Opinion
Les réalités de
Gaza
Soraya
Hélou
Vendredi 23
novembre 2012
Huit
jours après son déclenchement,
l’agression contre Gaza a pris fin.
Après un déluge de feu sans précédent et
d’une sauvagerie typique de l’ennemi
israélien qui n’a épargné ni les civils,
ni les enfants, ni les journalistes, ni
les bâtiments publics et qui a commencé
par une tromperie dont seul cet ennemi
est capable, un accord a été conclu qui
sauve la face à l’ennemi, mais ne trompe
personne. L’ennemi israélien a même
demandé cette trêve, en essayant de
trouver des scénarios pour avoir l’air
de céder aux pressions internationales,
et curieusement, ce sont les Etats-Unis
qui n’en voulaient pas, préférant
qu’elle ait lieu sous leur parrainage
pour bien montrer à leur allié israélien
qu’il ne peut rien faire sans eux.
Netanyahu, Barak et Liberman ont eu beau
crier à la victoire, assurant que cette
opération a atteint ses objectifs, leurs
affirmations n’ont convaincu personne,
sans doute pas eux-mêmes. D’ailleurs,
Shaoul Mofaz ne s’y est pas trompé
puisqu’il a parlé de cuisante défaite.
Plus même, un attentat s’est produit à
«Tel Aviv» et les Israéliens n’ont pas
osé riposter pour ne pas remettre en
question les négociations en vue de la
trêve. En tout cas, il faudra attendre
quelque temps pour que l’impact de cette
guerre sur l’entité sioniste se précise.
Mais
on peut d’ores et déjà en tirer quelques
conclusions, au moins sur le plan arabe.
Premièrement, cette guerre a montré
qu’en dépit de toutes les tentatives de
pousser les organisations palestiniennes
à abandonner le choix de la résistance,
ces organisations, toutes tendances
confondues, ont fait preuve d’une grande
mobilisation et d’une grande efficacité,
montrant à qui veut le voir que la
résistance reste leur choix principal,
leur raison d’être et leur démarche pour
reconquérir leur terre.
Deuxièmement, la Résistance
palestinienne ne s’est pas contentée de
lancer des missiles contre les colonies
de peuplement proches, elle a pour la
première fois dans l’histoire du conflit
israélien, bombardé «Tel Aviv», Al-Qods
(Jérusalem) et «Hertzilia» à 85 kms de
Gaza, prenant ainsi de court l’ennemi
qui croyait ces régions à l’abri. De ces
huit jours de bombardements, le monde
entier retiendra ces images incroyables
des Israéliens de «Tel Aviv» et de
«Jérusalem» prenant le chemin des abris,
les Israéliens de «Hertzilia» terrorisés
par quelques obus.
C’est
un renversement total des données.
D’habitude, ce sont les Palestiniens et
les populations arabes que l’on voit
effrayés et prenant la fuite. Cette
fois, ce sont les Israéliens, qui ont
soudain perdu leur arrogance et leur
sentiment de supériorité. Toutes leurs
armes, tout l’appui
occidental et même le fameux «Dôme
d’acier» n’a pas réussi à les protéger
des missiles d’un peuple si longtemps
bafoué, d’une bande soumise à un blocus
depuis 5 ans, affaiblie, manquant de
presque tout mais pas de dignité. Tout a
été fait pour détruire l’esprit de
résistance chez les Palestiniens et chez
les arabes et quelques missiles
(iraniens notamment comme le fameux Fajr
5) ont jeté tous ces efforts à l’eau. En
voyant leurs missiles atteindre «Tel
Aviv», «Jérusalem» et les villes
lointaines, les Palestiniens de Gaza ne
se souciaient plus des obus qui leur
tombaient sur la tête, ne pleuraient
plus leurs morts, fiers et heureux de
retrouver l’espoir de libérer un jour la
Palestine. Ce sentiment-là, c’est à coup
sûr le début de la victoire. La
Résistance est dans une courbe
ascendante et l’ennemi dans une courbe
descendante. Aucun analyste du monde ne
peut nier cette réalité nouvelle. La
grande leçon de cette guerre, c’est que
l’esprit de résistance est plus vivace
que jamais. Il n’y a pour s’en
convaincre qu’à revoir le film des
négociations, comment les Israéliens
voulaient la trêve et les Palestiniens
posaient des conditions, comment aussi
dès les premiers jours les Israéliens
menaçaient de lancer une offensive
terrestre sans y croire et sans être
crédibles, alors que la Résistance
palestinienne souhaitent encore en
découdre avec l’ennemi. Cette réalité
là, nul ne pourra non plus l’ignorer.
Désormais, le processus de la résistance
ne pourra plus être étouffé et les
Palestiniens (et avant eux les Libanais)
ont eu un avant-goût de la victoire
décisive et ils ne peuvent plus
l’oublier. Comment après cela revenir à
l’humiliation, à la mentalité du vaincu,
au désespoir et à la résignation ? Cette
réalité aussi, nul ne peut plus
l’occulter et surtout pas les régimes
arabes qui préfèrent justifier leur
résignation et leur abandon de la lutte
par un soi-disant souci des
vies
humaines et par un rapport de forces
défavorable aux Palestiniens et aux
résistants en général. Cette thèse si
longtemps développée a montré ses
limites à Gaza et auparavant au Liban.
Et ceux qui s’empressent d’envoyer des
armes à l’opposition syrienne pour
qu’elle détruise son pays et tue ses
concitoyens devaient sérieusement songer
à envoyer celles-ci aux Palestiniens qui
ont montré qu’ils savent les utiliser au
bon endroit et contre le véritable
ennemi. Sinon, les Arabes, toutes
populations confondues, pourraient un
jour ne pas leur pardonner. Quant à
l’Histoire, celle qui parle des grands
hommes et des grands moments, elle
évitera soigneusement de les mentionner
parce qu’ils n’auront servi qu’à
retarder la victoire finale qui devient
avec chaque nouvelle confrontation avec
l’ennemi israélien, plus proche et plus
certaine.
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