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L’Afrique tourne le dos à la CPI
Mikhail Gamandiy-Egorov
© AP
Photo/ Mike Corder
Mardi 7 février 2017
Source:
Sputnik
Fait marquant du sommet de l’Union
africaine : le retrait de la plupart de
ses membres de la Cour Pénale
Internationale. Un geste qui marque la
volonté d’indépendance de ces pays
vis-à-vis de l’Occident et celle de
peser dans les affaires du monde
multipolaire.
Le récent sommet de l'Union africaine
qui s'est déroulé dans la capitale
éthiopienne Addis-Abeba a confirmé une
fois de plus les clivages qui existent
au sein du continent africain, mais
aussi que l'Afrique ne sera pas absente
des processus du monde multipolaire.
En
effet, l'organisation panafricaine a
adopté une stratégie de retrait
collectif de la Cour pénale
internationale (CPI). Pourtant et sans
surprise, certains pays n'ont pas manqué
de se faire les « avocats » de ladite
structure, notamment le Sénégal, la Côte
d'Ivoire ou encore le Nigeria. Des pays
dont les leaders actuels sont connus
pour avoir des liens très proches avec
les élites occidentales. Néanmoins, et
malgré leur opposition au processus
engagé, l'Afrique semble effectivement
décidée à quitter massivement la CPI.
Pour
rappel, le Burundi avait montré
l'exemple en lançant le processus, pour
être presque immédiatement suivi par
l'Afrique du Sud, puis par la Gambie.
Plus que cela, la République
sud-africaine semble avoir pris le
leadership au niveau continental dans ce
mouvement d'opposition face à une
structure dite de justice internationale
n'ayant pas rempli le rôle qui lui avait
été confié. Et au regard d'un processus
désormais engagé au niveau de l'UA, les
pressions occidentales n'y feront rien,
mis à part les quelques exceptions
citées.
Pourquoi ce retrait massif africain de
la CPI est-il si important? Tout
d'abord, car pour beaucoup de nations
africaines, la cour est une structure
défendant des intérêts néocolonialistes
et même racistes. Sa caractéristique est
de s'attaquer aux leaders africains qui
se sont opposés aux manœuvres
occidentales dans leurs pays et régions,
tout en épargnant gracieusement ceux
travaillant en étroite « collaboration »
avec les élites de l'Occident. Cette
hypocrisie est devenue aujourd'hui
presque impossible à cacher, d'où la «
révolte » africaine. L'autre raison
avancée par les dirigeants de plusieurs
pays africains est que plusieurs grandes
puissances mondiales ne reconnaissent
pas la compétence de la CPI: États-Unis,
Chine, Inde, et plus récemment la
Russie, qui s'est aussi retiré en
intégralité de cette structure.
Un autre argument en faveur des
partisans de la sortie, c'est qu'aucun
leader de pays occidental ou affilié à
ceux-ci n'ait jamais été visé par une
quelconque poursuite à son encontre,
même en étant responsable de crimes
indéniables en différents endroits du
monde. Plusieurs experts et observateurs
reconnaissent aussi l'accusation qui est
portée en direction de la Cour pénale
internationale: celle d'être un
instrument de punition et de pression de
l'Occident politique.
Par
ailleurs, de plus en plus de voix
s'élèvent actuellement en Afrique pour
mettre en place une Cour pénale
panafricaine. Un défi de taille, mais
qui pourrait effectivement être la
solution à terme pour résoudre les
problèmes existants au niveau
continental. Enfin, il y a aussi les
partisans du renforcement des justices
nationales, parmi eux beaucoup d'experts
africains comme étrangers, notamment
Alexandre Mezyaev, un expert russe du
droit international qui connaît bien
l'Afrique. Leur argument: renforcer
l'état du droit des juridictions
concernées tout en privilégiant la
souveraineté nationale.
Quoi
qu'il en soit et à travers cette
initiative panafricaine au niveau de
l'UA, l'Afrique confirme qu'elle compte
faire partie intégrante du monde
multipolaire et des processus qui en
découlent. Les pressions extérieures
vont certainement se poursuivre,
peut-être même s'accentuer, mais c'est
effectivement aux États africains de
décider de leur avenir, dans un cadre
souverain. Si certains pays préfèrent
rester dans le giron occidental, il faut
leur reconnaître ce droit. Mais ceux qui
ont décidé de s'en affranchir et de
former les alliances qu'ils jugeront
nécessaires ont eux aussi ce droit que
personne ne peut leur nier. Et c'est
dans ce cadre qu'il faut voir la suite
des événements. Une suite logique:
beaucoup d'autres pays africains vont
vraisemblablement quitter la CPI,
d'autres vont y rester pour encore
quelque temps. Le futur montrera qui
avait raison.
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Publié
le 8 février 2017 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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