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Opinion
Plus qu'un accord,
une alliance fondamentale
Soraya Hélou
Sayed Hassan Nasrallah et le général Aoun
Lundi 7 février 2011
Il y a cinq ans exactement, le Liban vivait un moment historique
qui a, non seulement modifié les équilibres politiques internes,
mais porté un coup fatal aux projets de division communautaire,
de guerre islamo-chrétienne et de complot contre la résistance.
Au début, les citoyens ont été pris de court: les images
véhiculées par les chaînes de télévision du général Michel Aoun
aux côtés de sayed Hassan Nasrallah avaient de quoi surprendre.
A ce moment-là, les positions de deux leaders semblaient
éloignées l’une de l’autre. Certes, des négociations étaient
entreprises depuis l’été 2005 entre des représentants des deux
parties, mais nul ne pensait qu’elles pouvaient aboutir à cette
alliance spectaculaire.
Les détracteurs des deux leaders, essentiellement des figures du
14 mars effrayées par cet accord qui bouleversait leurs plans et
ceux de leurs parrains internationaux ont voulu y voir un coup
médiatique, une riposte un peu facile à la manifestation qui
avait secoué Achrafieh la veille avec le déferlement des
partisans d’islamistes proches du courant du Futur dans ce
secteur en principe pour protester contre les caricatures
danoises prenant pour cible le Prophète et qui s’était
transformé en actes de vandalisme. D’autres ont préféré croire
qu’il s’agissait d’une manœuvre politique, d’une convergence
d’intérêts ponctuels, misant sur le fait que le général Aoun ne
pourrait entraîner sa base chrétienne dans un tel virage.
Et pourtant… Cinq années et de nombreux développements
dramatiques plus tard, l’alliance consacrée par la signature
d’un document d’entente tient toujours bon. Elle s’est même
approfondie et elle est devenue une constante dans le paysage
politique libanais. Au moment où l’ex-opposition devenue
nouvelle majorité s’apprête à former un nouveau gouvernement
sous la présidence du Premier ministre Négib Mikati, l’alliance
entre le Hezbollah et le CPL a montré une fois de plus sa
solidité, ayant réussi à faire passer la majorité d’un camp à
l’autre par le biais d’un vote parlementaire constitutionnel et
démocratique.
Cette alliance née à la suite des élections législatives de 2005
qui avait vu l’émergence d’une majorité basée sur l’accord
quadripartite entre le Hezbollah, Amal, le Courant du Futur et
le PSP avant que les deux dernières formations se retournent
contre les premières, s’est consolidée à travers la guerre
israélienne de 2006 et l’appui sans limites accordé par le CPL à
la résistance. Elle s’est ensuite concrétisée par le sit-in de
l’opposition au centre ville destiné à obtenir la chute du
gouvernement Siniora, avant de porter ses premiers fruits
officiels à travers l’accord de Doha qui lui a permis d’obtenir
un gouvernement
d’union nationale et un découpage électoral plus favorable aux
chrétiens. Le général Aoun n’a pas abandonné le camp de la
résistance, en dépit de toutes les pressions exercées sur lui,
internes et internationales et en dépit de la terrible campagne
médiatique et populaire menée contre lui, mais le Hezbollah non
plus n’a jamais abandonné son allié, faisant siennes ses
revendications politiques et sa lutte contre la corruption. Aoun
a assuré une profondeur stratégique chrétienne et nationale au
Hezbollah, évitant son isolement en prélude à un nouveau coup
porté contre lui et le Hezbollah a soutenu le général dans sa
bataille politique, sécuritaire et nationale, lui assurant une
stabilité stratégique qui lui a permis de devenir un acteur de
premier plan sur la scène locale.
Ensemble, les deux alliés ont mené toutes les batailles de ces
dernières années, évitant au pays les troubles sécuritaires et
faisant en sorte de surmonter le clivage confessionnel qui a
coûté cher au Liban pendant les années de guerre civile.
Aujourd’hui, cette alliance a mené l’ex-opposition vers la
conquête de la majorité parlementaire. Elle doit désormais
relever le défi de l’exercice du pouvoir. Il y a de grandes
chances qu’elle réussisse cette nouvelle étape et tous ceux qui
avaient misé sur son effritement doivent aujourd’hui revoir leur
pari. L’alliance conclue le 6 février 2006 se renouvelle chaque
jour, à chaque nouvelle étape que traverse le Liban et dans les
maisons des partisans du CPL et de ceux du Hezbollah qui
tiennent le même langage, engagés pour les mêmes causes et se
considèrent comme partenaires à part entière dans la
construction d’un Liban de coexistence, de démocratie,
d’arabité. Plus fort encore, les deux camps ont déjoué par leur
volonté et leur détermination, et surtout par leur vision
commune, le plan d’implantation des Palestiniens.
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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