Afrique
Réfugiés de l'Azawad:
la lettre de la détresse absolue
Tamazgha
Le camp de
Mberra
Dimanche 13 janvier
2013 Alors que
les organisations humanitaires tirent la
sonnette d’alarme depuis plusieurs mois,
certains médias, friands d’images
sordides, préfèrent tendre caméras et
micros à des terroristes islamistes qui
font subir aux populations prises en
otage les pires des "châtiments".
Entre malnutrition, paludisme,
infections respiratoires et autres
maladies sévissant d’une façon
particulièrement sévère dans cette
partie du monde, les réfugiés de l’Azawad
doivent décidément payer le prix fort de
la libération de leur territoire, en
proie aux appétits insatiables de divers
prédateurs.
En effet, depuis le début du conflit
dans l’Azawad, ils sont près de 600 000
réfugiés à quitter leurs domiciles et
fuir ce territoire. Si certains se sont
déplacés vers la capitale du Mali, la
plupart se sont plutôt installés dans
les différents autres pays alentours au
gré des conditions de circulation, de
sécurité de la traversée, de la présence
de possibilités d’accueil, etc.
Face à cet afflux de réfugiés,
l’assistance humanitaire internationale
peine toujours à s’organiser en raison
de l’accumulation et de l’aggravation
des problématiques dans cette région. La
crise alimentaire secouant la région -
avant même l’éclatement du conflit dans
l’Azawad -, la sécheresse et les
différents troubles ayant éclaté dans
plusieurs pays rendent les mouvements de
populations extrêmement importants,
compliquant ainsi davantage
l’organisation de l’aide.
L’exemple le plus parlant qui puisse
témoigner de cette difficulté est
probablement la situation chaotique que
connait le camp de réfugiés à M’berra en
Mauritanie. Depuis l’éclatement du
conflit dans l’Azawad, ce camp, où les
conditions semblent particulièrement
difficiles, s’est vu, petit à petit,
"vider" de ses réfugiés. Alors qu’ils
étaient plus de 110 000 au début du
conflit en janvier 2012, ils ne sont
plus que quelques 54 000 réfugiés à
continuer de vivre sur le site d’après
les derniers chiffres du
Haut-Commissariat aux Réfugiés.
Dès les premiers mois de leur
installation sur ce camp, situé à une
quinzaine de kilomètres de Bassiknou, à
l’est de la Mauritanie, les réfugiés
azawadiens ont signalé un certain nombre
de difficultés.
Alyade, un jeune étudiant Touareg qui a
vécu plusieurs mois dans ce camp avant
de le quitter pour Nouakchott et que
nous avons joint par téléphone, en
dresse un portrait très sombre : absence
d’abris pour de nombreuses familles
après plusieurs mois d’installation ;
absence de rationnement alimentaire
pendant plusieurs semaines ; des chaines
ou rangs humains allant jusqu’à mille
personnes pour recevoir les rations
dérisoires ; désœuvrement des jeunes et
des enfants à défaut de disponibilité de
structures pour leur prise en charge,
etc.
La désorganisation de l’assistance
internationale sur ce camp est telle que
la tension est palpable entre les
institutions de coordination des
populations réfugiées et les
institutions onusiennes et autres ONG
intervenant sur le site. En effet,
d’après des sources fiables, les
populations réfugiées sont victimes de
traitements à la limite de la légalité
vis-à-vis du droit International. C’est
le cas par exemple des jeunes étudiants
ayant décidé de quitter le camp de M’berra
pour la recherche de meilleures
solutions pour eux et leurs familles
dans d’autres villes de la Mauritanie
notamment à Nouakchott.
Ces jeunes se sont vus refuser le statut
de réfugié sans aucune raison alors
qu’ils sont les seuls à même de venir en
aide à leurs familles qui, dans les
camps, ne trouvent pas de quoi se
nourrir alors même qu’elles ont tenté de
parer au manque de l’aide à travers le
"système D" (vente de leur bétail,
récupération et vente de bois, etc.).
Outre la violence qui secoue leur
territoire, ces jeunes doivent
aujourd’hui faire face à une autre
violence ; celle d’assister impuissants
à la grande précarité économique et
sociale que vivent leurs familles alors
même qu’ils auraient la possibilité de
les aider.
Après différentes tentatives de
résolution des difficultés sur le site,
les instances de coordination des
réfugiés avaient récemment mené une
action nommée "semaine camp
mort" où la coordination a
sensibilisé tout le camp de M’Berra et a
décidé de n’accepter aucun service du
HCR ou du Programme alimentaire
mondial (PAM), en dehors des
services de santé, liés à Médecins
sans frontières (MSF). Elles
reviennent à la charge en interpellant
directement cette fois le Président
mauritanien à travers une lettre ouverte
on ne peut plus explicite quant aux
conditions difficiles dans lesquelles
des milliers de familles azawadiennes
sont condamnées à vivre.
La situation particulièrement chaotique
que connait le camp de réfugiés de M’berra
doit rappeler à la communauté
Internationale qu’elle doit faire face à
sa responsabilité dans le conflit
sévissant dans l’Azwad. Seule une aide à
la construction d’un Etat juste et
solide pourra permettre à tous les
Azawadiens un retour à leur territoire
pour y vivre dans la dignité et la
stabilité à long terme.
Aussi, il convient ici d’appeler tous
les Amazighs et leurs amis à venir en
aide de toute urgence et de toutes les
manières possibles aux populations de l’Azawad
qui luttent pour vivre librement et
sereinement sur leur territoire.
Nous rendons publique ci-après la lettre
adressée au Président mauritanien en
date du 11 décembre 2012 par les chefs
de secteurs du camp de M’berra ainsi que
le Porte parole de la coordination des
réfugiés.
La Rédaction
Lettre de
réfugiés au Président de Mauritanie
LETTRE
OUVERTE à Mohamed Ould Abdel Aziz,
Président de la Mauritanie
Camp de Mberra:
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