Opinion
Le Hezbollah
combat en Syrie, ses ennemis l'y ont
précédé
Samer R.
Zoughaib
Mercredi 29 mai 2013 Des voix
s'élèvent au Liban et ailleurs pour
«condamner l'implication du Hezbollah
dans le conflit syrien». Mais ceux qui
critiquent, aujourd'hui, la
participation de la Résistance aux
combats dans des régions bien
déterminées en Syrie, ont fermé les yeux
pendant deux ans devant l'implication de
Libanais et d'extrémistes du monde
entier dans la guerre.
La crise
syrienne a éclaté en mars 2011,
c'est-à-dire il y a 27 mois. Les deux
premières années, le Hezbollah a appelé
-et appelle toujours- à une solution
pacifique. Le secrétaire général du
parti, sayed Hassan Nasrallah, a exhorté
à plusieurs reprises les protagonistes à
ne pas avoir recours aux armes et à
s'asseoir autour de la table du
dialogue. Il y a près de trois mois, le
Hezbollah a changé d'attitude et a
annoncé sa participation aux combats
dans certaines régions.
Ce changement
d'attitude est dû à plusieurs facteurs.
Alors que le Hezbollah prônait le
dialogue
inter-syrien et appelait les Libanais à
confiner leur divergences sur la Syrie à
la sphère politique, des partis du
14-Mars étaient impliqués dans la crise
syrienne. Voici quelques preuves
irréfutables de cette ingérence à tous
les niveaux:
1-Selon des
rapports des Nations unies, de services
de renseignements libanais, arabes et
occidentaux, une grande partie des armes
acheminées aux rebelles syriennes dans
le centre de la Syrie et autour de
Damas, qui sont les fronts les plus
actifs, transitent par le Liban. L'Armée
libanaise et les services de sécurité
ont saisi d'énormes quantités d'armes de
tous calibres destinées aux groupes
armés. La saisie la plus importante a
été la cargaison de 60 tonnes d'armes et
de munitions du cargo Lutfallah 2, en
mai 2012. Cet arsenal, en provenance de
Libye, devait être déchargé dans le port
de Tripoli avant d'être acheminé vers la
Syrie.
2-De nombreux
rapports de services de renseignements
et d'enquêtes journalistiques rapportent
que le Liban constitue, avec la Turquie,
le point de passage privilégié
d'extrémistes du monde entier (venus de
29 pays, selon un rapport des Nations
unies), qui vont combattre dans les
rangs des rebelles syriens. Au Liban,
ces volontaires sont pris en charge,
hébergés et transportés par des partis
politiques libanais, comme le Courant du
futur et d'autres groupes extrémistes
basés dans le Nord et dans certains
camps palestiniens.
3-Pendant des
mois, le 14-Mars a mené une campagne
contre l'Armée libanaise pour la
contraindre à relâcher sa vigilance et à
faire profil bas au Liban-Nord. Cette
tactique visait à transformer cette
région en sanctuaire pour les rebelles
syriens. Effectivement, des camps
d'entrainement ont été installés dans
des régions reculées du Akkar et de Wadi
Khaled; des villages ont été transformés
en bases-arrière ou bases de repli pour
les extrémistes syriens; un hôpital de
Tripoli a été mis à la disposition des
rebelles pour y soigner leurs blessés.
Des milliers de combattants ont été
traités dans cet établissement et dans
d'autres hôpitaux de la Békaa-Ouest, de
Chtaura et de Baalbeck.
4-Des combattants
libanais ou palestiniens du Liban,
membres de groupes extrémistes, se
battent en Syrie aux côtés des rebelles.
Ils sont plusieurs centaines, selon des
sources sûres. Quatorze d'entre eux,
envoyés par le cheikh salafiste Daï
al-Islam al-Chahhal, ont été tués dans
une embuscade en territoire syrien près
de Tall Kalakh, en novembre 2012. Cet
incident a fait la Une des journaux à
cause du bilan élevé. Mais des dizaines
d'autres libanais sont morts au combat
dans des régions syriennes.
5-Les
médias libanais ont révélé,
enregistrements sonores à l'appui, que
le député Okab Sakr a été chargé par le
chef du Courant du futur, Saad Hariri,
de financer et d'armer les rebelles. M.
Sakr a quitté le Liban depuis deux ans
et se déplace entre la Belgique et
Istanbul, pour organiser la logistique
et les livraisons d'armes et d'argent.
6-Un vaste réseau
de médias libanais, composé de journaux,
radios, télévisions et sites internet,
s'active pour relayer une information
favorable aux rebelles et hostile au
gouvernement syrien. Il constitue un des
maillons les plus importants d'un
network planétaire chargé de la
propagande.
7-Des dizaines de
rebelles syriens arrêtés au Liban en
possession d'armes ou d'autres interdits
sont très vite remis en liberté après
l'intervention de hautes autorités
politiques, qui se sont engagées auprès
des pays occidentaux à faciliter les
mouvements de l'opposition syrienne au
Liban, en violation de tous les accords
de coopération bilatéraux signés entre
les deux pays.
En deux mots comme
en mille, le Liban est carrément le
front arrière de la rébellion
syrienne... et ce depuis deux ans.
Lorsque sayed
Hassan Nasrallah annonce que le parti
combat en Syrie, toutes ces personnes et
partis politiques, impliqués jusqu'au
cou depuis deux ans, s'indignent et
accusent le Hezbollah d'entrainer le
Liban vers une catastrophe.
Pourtant,
l'intervention du Hezbollah est
parfaitement justifiée. D'abord, par le
devoir de protéger les quelque 30000
libanais vivant à l'ouest de l'Oronte,
en territoire syrien. S'ils avaient été
abandonnés à leur sort, ils auraient été
contraints de quitter leurs villages à
cause des attaques rebelles.
Mais ces dernières
semaines, le Hezbollah a décidé de
s'impliquer davantage pour les raisons
suivantes:
1-Les
groupes extrémistes projetaient
d'instaurer une ceinture frontalière
sous leur contrôle total, jouissant
d'une profondeur géographique vers Ersal
et Wadi Khaled, après avoir pris le
contrôle des villages de Libanais dans
la campagne de Qoussair, et poussé leurs
habitants à l'exode. Cela aurait abouti
à la fermeture du passage terrestre vers
Homs et aurait mis toute la Békaa
libanaise à la merci des extrémistes.
2-Les rebelles ont tenté de prendre
l'aéroport de Damas et la route qui y
mène.
3-«Israël» est directement intervenu
dans le conflit en bombardant Damas et
ses environs pour, selon ses dires,
couper le ravitaillement de la
Résistance au Liban.
Dès lors,
il est devenu clair pour le Hezbollah
que l'action militaire des rebelles,
sans doute conseillés par des experts
occidentaux, visait à resserrer l'étau
progressivement autour de la résistance,
qui se trouverait pratiquement
encerclée.
La
Résistance a donc décidé de réagir pour
faire échec à ce plan. Sayed Nasrallah
en a expliqué les raisons dans son
discours du 25 mai. «Une partie de
l'opposition syrienne souhaite le
dialogue, mais une autre partie
travaille pour le compte des
renseignements américains et
israéliens», a-t-il dit avant de
poursuivre. «La montée de ces mouvements
radicaux ne constituent pas uniquement
une menace pour les chiites au Liban,
mais pour tous les Libanais, qu'ils
soient musulmans ou chrétiens. La Syrie
représente un soutien essentiel à la
résistance. La Syrie, c'est la
protection arrière de la résistance, le
support de la résistance. La résistance
ne peut rester les bras croisés quand sa
protection arrière est exposée et quand
son support se brise. Si nous n'agissons
pas, nous sommes des idiots. Si le
régime de Bachar el-Assad tombe, la
résistance sera affaiblie, ce qui
permettra à Israël de contrôler le Liban
et ce qui signera la fin des mouvements
de résistance en Palestine».
Le leader de la
Résistance a été transparent et sincère.
Ses détracteurs et ses ennemis
peuvent-ils en dire autant d'eux-mêmes?
Source :
French.alahednews
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