Sans grande surprise, en fin de matinée
ce 9 décembre, alors que le Format
Normandie se tenait dans la soirée,
l'Agence mondiale antidopage a interdit
la Russie, ses athlètes et ses
représentants de participer pendant 4
ans non seulement aux différents JO,
mais également aux différents évènements
sportifs majeurs. Au-delà de la
violation patente de nombreux principes
juridiques, cette décision est une sorte
de déclaration de guerre. Mais cette
fois-ci la Russie se défend et n'est pas
prête à "s'excuser" d'être victime d'une
vendetta internationale, comme le
demande la vice-présidente de l'AMA,
totalement hystérique.
Dès que le rapport
du comité d'experts demandant la
suspension de la Russie des JO, avec
possibilité de participer en toute
neutralité pour les athlètes, était
tombé fin novembre, l'agence antidopage
américaine s'était plainte d'une trop
grande complaisance et demandait de
rayer la Russie de la surface du sport
mondial, faute de ne pouvoir la rayer
totalement de la face de la Terre (voir
notre texte ici).
La réunion s'est
tenue le 9 décembre à Lausanne, jour où
à Paris se réunissait le Format
Normandie, sans grande illusion par
ailleurs qu'il ne puisse déboucher sur
quoi que ce soit de concret, ce qui
n'était par ailleurs même pas envisagé
par les participants, lançant plutôt un
processus "mou". Il fallait donc
frapper, fort, violemment, le comité
exécutif de l'AMA s'en est chargé et a
repris à l'unanimité toutes les
recommandations du comité d'experts dans
sa déclaration finale (disponible
ici).
Autrement dit, la
Russie perd encore une fois son drapeau
et son hymne, les athlètes doivent
n'avoir jamais été concernés par une
affaire de dopage, ni n'avoir été
mentionnés dans le fameux rapport
McLaren, qui a été de nombreuses fois
démenti par la justice sportive. Les
officiels russes et les membres du
comité olympique russe ne pourront
participer à aucun évènement "majeur".
La Russie peut faire appel devant le
Tribunal arbitral du sport - dont le
délai d'examen des affaires n'est pas
rapide.
Bref, le comité
olympique russe n'est pas dissous, mais
la Russie ne peut pas participer comme
Etat, première surprise juridique.
Ensuite, les athlètes, comme la dernière
fois, sont responsables collectivement
et non pas individuellement, en
violation du principe de l'individualité
de la responsabilité. Ne parlons même
pas de la violation du principe
d'égalité, puisque le TAS n'avait pas
reconnu le dopage d'Etat, comment se
fait-il que les athlètes russes soient
soumis à une présomption de culpabilité
et doivent démontrer leur innocence,
alors que les autres athlètes impliqués
dans des affaires de dopage ne sont pas
concernés par cette exigence? Je ne
parle pas non plus de la violation du
principe selon lequel personne ne peut
être condamné deux fois pour la même
faute, ces athlètes ont déjà été
sanctionnés aux derniers JO, ils
encourent une deuxième peine pour les
mêmes faits. Et petite cerise sur le
gâteau surprise de l'AMA, cette étrange
formulation concernant les évènements
"majeurs", auxquels la Russie ne pourra
par participer, mais dont la liste n'est
pas établie, en violation du principe de
sécurité juridique.
Le ministre du
sport, Pavel Kolobkov a très bien réagi
devant les journalistes, refusant de
tomber dans les plates excuses,
précisant que de nombreux points de
cette décision nécessitaient des
explications, que RUSADA avait été
réformé selon les exigences de l'AMA,
qui d'ailleurs l'avait restaurée. La
sanction portée contre la Russie, même
s'il y a eu des problèmes de dopage, que
certains existent encore comme partout,
est totalement disproportionnée et
devient en cela politique. L'on peut
aussi s'interroger, et la question va
devoir être soulevée, sur le contrôle
des sportifs d'autres pays, notamment
Américains, ansi que sur la manière dont
l'AMA fonctionne. Pour les russophones :
De son côté, le
Président russe, lors de la
conférence de presse faisant suite au
Format Normandie, a également mis
clairement les points sur les i en
déclarant qu'il fallait faire appel de
cette décision devant le Tribunal
arbitral du sport, car cette sanction
est politique et n'a rien à voir avec la
lutte contre le dopage. Les atlhlètes
sont illégalement soumis à une
responsabilité collective et le comité
olympique russe n'étant pas suspendu,
comment la Russie, comme Etat, peut-elle
ne pas participer aux JO ?
En effet, la
décision est politique et il suffisait,
au-delà des incohérences juridiques
soulevées, d'écouter la réaction de la
vice-présidente du comité exécutif
de l'AMA, Linda Helleland, à la sortie
de la session, extrêmement déçue et
passablement hystérique : que des
athlètes russes participent aux
compétitions, même en tant que sportifs
neutres, sans signes distinctifs, est
pour elle inadmissible. La rage qui se
dégageait de son visage était telle,
qu'elle en avait même du mal à retenir
ses larmes : il y aura des Russes et ça
va salir le sport. Bref, je cite, la
Russie doit s'excuser. Le
fanatisme de cette personne,
vice-présidente de l'AMA, laisse songeur
quant au respect par cette institution
du minimum requis d'objectivité. La
position soutenue par le dirigeant de
l'USADA est en substance la même -
et pour cause ... :
« Permettre à la
Russie d'échapper à une mise au ban
totale est un nouveau coup dévastateur
porté aux sportifs propres, à
l'intégrité du sport et à la force des
règlements »
On en est là. Ils
n'ont pas eu leur vengeance et sont
extrêmement déçus.
Expliquons quand
même un détail, plus que central, celui
qui est à l'origine de ce déferlement de
haine. Et qui le rend tout à fait clair.
La Russie devait, dernier point exigé
après qu'elle ait rempli toutes les
autres conditions, transmettre la
base de données de RUSADA des athlètes
et de leur contrôle. Après avoir réglé
quelques difficultés techniques, elle
l'a fait. Et le scandale est alors
arrivé. Dans la version officielle,
cette base de données ne correspond pas
... en fait à celle que Rodchenkov
(anciennement à la tête de RUSADA) a
présentée en paiement de son arrivée aux
USA. Rappelons que Rodchenkov était
justement poursuivi en Russie pour les
manipulations qu'il opérait à ce sujet,
les cocktails-maisons qu'il vendait aux
athlètes pour qu'ils passent les tests,
etc. Et c'est le témoin-clé de
l'accusation. Maintenant l'on comprend
pourquoi les Etats-Unis et leurs
organes, dont l'AMA fait manifestement
partie, sont en rage. Malgré toutes les
pressions exercées sur le comité
exécutif de l'AMA, au minimum par des
déclarations demandant la disparition de
la Russie et des Russes, ils n'ont pu
obtenir entièrement gain de cause.
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