la mort du dernier pédiatre
de la ville, ce qui revient à faire
croire au public que c’est toute la
ville d’Alep qui est privée de
pédiatre. Le journaliste Omar Ouamane y
va de sa propagande pro-rebelles dont il
est coutumier depuis le début de la
crise. Tout est imprécis, à charge
contre l’Etat syrien. La population qui
en grande majorité a fui l’Est d’Alep,
et la partie de la ville qui est
administrée par le gouvernement, frappée
par les obus des groupes terroristes, ne
sont pratiquement pas évoqués. Comme le
souligne le Dr Nabil tout est flou, rien
ne permet au public de voir que le
peuple syrien ne souffre pas à cause de
Damas mais à cause de ces bandes armées
que la télévision RTS ou
France Culture, veulent
épargner. L’objectif est toujours le
même. Provoquer l’indignation contre
l’Etat syrien.
Silvia Cattori | le 30 avril 2016
« Alep se meurt »,
lance
l’archevêque arménien catholique
L’archevêque arménien
catholique d’Alep, Mgr Boutros
Marayati, a déploré, vendredi
29 avril, le sort tragique de son
peuple et de sa ville qui subit
depuis quelques jours d’intenses
bombardements.
« Tous crient : “sauvez Alep” et
entre-temps, Alep se meurt. » C’est
le cri de détresse que lance
l’archevêque arménien catholique
d’Alep, Mgr Boutros Marayati, alors
que la ville subit depuis quelques
jours d’intenses bombardements,
rapporte le 29 avril 2016 l’agence
Fides. « Nous l’appelons guerre
civile et ceux qui paient le prix le
plus fort sont les civils, de part
et d’autre, à commencer par les
enfants », se désole-t-il.
Tirs croisés
Les quartiers centraux d’Alep, où
vit l’archevêque, sous le contrôle
de l’armée syrienne, ont été frappés
ces derniers jours par une pluie de
roquettes et de tirs d’artillerie
sans précédent, provenant des
quartiers contrôlés par les rebelles
antigouvernementaux.
Ces quartiers, sous l’emprise des
milices liées à des formations
djihadistes, ont, eux aussi, fait
l’objet d’intenses bombardements de
la part de l’armée, ces tirs ont
touché notamment un hôpital soutenu
par Médecins sans frontières,
provoquant une cinquantaine de
victimes.
« Le cauchemar »
« Nous voyons les tirs arriver
sur nos quartiers et nous entendons
au loin les bombardements aériens.
Au cours des quelques semaines
pendant lesquelles la trêve a été en
vigueur, les écoles avaient été
rouvertes, nous avons pu célébrer
Pâques dans nos églises et la
population croyait rêver », raconte
Mgr Marayati.
« Mais maintenant, poursuit-il,
après ces jours d’espérance, le rêve
s’est transformé en un cauchemar
encore plus sombre ». Mgr Marayati
veut espérer que les négociations de
Genève reprendront le 10 mai. « En
l’absence d’un nouveau
cessez-le-feu, les prochains jours
seront terribles », confie-t-il.
Selon Mgr Marayati, le destin
d’Alep et du peuple syrien demeure
entre les mains des grandes
puissances. « La fin du conflit
dépend des États-Unis, de la Russie
et des autres forces de la région. »
Selon lui, eux seuls peuvent
contraindre toutes les parties
impliquées dans cette sale guerre à
la faire cesser, en mettant de côté
les intérêts et les desseins cachés
qui continuent à alimenter le
massacre.
Terreur
Mgr Antoine Audo, archevêque
chaldéen d’Alep, partage l’analyse
de Mgr Marayati sur la situation. Il
affirme, pour sa part, sur le site
Aide à l’Église en Détresse (AED) que
les groupes de rebelles du front Al-Nosra
sont dominés par les djihadistes qui
contrôlent certaines zones d’Alep. Il
ajoute qu’ils cherchent à semer la
peur et la terreur à travers les
fusillades et les bombardements. « Ce
sont des groupes financés par
l’étranger. Ils ne viennent pas de
Syrie. Chez nous, les relations
entre les chrétiens et les musulmans
étaient bonnes, et le sont
toujours », précise-t-il.
Mgr Audo estime que la poursuite
des combats va aggraver l’exode des
chrétiens. « Avant la guerre, Alep
comptait plus de 150 000 chrétiens
de différentes confessions.
Aujourd’hui, environ deux tiers
d’entre eux sont des déplacés dans
leur propre pays ou se sont réfugiés
à l’étranger, par exemple au Liban,
mais aussi dans les pays
occidentaux. Ceux qui restent sont
surtout les plus âgés et les plus
pauvres », dit-il à AED.
G.V. avec Apic, le 29/04/2016
Le
dossier Syrie
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