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The Guardian
Bush cherche la bagarre avec l'Iran
Simon Tisdall
The Guardian, mercredi 31 janvier 2007
article original : "Bush
'spoiling for a fight' with Iran"
On s'attend à ce que les responsables américains
à Bagdad et à Washington dévoilent cette semaine un
"dossier" des services secrets détaillant les preuves
de la complicité présumée de l'Iran dans les attaques contre
les soldats américains en Irak. Cette manœuvre, faisant désagréablement
écho à la débâcle du dossier de Downing Street dans la préparation
à l'invasion de l'Irak en 2003, est un signe de plus indiquant
que l'administration Bush est en train de fabriquer des arguments
pour la guerre.
Nicholas Burns, le diplomate américain en chef en charge de la
politique iranienne, dit que Washington "ne cherche pas la
confrontation" avec Téhéran. La ligne officielle est que
Washington a pris consciemment la décision de
"repousser" l'Iran sur un éventail de fronts où les
intérêts des deux pays sont en conflit. En premier lieu, cela
signifie l'interférence perçue de Téhéran en Irak, où son
influence sur le gouvernement dirigé par les Chiites et la
population chiite majoritaire paraît croître au fur et mesure
que Washington s'affaiblit.
Le porte-parole du Département d'Etat, Sean McCormack, a soutenu
cette semaine que l'administration avait une masse de preuves
impliquant l'Iran dans des attaques sectaires contre la minorité
iraquienne sunnite. "Il y a de fortes raisons de croire cette
information dont nous disposons déjà et nous en en accumulons
constamment plus", a-t-il déclaré au New York Times.
Des fonctionnaires de la CIA et du Pentagone rendent publics des
renseignements selon lesquels "les Iraniens introduisent en
contrebande en Irak des dispositifs sophistiqués d'explosifs, des
mortiers et des plans détaillés pour raser des quartiers arabes
sunnites", déclare cet article. Les fonctionnaires devraient
développer cette semaine des "arguments détaillés".
Mais le Président Bush a déjà agi sur l'information qu'il a reçue.
Il a confirmé hier qu'il a ordonné en fait aux forces américaines
de tuer ou de capturer les "agents" iraniens qui visent
des Américains en Irak - comme cela s'est produit un peu plus tôt
ce mois-ci [le 20 janvier] lorsque cinq fonctionnaires iraniens
ont été placés en détention à Arbil.
Hassan Kazemi Qumi, l'ambassadeur de l'Iran en Irak, a tourné en
ridicule les "cartes sectaires" et les preuves que l'armée
américaine a dit avoir obtenues au cours d'un raid sur un
quartier chiite à Bagdad. Il a répété l'affirmation de Téhéran
selon laquelle les Iraniens étaient en Irak pour aider aux
"problèmes de sécurité". Barham Saleh, le
vice-Premier ministre irakien, se plaint que les Etats-Unis et
l'Iran transforment son pays en une "zone de conflit et de
concurrence" et suggère qu'ils aillent se battre ailleurs.
Mais comme ce fut aussi le cas dans les jours qui ont précédé
la chute de Saddam Hussein, des forces extérieures puissantes,
allant de groupes de l'opposition iranienne exilée à des chefs
politiques israéliens, semblent avoir l'intention d'attiser les
flammes - et d'embobiner la Maison Blanche.
"La Force al-Quds des Gardiens de la Révolution Islamique
d'Iran intensifie le terrorisme et encourage la violence sectaire
en Irak", a déclaré ce mois-ci au Washington Times
[quotidien néoconservateur] Alireza Jafarzadeh, un dissident
iranien basé aux Etats-Unis qui a été lié au groupe de résistance
Mujahidin-e-Khalq (MeK). M. Jafarzadeh est crédité d'avoir révélé
l'existence des sites nucléaires secrets iraniens à Natanz et
Arak en 2002.[1]
"Il y a une montée très rapide du financement du terrorisme
et de la violence sectaire en Iran depuis ces derniers mois",
a déclaré M. Jafarzadeh lors d'une conférence organisée par la
Commission sur la Politique Iranienne [Iran Policy Committee],
un lobby à Washington qui fait pression sur le Département d'Etat
pour retirer le MeK de sa liste terroriste.
Israël appuie aussi le dossier des renseignements tout en faisant
monter les enchères, soutenant avoir connaissance du fait que Téhéran
est à une ou deux années d'acquérir une capacité de
fabrication de base d'armes nucléaires. Dans une interview à la
BBC, la semaine dernière, l'ancien Premier ministre Benjamin
Netanyahou a comparé le régime du Président Mahmoud Ahmadinejad
aux Nazis de Hitler. S'exprimant à Davos, le vice-Premier
ministre Shimon Peres, a exigé un changement de régime immédiat
ou, en cas d'échec, une intervention militaire.
La "pression" américaine pour forcer l'Iran à "se
retirer" comprend de nombreux autres éléments qui vont
au-delà de l'Irak. Des rapports non confirmés suggèrent que le
vice-Président Dick Cheney a passé un accord avec l'Arabie
Saoudite pour maintenir une production de pétrole élevée alors
même que les prix chutent, afin de saper la principale source
iranienne de devise étrangère. Washington se livre à des
sanctions financières globales, en dehors de l'Onu, contre Téhéran
; encourage et arme un "nouvel alignement" des Etats
arabes sunnites du Golfe ; et met en lumière le rôle de l'Iran
dans le "soutien au terrorisme" en Palestine, où il a
aidé à financer le gouvernement du Hamas, et au Liban, où il
soutient le Hezbollah. Les Etats-Unis déploient aussi des forces
navales puissantes dans le Golfe qui ne sont pas de beaucoup
d'aide en Irak mais qui pourraient aisément être utilisées pour
monter des attaques aériennes contre l'Iran.
Pratiquement n'importe lequel de ces développements pourrait
produire un casus belli. Et lorsqu'on les prend ensemble, malgré
les protestations officielles, ils semblent indiquer une seule et
unique direction. Un commentateur américain a suggéré que
l'administration Bush "cherche une fois de plus la
bagarre".
Traduction de l'anglais : [JFG-QuestionsCritiques]
Notes :
[1] Cela nous rappelle comment
Ahmed Chalabi, le dissident irakien basé aux Etats-Unis avait
indiqué à l'administration Bush les soi-disant caches d'Armes de
Destruction Massive en Irak, ayant conduit à l'invasion de 2003
et au renversement de Saddam Hussein. On notera aussi qu'Ahmed
Chalabi était l'invité du groupe de Bilderberg pour l'Irak à
Ottawa en 2006.
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