Site d'information sur la Palestine, le Moyen-Orient et l'Amérique latine

 

Palestine - Solidarité

 

Retour :  Accueil  -  Sommaire Yossi Alpher  -  Originaux  -  Analyses  -  Ressources  -  Mises à jour


Les amis belges de Shalom Arshav

Ni carotte, ni bâton économique
Yossi Alpher


Yossi Alpher

Bitterlemons 42 - 24 novembre 2008

Le leader du Likoud (droite) Binyamin Netanyahu, en tête des sondages pour les prochaines élections israéliennes, propose un « plan de paix économique. » Mais, depuis 40 ans, les carottes comme les bâtons économiques se sont révélés remarquablement inaptes à faire progresser tout processus de paix. Aussi ce plan servira-t-il surtout de prétexte pour s’accrocher à la Cisjordanie. NdT

Certaines des critiques du leader du Likoud Binyamin Netanyahu relatives au processus de paix font mouche. Annapolis était en effet mort-né et dépourvu de toute chance de succès. Après une année de négociations, les problèmes les plus épineux quant à un accord final restent en panne. Le Hamas constitue un obstacle majeur à tout progrès. Et, d’un point de vue stratégique, la menace iranienne urge davantage que le processus israélo-palestinien.

Vu la position de Netanyahu en tête des sondages, ces analyses ne peuvent être négligées.

Mais sa recette pour doper le processus, ce qu’il nomme la « paix économique », tend à peine vers la solution tant recherchée. Sa prémisse essentielle repose sur l’idée que des « Palestiniens au ventre plein » seront plus modérés sur les plans politique et idéologique. Elle méconnait 41 ans de tentatives israéliennes et internationales d’influencer la politique palestinienne par une combinaison de carottes et de bâtons économiques. Ce conflit n’est pas économique. Il est surtout politique et, jusqu’à un certain point, religieux.

Dès 1967, le ministre de la Défense Moshe Dayan crut que des frontières ouvertes, des emplois palestiniens en Israël et des aides et investissements israéliens en Cisjordanie et à Gaza neutraliseraient toute aspiration palestinienne à des droits politiques. Sous Shimon Peres, au milieu des années 1970 et, par la suite, sous le Likoud, l’approche « frontières ouvertes » fut étendue, pour inclure les implantations israéliennes dans les territoires occupés. Tout cela nous explosa au visage avec la première Intifada, fin 1987.

Depuis lors, les Travaillistes comme le Likoud ont alternativement puni et récompensé économiquement les Palestiniens, dans le vain espoir de modérer leur hostilité à notre encontre. Les gouvernements Likoud, en ce compris celui de Netanyahu, ont eux-mêmes promu d’une certaine manière la « paix économique », voici dix ans. Sans résultat positif. Des politiciens israéliens de gauche comme du centre - notamment, à nouveau Peres - ont prétendu, de manière répétée et sans aucun fondement, qu’un cadre économique régional constituerait un substitut praticable, ou au moins un précurseur, à un arrangement politique bilatéral israélo-palestinien.

La situation actuelle offre le parfait exemple de l’illusoire vanité de l’approche économique pour traiter le conflit palestinien. A chaque tir de roquette Qassam depuis Gaza, nous bouclons les passages frontaliers commerciaux, privant de la sorte 1,5 millions de Palestiniens d’approvisionnement en produits de base. Nous recevons même un soutien international et Egyptien pour agir de la sorte et, jusqu’à un certain point, celui de l’OLP.

A la rigueur, on pourrait justifier ces punitions collectives, violations flagrantes du droit humanitaire international, si au moins elles montraient quelque résultat positif. Mais l’usage, sur une durée étendue, de bâtons économiques contre Gaza n’a jamais affaibli le soutien des Gaziotes à leur gouvernement Hamas, ni généré à Gaza aucun mouvement vers la paix. Ces bouclages constituent pour Israël une option par défaut puisque, paraît-il, il est vain soit de parler au Hamas, soit de réoccuper la Bande et de le détruire. Mais ce n’est pas une stratégie productive.

En parallèle, sous la direction de l’émissaire du Quartet [1] Tony Blair, un effort d’investissement massif est consenti en Cisjordanie. Bien que ce soit sans conteste une bonne chose du point de vue du bien-être des Palestiniens, il n’existe aucune évidence que cela modère en quoi que ce soit leurs postures de négociation, si problématiques pour aboutir à un accord de paix. On épinglera leurs revendications territoriales, l’insistance sur le droit au retour ainsi que le contrôle exclusif du Mont du Temple / Haram al-Sharif. Relevons, aussi, que les deux Intifada éclatèrent chacune en des périodes de relative prospérité palestinienne, non de disette. De quoi dissiper toute illusion chez ceux des Israéliens - entre autres - qui s’imaginent avec mépris que « ventre plein réjouit le Palestinien. »

L’expérience nous enseigne aussi que lorsque les progrès font défaut, geler les problèmes les plus délicats d’un accord final pour favoriser les accents économiques ou toute autre approche aboutit seulement à affaiblir le leadership palestinien relativement modéré avec lequel nous négocions actuellement. Et font empirer la situation.

Pour nous résumer, des bienfaits économiques sont aussi intrinsèquement profitables aux Palestiniens qu’à n’importe quel autre peuple, mais, tout comme les sanctions économiques, ils contribuent remarquablement peu au processus de paix.

En fin de compte, nous devons surtout prêter attention aux non-dits du plan de « paix économique » de Netanyahu. Une fois les Palestiniens assagis par la prospérité, projette-t-il de démanteler des avant-postes et des colonies isolées, afin de céder la place à un éventuel Etat palestinien ? Vu son approche ignorant ou rabaissant les plus minimes aspirations politiques et territoriales palestiniennes, les soutiens naturels au plan proviendront de la droite politique et religieuse, c’est-à-dire des colons eux-mêmes. Ce constat suggère qu’en réalité le plan de Netanyahu est soit un prétexte pour s’accrocher à la Cisjordanie, soit que, bon gré mal gré, il le deviendra sous peu.

[1] Etats-Unis, Union Européenne, Russie, Nations Unies.

Yossi Alpher est codirecteur de bitterlemons.org et bitterlemons-international.org. Il est ancien directeur du « Jaffee Center for Strategic Studies » et ancien conseiller principal du Premier Ehud Barak.

Source : http://www.bitterlemons.org

Traduction Kol Shalom

Publié le 5 décembre 2008 avec l'aimable autorisation de Kol Shalom.



Source :  Kol Shalom  
http://www.shalomarchav.be/...


Avertissement
Palestine - Solidarité a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Moyen-Orient et de l'Amérique latine.
L' auteur du site travaille à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui lui seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas Palestine - Solidarité ne saurait être tenue responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont elle n'a pas la gestion, Palestine - Solidarité n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
Pour contacter le webmaster, cliquez < ici >

Retour  -  Accueil Ressources  -  Analyses  -  Communiques  -  Originaux