L'art de la guerre
Derrière ces photos d’enfants
Manlio Dinucci
© vk.com/tabir.azovec
Mardi 8 septembre 2015
Quand les enfants sont arrivés au camp
d’été, dans une zone boisée aux
alentours de Kiev, ils ont reçu un beau
T-shirt jaune sur lesquels étaient
imprimées deux silhouettes d’enfants
armés de fusil, avec l’emblème du
Bataillon Azov calqué sur celui des SS
Das Reich, et dans le fond le « Soleil
Noir » du mysticisme nazi. Les enfants
(y compris de 6 ans) et les adolescents
qui ont fréquenté le camp par groupes de
30-40 –rapporte le quotidien Kiev
Post- « n’ont pas joué aux soldats,
mais ont reçu un réel entraînement
militaire par des instructeurs du
Bataillon Azov ». C’est-à-dire par les
néonazis qui ont accompli des atrocités
contre les civils de nationalité russe
en Ukraine orientale.
Ce bataillon et d’autres néonazis font partie de
la Garde
nationale ukrainienne, liée par un
partenariat avec la Garde nationale de Californie
et entraînée par des instructeurs
étasuniens et britanniques pour conduire
l’ « opération anti-terrorisme » dans le
Donbass. Le camp d’été constitue le
premier stade du recrutement d’enfants
soldats, écrit Michel Chossudovsky dans
un article documenté accompagné de
photos [1] (v.
www.globalresearch.ca/ ). En plus de
tirer, on apprend aux enfants à haïr :
« nous tuerons tous les Russes », jure
l’un d’eux.
La photo d’un enfant ukrainien dont la vie est brûlée par le
« Soleil Noir » nazi n’est pas moins
terrible que celle de l’enfant syrien
dont la vie s’est éteinte dans la Méditerranée. Image,
cette dernière, qui selon la fable en
cours aurait touché le cœur des plus
grands représentants de ces
gouvernements responsables des guerres
et des consécutifs tremblements de terre
sociaux provoqués dans les dernières
décennies par la stratégie USA/Otan.
Guerres et embargos –de l’Irak à la Yougoslavie, de
l’Afghanistan à
la Palestine, de
la Libye à la SyrIe et à l’Ukraine- ont
provoqué la mort de millions d’enfants
(un demi million rien que ceux tués par
les dix ans d’embargo contre l’Irak).
Leurs photos n’ont par contre pas été
diffusées par les grands médias.
Et s’ajoutent aux petites victimes les enfants éduqués à haïr et tuer par
des mouvements, comme l’Isis et les
bataillons néonazis ukrainiens, à la
formation de qui ont contribué de façon
déterminante les USA et les puissances
européennes pour démonter de l’intérieur
des Etats entiers. On raconte que le
gouvernement britannique ait décidé
d’accueillir 15mille réfugiés syriens
parce qu’ému par la photo du petit
Syrien mort. En même temps, cependant,
ce même gouvernement a annoncé vouloir
obtenir le feu vert du parlement pour
une action militaire « contre le régime
mauvais d’Assad et l’Isis ». Et le
ministre (italien) des affaires
étrangères Gentiloni a annoncé que, face
au drame des réfugiés, va commencer la
seconde phase de la mission EuNavForMed
« contre les trafiquants d’êtres
humains », dont l’objectif final est en
réalité l’occupation militaire des zones
côtières libyennes stratégiquement et
économiquement les plus importantes.
L’exode des réfugiés vers l’Europe, provoqué par les guerres, se trouve
ainsi utilisé à des fins stratégiques :
par Washington pour mettre sous pression
les pays européens en renforçant
l’influence étasunienne en Europe,
utilisée comme première ligne contre la Russie et base de lancement
des opérations militaires USA/Otan au
Moyen-Orient et en Afrique du Nord ; par
les plus grandes capitales européennes
pour préparer l’opinion publique à
d’autres guerres vendues comme
« opérations humanitaires de paix ».
Sans la conscience politique des causes
réelles et des solutions possibles de
cet exode, on peut instrumentaliser même
le soutien humanitaire que de nombreux
citoyens européens apportent aux
réfugiés, et on peut utiliser également
les réfugiés eux-mêmes comme masse de
manœuvre à l’égard des pays de
provenance.
Et d’autres enfants mourront, presque tous sans photo.
Edition de mardi 8
septembre 2015 de il manifesto
http://ilmanifesto.info/dietro-quelle-foto-di-bambini/
Traduit de l’italien par Marie-Ange
Patrizio
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