Opinion
La géopolitique selon « Arab Idol »
Ahmed Bensaada
Photo:
D.R.
Samedi 13 décembre 2014
Le rôle proactif qu’ont joué
certaines chaines de télévision
satellitaires arabes dans les évènements
qui ont secoué les pays arabes ˗
improprement baptisés « printemps »
arabe ˗ a été longuement discuté par de
nombreux observateurs. Il est
actuellement de notoriété publique que
des chaînes comme la Qatarie Al Jazira
ou la Saoudienne Al Arabiya ne sont que
de puissants instruments médiatiques au
service d’agendas politiques concoctés
par les pays qui les ont créées,
financées et idéologiquement orientées
et ce, bien avant les révoltes
« printanières » [1]. Comme le reconnait
si bien un analyste saoudien : « Les
deux chaînes se préoccupent davantage de
véhiculer les points de vue de leurs
bailleurs de fonds que d'informer d'une
manière professionnelle et objective »
[2]. Cet alignement contraire à
l’éthique journalistique a été non
seulement flagrant dans la couverture du
printemps arabe, mais aussi dans
d’autres dossiers comme celui du
massacre de Gaza [3] ou de l’éviction de
Mohamed Morsi, le président égyptien
issu des Frères musulmans [4].
Concernant la Syrie, Sultan Al
Qassemi affirme que « dans leur
tentative de soutenir la cause des
rebelles syriens, ces géants des médias
ont abaissé leurs normes
journalistiques, abandonné les contrôles
rudimentaires des faits et se sont
appuyés sur des appels anonymes et des
vidéos non vérifiées […] » [5].
La partialité
politiquement téléguidée de ces médias
qui, auparavant, jouissaient d’une
crédibilité sans précédent dans le monde
arabe [6] a effrité leur crédibilité [7]
et provoqué l’effondrement de l’audience
de la chaîne qatarie [8].
En réalité, le « printemps » arabe et
ses dramatiques conséquences n’ont été
que les révélateurs des agendas
politiques établis depuis la création de
ces médias.
Al
Jazira et Wadah Khanfar
Al Jazira a été fondée en 1996 par
l’émir du Qatar, cheikh Hamad bin
Khalifa Al Thani qui avait pris le
pouvoir une année plus tôt en renversant
nul autre que son père. Dotée d’une
allocation de 150 millions de dollars à
sa création, les dépenses du groupe ont
été estimées à 650 millions de dollars
en 2010 [9].
Al Jazira a été dirigée par le
Palestinien Wadah Khanfar pendant huit
ans (de 2003 à 2011). Et le passage de
ce directeur général de tendance
notoirement islamiste [10] à la tête de
ce média majeur dans le monde arabe
n’est pas passé inaperçu. Khanfar
est apparu dans le classement
Forbes
2009 au 54e
rang des personnalités les plus
puissantes du monde et, en 2011, a été
porté aux nues par le magazine américain
Fast Company
qui l’a classé parmi les cent managers
les plus créatifs en affaires [11].
Et ce n’est pas tout. À peine sept
mois après avoir été poussé à la
démission d’Al Jazira, Khanfar a rejoint
l’International Crisis Group (ICG) [12],
un think tank américain basé à
Washington dans lequel sont impliqués de
nombreux politiciens occidentaux de
premier plan, en particulier américains
ou provenant des pays membres de l’OTAN.
En 2013, l’ICG a disposé d’un budget
dépassant les 18 millions de dollars et
dont environ la moitié provenait de
subventions octroyées par des
gouvernements exclusivement occidentaux
[13]. Wadah Khanfar siège à l’ICG en
compagnie de George Soros, président de
l’Open Society Institute (OSI) ou de
Nahum Barnea, chroniqueur en chef du
journal israélien Yedioth Ahronoth [14].
Rappelons que Soros est un milliardaire
américain, illustre spéculateur
financier, qui a été fortement impliqué,
via ses fondations, dans les révolutions
colorées et dans la formation des
activistes arabes qui ont orchestré le
fameux « printemps » arabe [15]. Parmi
les personnalités américaines les plus
influentes du Conseil d’administration
de l’ICG figure le nom de Morton Isaac
Abramowitz, ancien Secrétaire d'État
adjoint chargé du renseignement et de la
recherche dans l’administration Reagan.
Il est aussi intéressant de mentionner
qu’Abramowitz a été un membre influent
du Conseil d’administration de la
National Endowment for Democracy (NED)
et ce, pendant neuf ans. En 2007, la NED
l’a honoré en lui décernant la « Democracy
Service Medal », en reconnaissance de « sa
contribution exceptionnelle à
l'avancement des droits de l'homme et de
la démocratie dans le monde » [16].
Est-il nécessaire de mentionner que la
NED est le principal organisme américain
d’ « exportation » de la démocratie?
Tout comme l’OSI, elle a été impliquée
dans les révolutions colorées, le
« printemps » arabe [17], mais aussi
dans l’Euromaïdan [18] et la récente
« révolution des parapluies » à Hong
Kong [19].
Parmi les principaux conseillers de
l’ICG, on peut citer Zbigniew Brzezinski,
ancien conseiller présidentiel à la
sécurité nationale des États-Unis,
Shimon Peres, ancien président et
premier ministre d’Israël ou Shlomo
BenAmi, ancien ministre des Affaires
étrangère d’Israël [20].
Avec
tout ce beau monde, il n’est pas
difficile de savoir quels intérêts sert
cette organisation qui se dit «
engagée à prévenir et résoudre les
conflits meurtriers
» [21].
Toutes ces marques de déférence dont
semble jouir Wadah Khanfar de la part
d’organismes américains a peut-être une
explication très simple si on en croit
certains câbles Wikileaks signés par
l'ambassadeur américain à Qatar de
l’époque, Chase Untermeyer. En effet,
selon ces documents, Khanfar aurait été
en « contact permanent » avec l’U.S.
Defense Intelligence Agency (Agence
américaine du renseignement de la
défense) et qu’il aurait procédé à la
modification de la couverture de
certaines nouvelles en réponse à la
pression américaine [22]. Selon le New
York Times, il aurait aussi exhorté les
responsables américains à garder le
secret sur leur collaboration [23].
Wadah Khanfar a été remplacé par le
cheikh Ahmed Ben Jassem Al Thani, un
membre de la famille régnante qatarie. En
2013, ce dernier a été nommé
ministre de l’économie et du commerce
[24].
Al Arabiya, « Voice
of America »
Le résumé du câble Wikileaks
09RIYADH651, rédigé en 2009 par
l’ambassade américaine en Arabie
Saoudite, clarifie les questions de la
propriété et de l’orientation
idéologique des médias saoudiens [25].
On peut y lire : « Le système de
réglementation Saoudien offre au régime
des Al Saoud un moyen de manipuler les
médias imprimés de la nation pour
promouvoir son propre agenda sans
exercer la surveillance au jour le jour
sur les journalistes et les journalistes
saoudiens sont libres d'écrire ce qu'ils
veulent à condition qu’ils ne critiquent
pas la famille régnante ou exposent la
corruption du gouvernement. En outre, la
plupart des médias en Arabie Saoudite -
imprimés et électroniques -
appartiennent à des membres de la
famille royale, et en conséquence
l'autocensure est à l'ordre du jour
».
Et Al Arabiya ne fait pas exception.
Lancée en 2003, en pleine guerre
d’Irak, elle avait pour but de
concurrencer et, surtout, de contrer Al
Jazira qui, dans les années 90,
n’hésitait pas à critiquer la famille
royale saoudienne [26]. Elle a été créée
avec un montant initial de 300 millions
de dollars et, selon certains experts,
son budget de fonctionnement
avoisinerait les centaines de millions
de dollars [27].
El Arabiya appartient majoritairement
au groupe MBC (Middle East Broadcasting
Centre), cofondé et présidé par un
certain Walid Al Ibrahim.
Walid Al Ibrahim est le frère d’Al
Jawhara Al Ibrahim, une des nombreuses
épouses mais néanmoins favorite de feu
le roi Fahd. Al Jawhara avait quitté son
premier époux pour s’unir au plus haut
représentant des Al Saoud. Selon
certains observateurs, c’est à partir de
cette union que la famille des Al
Ibrahim est « sorti de l’obscurité »,
offrant aux frères d’Al Jawhara
l’opportunité de devenir d’influents
businessmen non sans leur attirer les
critiques et les commérages des cercles
royaux [28]. En plus d’Al Jawhara, Walid
a deux autres sœurs et dix demi-sœurs
dont plusieurs ont épousé des Al Saoud.
Ses deux sœurs, Maha et Mohdi sont
respectivement mariées au prince
Abderrahmane Al Saoud (Ex vice-ministre
saoudien de la défense et de l’aviation)
et Khaled Al Angari (Ministre saoudien
de l’enseignement supérieur) [29].
Walid est aussi l’oncle maternel du
prince Abdul Aziz, unique enfant de sa
sœur Al Jawahra et le plus jeune fils
(et le préféré) du roi Fahd [30]. Dès
son jeune âge (dans une monarchie
gérontocrate), Abdul Aziz a occupé des
postes importants dans le gouvernement
saoudien. Tout d’abord ministre d’État
sans portefeuille, il a été ensuite
nommé chef du bureau du Conseil des
ministres alors qu'il n'avait que 27 ans
[31]. Limogé en avril 2014 [32], le
prince mène actuellement une vie de
playboy milliardaire, mais aussi d’homme
d’affaires avisé. Pour l’anecdote, c’est
son convoi qui a été spectaculairement
cambriolé sur une autoroute parisienne
en août 2014 [33].
De son vivant, le roi Fahd
considérait MBC comme son projet
personnel. D’ailleurs une blague
circulait dans ce temps prétendant que
le roi racontait que l’acronyme MBC
voulait dire « My Broadcasting Company »
et qu’il appelait la station pour
demander la diffusion de telle ou telle
émission selon son humeur [34]. En
effet, alors que le soutien financier du
roi Fahd à MBC dans ses premières années
restera une question de conjecture,
l'ampleur du soutien logistique royal
était de notoriété publique [35]. Et,
maintenant, c’est le fils qui en retire
les dividendes : selon le câble
Wikileaks 09RIYADH651 cité précédemment,
le prince Abdul Aziz recevrait « 50%
de tous les profits de l’empire MBC
».
Al Arabiya, la chaîne de nouvelles du
groupe MBC, a été dirigée par un
journaliste saoudien, Abdul Rahman Al
Rached, de 2004 à 2014. Contrairement à
Wadah Khanfar, il est connu pour son
opposition à l’islam politique et aux
Frères musulmans, ce qui lui a attiré
les foudres des islamistes et, par la
même occasion, explique le rôle qu’a
joué cette chaîne en Égypte [36].
Selon le politologue Mohamed El Oifi,
« Al-Arabiya se retrouve prisonnière
de l’image d’une chaîne qui "reflète le
point de vue américain ", voire
israélien, si bien que ses détracteurs
l’appellent Al-Ibriya (la juive) »
[37].
Abdul Rahman Al Rached a dû lui-même
monter au créneau (sans trop convaincre)
pour démentir de telles allégations lors
du massacre de Gaza de 2009 [38]. À
propos de la même tragédie,
l’universitaire saoudien Mohsen Al Awaji
a déclaré dans une entrevue à la chaîne
elle-même qu’« Al Arabiya […] a pris
le parti de l’ennemi sioniste » et
que « certaines chaînes sionistes
étaient plus justes dans le traitement
des évènements de Gaza qu’Al Arabiya
» [39].
Cette proximité entre la ligne
éditoriale d’Al Arabiya et les intérêts
américains a été manifeste dès la
création de la chaîne. En effet, en mai
2004, le président Bush avait choisi Al
Arabiya et non Al Jazira pour donner son
interview sur l’affaire de la prison
d’Abou Ghraib. C’est ce qui a fait dire
à certains que Washington avait
clairement établi qui était de son bord
et qui ne l’était pas [40]. Et en guise
de confirmation, Al Arabiya a aussi
réalisé, en février 2009, la première
interview accordée par le président
Obama à une télévision arabe [41].
Al Arabiya a été accusée de prôner la
« normalisation » avec l’État hébreu.
Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah
« a publiquement dénoncé ce qu’il
considère comme de la propagande d’Al-Arabiya
en faveur d’Israël dans le monde arabe
» [42].
Le 26 juillet 2014, en pleine
agression israélienne contre Gaza, Al
Arabiya a publié sur son site un texte
signé par l’éditorialiste saoudien
Mohammed Al Sheikh intitulé « La paix
avec Israël est la solution » [43].
Cette déclaration longuement dissertée
fit réagir le commentateur israélien
Yaron Friedman qui qualifia l’article de
surprenant. « Pourquoi cet article
est-il publié en Arabie Saoudite et
pourquoi maintenant ? »,
demande-t-il. « La famille du
rédacteur est extrêmement influente en
Arabie Saoudite et ses origines
remontent à la famille Wahhabite
fondatrice du royaume. Les membres de sa
famille, qui est originaire du désert du
Najd et de la Capitale de Riyad,
comprend des dignitaires religieux
éminents, des imams, des muftis et des
Ministres de l’Éducation et de la
Justice » [44].
Il conclut son analyse en déclarant :
« Aujourd’hui, l’Arabie Saoudite et
Israël ont en commun plus d’intérêts que
jamais, y compris dans la lutte pour
stopper le programme nucléaire iranien,
la guerre contre le mouvement des Frères
Musulmans et ses filiales (le Hamas), le
soutien au régime Al-Sissi en Égypte, le
maintien de la stabilité du royaume de
Jordanie, le face-à-face contre le
régime de Bachar Al Assad en Syrie et
contre le Hezbollah au Liban, la guerre
contre Al Qaïda et, plus précisément,
l’État Islamique en Irak et en Syrie,
actuellement, et la liste est loin
d’être close… ».
« L’intérêt de l’Arabie Saoudite
serait, tout simplement, de mettre un
terme au “petit conflit” entre Israël et
les Palestiniens, de façon à ce
qu’Israël soit de son côté dans
le "grand conflit" contre les Chiites et
la menace terroriste sunnite
grandissante ».
Arab Idol
ou le divertissement politisé
Il ne fait donc plus aucun doute que
les deux chaînes d’information les plus
célèbres du monde arabe ont des lignes
éditoriales qui reflètent fidèlement les
visions politiques des gouvernements des
pays qui les ont fondées et qui les
financent.
Dans le cas du réseau MBC, ces
agendas ne sont pas uniquement véhiculés
via la chaîne de nouvelles Al Arabiya.
Une émission de divertissement très
prisée par le public panarabe comme « Arab
Idol » est aussi utilisée à cette fin.
Diffusée par la chaîne MBC1, elle en est
à sa troisième édition. Basé sur le
concept du show télévisé britannique
« Pop Idol », le principe de cette
émission est très simple. Des jeunes
candidats sont sélectionnés à travers le
monde arabe pour leurs talents de
chanteurs. Chaque semaine, chacun
d’entre eux, représentant son propre
pays, interprète des chansons devant un
public. Le show est diffusé et les
téléspectateurs sont invités à voter par
SMS pour le candidat de leur choix et le
(ou les) candidat(s) qui a obtenu le
moins de voix est éliminé. Pour donner
une idée de la popularité de cette
émission, la finale de la seconde
édition (2013) d’Arab Idol a été
regardée par pas moins de 100 millions
de téléspectateurs [45].
La troisième édition, qui doit
s’achever en décembre 2014, a montré de
manière claire ce mélange des genres
entre le divertissement et la politique.
Tout d’abord, une carte mentionnant
les pays arabes de provenance des
candidats a été présentée durant une des
premières émissions. Le problème est que
cette carte mentionnait « Israël » au
lieu de « Palestine » pour identifier
l’origine de deux candidats d’origine
palestinienne : Manal Mousa et Haitham
Khalaily. Après le tollé populaire
soulevé par cette bourde, le groupe MBC
se justifia en déclarant qu’il ne
s’agissait que d’une erreur technique
[46].
Mais l’histoire n’est pas aussi
simple que cela car les candidats
d’origine palestinienne sont en fait des
Arabes israéliens et donc détenteurs de
passeports de l’État hébreu. D’ailleurs
les médias israéliens s’en étaient donné
à cœur joie. À titre d’exemple, Haaretz
avait titré « Le prochain Arab Idol
pourrait être Israélien » [47], la
chaîne I24News avait annoncé « Deux
Israéliens accomplissent le rêve "Arab
Idol" au Liban » [48], alors que le
Times of Israël déclarait « Des
Israéliens chantent à Arab Idol, pour la
Palestine » [49]. L’affaire a
atteint des proportions telles que le
porte-parole de l’armée israélienne en
personne, Avichay Adraee, a émis ses
vœux de succès aux deux candidats [50].
De nombreux internautes et citoyens
arabes ont, une fois de plus, accusé MBC
de vouloir « normaliser » les relations
avec Israël, et que le changement de
noms était prémédité, ce que le groupe a
nié par la voix de son porte-parole
officiel, Mazen Hayek [51].
Une autre décision prise par la
chaîne en ce qui concerne l’association
des candidats avec leurs pays d’origine
montre une claire orientation politique.
Un des candidats, Ammar Al Koufi, est
Irakien, d’origine kurde. Au lieu de
mentionner son pays officiel,
c’est-à-dire l’Irak, il est associé au
« Kurdistan irakien » comme s’il
s’agissait d’un vrai pays. C’est comme
si au lieu d’écrire « Algérie » pour un
concurrent algérien, on utiliserait une
dénomination ethnico-régionale comme
« Kabyle », « Chaoui » ou « Mozabite ».
Et de tels exemples sont nombreux dans
les pays arabes.
Cette différenciation territoriale
entre l’Irak et le Kurdistan irakien par
MBC n’est certainement pas fortuite.
Elle correspond à la doctrine du « Grand
Moyen-Orient » qui préconise le
remodelage des frontières d’une région
géographique regroupant les pays arabes
et certains pays avoisinants, mettant
ainsi fin à celles héritées des accords
Sykes-Picot.
Bien que lancé sous la houlette du
président G.W. Bush et de ses faucons
néoconservateurs [52], ce projet
s’inspire d’une idée théorisée en 1982
par Oded Yinon, un haut fonctionnaire du
ministère des Affaires étrangères
israélien. Le « Plan Yinon », comme on
le nomme, avait pour objectif de « défaire
tous les États arabes existants et de
réorganiser l’ensemble de la région en
petites entités fragiles, plus
malléables et incapables d’affronter les
Israéliens » [53].
À titre d’exemple, ce plan
recommandait la division de l’Irak en
trois états distincts : sunnite, kurde
et chiite [54].
En 2006, Ralph Peters,
lieutenant-colonel de l’armée
américaine, publia un article sur le
« Grand Moyen-Orient » dans lequel il
avança que les nouvelles frontières des
pays le composant devraient refléter les
« affinités ethniques » et le
« communautarisme religieux »
[55]. Sur cette base, il proposa une
carte qui présente de nombreuses
similitudes avec celle de Yinon [56].
De son côté, Jeffrey Goldberg a
proposé en 2008 une autre carte de
découpage du Grand Moyen-Orient dans
laquelle il prévoyait la division de la
Syrie et de l’Irak, mais aussi celle du
Soudan en deux états, baptisant la
nouvelle entité « Nouveau Soudan » [57].
Rappelons que le Soudan du Sud s’est
séparé du Soudan en 2011, soit trois
années après la parution de la carte de
Goldberg.
Suggérée par Robin Wright, la carte
la plus récente du « dépeçage » du Grand
Moyen-Orient date de septembre 2013
[58]. En plus des partages de la Syrie
et de l’Irak, il y propose la division
de la Libye en trois entités : la
Tripolitaine, La Cyrénaïque et le
Fezzan. Cette carte prévoit aussi la
séparation du Yémen en deux parties
(Nord et Sud), situation qui prévalait
avant 1990, année de la réunification du
pays.
L'Arabie saoudite serait-elle en
train de jouer une partition composée
par Israël et interprétée par les jeunes
candidats arabes? Œuvrerait-elle pour un
démembrement de l’Irak majoritairement
chiite afin de l’affaiblir et, comme
l’insinue Yaron Friedman [59], empêcher
l’axe chiite (Iran, Irak, Hezbollah,
Houtis du Yémen) de dominer la scène
géopolitique du Moyen-Orient au
détriment des sunnites ?
Ainsi, bien que les médias qataris et
saoudiens aient su attirer un très grand
nombre de téléspectateurs arabes grâce à
leur maîtrise des techniques
télévisuelles modernes, il n’en reste
pas moins qu’ils sont de puissants
instruments efficacement utilisés dans
le déploiement de l’action politique de
leurs pays respectifs. Alors que leur
rôle partial et dénué d’éthique
professionnelle a été révélé dans leurs
couvertures du « printemps » arabe ou
dans leurs traitements de la cause
palestinienne par leurs chaînes
d’information continue, il s’avère que
le groupe MBC utilise aussi ses chaînes
de divertissement dans le but de
véhiculer les visées politiques de la
monarchie saoudienne.
Entre vocalises, glissandos et « mawwals »,
les futures stars arabes
soupçonnent-elles qu'elles font partie,
malgré elles, d'une stratégie politique
élaborée à leur insu?
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Cette carte peut être consultée à
l’adresse suivante :
http://afj.wpengine.com/wp-content/uploads/2013/10/peters-map-after.jpg
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Jeffrey Goldberg, « After Iraq »,
The Atlantic, 1er janvier 2008,
http://www.theatlantic.com/magazine/archive/2008/01/after-iraq/306577/?single_page=true
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Robin Wright, « Imagining a Remapped
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28 septembre 2013,http://www.nytimes.com/2013/09/29/opinion/sunday/imagining-a-remapped-middle-east.html?pagewanted=all
- Voir réf. 44
Cet
article a été publié par le
quotidien algérien
Reporters
et sur :
http://www.ahmedbensaada.com/...
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