Palestine
Les réfugiés de la "bordure de Gaza"
Fadwa Nassar
Lundi 1er décembre 2014
Critiquant la classe politique sioniste,
de gauche et de droite, mais surtout de
gauche, un auteur sioniste (Yehouda
Shehnav) écrit, à propos de la guerre
menée contre la bande de Gaza en
2008-2009 et l’attitude du public
colonial : « il nous faut examiner le
discours relatif au lancement des fusées
sur le sud d’Israël. Selon l’allégation
centrale de ce discours, le sud d’Israël
auait vécu pendant 8 ans sous les
bombardements continus et Israël aurait
gardé son sang-froid pendant la même
période avant de déclencher la guerre.
Cependant, le conflit n’a pas commencé
il y a huit ans, ni avec « la bordure de
Gaza », ses racines remontent à la
période précédant 1948 ».
Avant que n’existe la « bordure de
Gaza » où ont été plantées des colonies
sionistes, existaient les villes et
villages palestiniens, détruits ou
effacés, qui appartenaient à la province
de Gaza, dont la superficie était plus
du double de la « bande de Gaza »
actuelle. A la place des colonies
Kisufim, Netivot, Kiriat Gat, Ra’im,
Ashdod, Ashkelon, Sderot, le conseil
régional d’Ashkol qui regroupe 31
colonies de peuplement, encerclant la
bande de Gaza, du nord au sud en passant
par l’Est, il y avait Asdud, Najd,
Simsim, Hiribya, Ni’ilya, Masmiya al-Kabira,
Masmiya as-saghira, al-Majdal, Kawkaba,
Qastina, Al-Falouja, Breir, Barqa,
Barbara, Bayt Daras, Bayt Tima, Bi’lin,
Tall al-Turmus, et bien d’autres (voir
la carte de la province de Gaza sur le
site
http://www.palestineremembered.com/Gaza/index.htm).
Lors de la dernière guerre sioniste
contre la bande de Gaza et la résistance
palestinienne, les médias à la solde des
sionistes et les autres alignés sur les
positions de l’ONU et de ses organismes,
ont présenté le ciblage des colonies de
la bordure de Gaza comme étant un acte
d’agression contre un Etat
« souverain », masquant le fait que la
présence de ces colonies n’est en
réalité que le début de l’agression
sioniste contre le peuple et la terre de
Palestine. Que ces colonies aient vécu
quelques années de stabilité, que ses
occupants aient cru un instant qu’ils
avaient des droits sur cette terre et
que leur occupation était devenue
légale, à cause du temps qui s’est
écoulé depuis 1948 ou à cause de la
complicité internationale et de l’ONU
avec leurs crimes, cela ne change rien
au fait que, pour le peuple palestinien
et tous les peuples épris de justice et
de liberté, cette terre sur laquelle ils
ont construit leurs colonies et à partir
desquelles ils agressent le reste de la
Palestine, appartient au peuple
palestinien, et que les terrains qu’ils
considèrent leur appartenant sont en
réalité la propriété de centaines de
milliers de réfugiés, qui vivent
précisément dans les camps de réfugiés
dans la bande de Gaza, et ailleurs.
Ces camps abritent les propriétaires des
terrains que les sionistes ont colonisés
depuis 1948 et des maisons que les
sionistes se sont appropriées avec les
meubles et tous les effets personnels
que les réfugiés n’ont pu emporter.
Comme dans les autres pays arabes, et
notamment au Liban, les réfugiés restent
la cible privilégiée de la barbarie
sioniste, car tout d’abord, le fait
qu’ils soient réfugiés rappelle au monde
entier que la question de la Palestine
n’est pas réglée et ne peut l’être que
lorsqu’ils reviendront à leurs terres,
leurs propriétés et à leur terre de
Palestine. Et ensuite, parce que les
sionistes considèrent qu’en ciblant les
réfugiés et détruisant leurs camps, ils
pourraient liquider leurs droits, dont
le droit au retour. Et surtout, parce
que les réfugiés furent et continuent à
être à la pointe de la lutte de
libération de la Palestine. Le camp de
réfugiés de She’fat, qui abrite des
réfugiés palestiniens originaires de la
Palestine volée en 1948, reste, malgré
tous les crimes de l’occupation, un
ferment révolutionnaire au cœur même de
la zone d’al-Quds visée par la
judaïsation et le nettoyage
ethnico-religieux.
La « bordure de Gaza » aujourd’hui
colonisée fait partie, en réalité, de la
province historique de Gaza. Avant la
Nakba en 1948, la ville d’Asdud comptait
environ 8000 habitants, Breir 3178
habitants, Barbara 2796 habitants, Beit
Daras 3190 habitants, al-Joura 2807
habitants, Hamama 5812 habitants, Iraq
al-Manshiyé 2332 habitants, al-Falouja
5417 habitants, al-Majdal-‘Askalan 11496
habitants, tous Palestiniens, tous
expulsés sinon massacrés. Nombreux
furent exécutés à bout portant en tant
qu’ « infiltrés », entre 1948 et 1952,
lorsque ces réfugiés revenaient
clandestinement à leurs maisons ou leurs
terrains, afin d’en prendre des objets
délaissés ou de cueillir les fruits de
leurs arbres plantés dans leurs champs,
qu’ils durent abandonner par la force
des armes.
Nombreux sont les récits des réfugiés
qui reconstruisent leur vie passée dans
leurs villages et villes d’où ils furent
expulsés par les bandes criminelles
sionistes qui formèrent, après la Nakba,
l’armée de l’occupation. La ville d’Asdud
s’étendait, par exemple, sur 47.871
dunums, et le nombre de ses maisons
s’élevait à 1303 maisons en 1948. Les
habitants de cette petite ville furent
expulsés le 28 octobre 1948 par la force
des armes et de la terreur. La ville
comprenait deux écoles, au moins deux
mosquées et un lieu saint consacré à
Selman al-Farissi, compagnon du
Prophète. Ses rues la traversaient de
part et d’autre, et la seule route
asphaltée reliait la ville de Yafa à
Gaza, en passant par Asdud. Les
villageois des environs participaient au
marché hebdomadaire du mercredi qui se
tenait sur la place centrale, en face de
la grande mosquée. Les habitants d’Asdud
vivaient en majorité de l’agriculture,
pour laquelle ils avaient réservé 74%
des terres rattachées à la ville et les
métiers non dépendants de l’agriculture
étaient rares à l’époque. La ville était
administrée par un conseil rassemblant
les représentants des principales
familles de la ville.
La ville d’Asdud fut occupée le 10
octobre 1948 et ses habitants qui
avaient résisté aux massacres et tueries
exécutés par les bandes sionistes,
furent expulsés. Mais ses habitants et
leurs descendants qui vivent dans les
divers camps de réfugiés n’ont ni
oublié, ni pardonné : ils comptent
revenir au pays et se réapproprier leurs
biens. La ville coloniale d’Ashdud
n’existe pas, c’est Asdud, ville arabe
palestinienne, qui compte.
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