Liban
Liban-TSL: Un procès politique sous
habillage juridique (2/2)
René Naba
Jeudi 21 mars
2013 Un procès
politique sous habillage juridique pour
renflouer l’héritier problématique du
clan 2/2
Le procès se tient en l‘absence de deux
des principaux protagonistes de
l’affaire, Assef Chawat, beau-frère du
président syrien Bachar al Assad et un
des responsables des services de
sécurité syriens et Wissam Al-Hassan, le
principal maître d’œuvre du dossier
d’accusation.
Assef Chawkat,
Michel Samaha et Wissam Al Hassan….les
surprises d’un jeu de billard à trois
bandes.
Deux personnages
engagés dans une lutte à mort: le
libanais, controversé responsable de la
protection rapprochée de son employeur
Rafic Hariri, pesait sur lui la
suspicion d’un manquement professionnel
qu’il lui importait de lever, le syrien,
à ce titre dans le viseur de son rival
libanais en tant potentiel bouc
émissaire syrien, veillait à lui damer
le pion, en cherchant à se dégager du
nœud coulant placé autour de lui par les
Occidentaux dont ils réclamaient la tête
pour solde de tout compte de
l’implication présumée de la Syrie dans
l’affaire Hariri.
http://www.renenaba.com/wissam-al-hassan-la-dague-du-dispositif-securitaire-saoudien-au-proche-orient/
Interface entre la
Syrie et la France sous la présidence de
Nicolas Sarkozy, Michel Samaha, devenu
personnage encombrant du fait de sa
parfaite connaissance des divers aspects
des rapports triangulaires franco libano
syriens, se devait d’être réduit au
silence en ce qu’il parasitait la scène
par ses révélations intempestives.
Ancien ministre
libanais de l’information, ancien membre
du parti phalangiste (milices
chrétiennes libanaises), Michel Samaha a
ainsi affirmé le 4 juillet 2011 sur la
télévision «Al Manar» que Saad Hariri,
le fils de la victime, avait souscrit en
sa qualité de premier ministre du Liban
un engagement renonçant au tribunal
Spécial sur le Liban, de même qu’a son
financement à la condition expresse
qu’aucune censure parlementaire ne
sanctionne sa gestion gouvernementale.
Hariri jr avait posé en outre comme
condition qu’aucune poursuite ne soit
engagée contre les faux témoins qui ont
vicié le déroulement de l’enquête, ni
contre les officiers qui lui sont
proches, le général Achraf Rifi,
directeur des forces de sécurité
intérieure, Wissam Hassan, chef du
bureau du renseignement, ni que
l’évaporation de douze milliards de
dollars du ministère des finances sous
la gestion Hariri.
Samaha paiera le
prix fort pour ses révélations. Au terme
de la mandature Sarkozy, il sera
neutralisé, l’été 2012, sur ordre de
Wissam al Hassan, sous l’accusation de
menées pro syriennes et anti libanaises,
sur la base d’un témoignage d’un agent
triple, Milad Kfouri. Kfouri, ancien
membre des milices chrétiennes
libanaises, reconverti dans la
prestation de services auprès des
Syriens et du Clan Hariri, a disparu
depuis de la circulation, exfiltré et
son silence, semble-t-il, monnayé à son
pesant d‘or.
Assef Chawkat a été
pulvérisé dans un attentat contre le
quartier général syrien, le 18 juillet
2012, à Damas, et son accusateur Wissam
Al Hassan, carbonisé à son tour trois
mois plus tard, emportant, tous les
deux, leurs secrets dans la tombe.
Le procès Hariri
devait constituer le sacre de Wissam Al
Hassan et le blanchir rétrospectivement
de ses bavures successives. Il sera le
procès en creux de ce maître d’œuvre des
opérations de déstabilisation de la
Syrie et de ces manigances visant à
maintenir l’enquête du procès Hariri sur
le rail anti syrien… des faux témoins, à
l’incarcération abusive des quatre
officiers supérieurs, à l’inculpation de
Michel Samaha.
Certes, la peine
capitale a été requise par le parquet
libanais à l’encontre de Michel Samaha
et le Hezbollah -question de maintenir
la pression- de nouveau suspecté d’un
mystérieux attentat en Bulgarie. Mais le
prédateur a trépassé bien avant qu’il ne
terrasse sa dernière proie, qu’il
comptait caraméliser sous l’accusation
de sabotage. Le pire scénario imaginable
pour le camp occidental, sauf à leur
servir de bouc émissaire posthume idéal
dans l’hypothèse d’un arrangement entre
les Etats-Unis et ses contestataires
régionaux.
Michel Samaha a
constitué incontestablement une belle
prise pour la justice libanaise,
discréditée par une cascade de jugements
invraisemblables contre des officiers
supérieurs libanais impliqués ans un
réseau pro israélien. Mais sa
crédibilité ne sera durablement
restaurée que lorsqu’elle aura fait la
démonstration de son impartialité, en
mettan en jugement un autre fauteur de
troubles redoutable, le député chiite
pro haririen Okab Sakr. Principal
pourvoyeur d’armes à l’opposition
islamiste syrienne, le député chiite pro
haririen a déserté ses responsabilités
au sein de la représentation nationale
libanaise, pour aménager ses quartiers
en Turquie en vue de mener sa guerre
pour le compte de ses parrains
saoudiens, dans une opération qui
s’apparente à la forfaiture. Ah les
surprises du jeu de billards à trois
bandes.
La mystérieuse
interview du Times: une ténébreuse
affaire
Summum de la
sophistication dans la guerre
psychologique menée par les pays
occidentaux pour déstabiliser le
successeur de Saad Hariri, le premier
ministre Najib Mikati, est la
mystérieuse interview publiée par la
revue américaine «Time» d’un des quatre
inculpés, proclamant son innocence,
assurant qu’il se trouvait au Liban et
que s’il avait été reconnu coupable, le
Hezbollah l’aurait déjà remis à la
Justice internationale. Le journal An
Nahar, emboitant le pas, a indiqué que
la personne qui avait été interviewée
n’est autre Hussein Ouneissi, alors que
Nicolas Blanford, le correspondant du
Time à Beyrouth, démentait avoir
effectué l’interview. Le journaliste
américain, grand spécialiste du
Hezbollah, a assuré qu’il s’est borné à
commenter les propos du soi-disant
inculpé sur la base d’un texte fourni
par la direction du Times sans en
connaitre sa provenance.
Imad Moughnieh
et la responsabilité des attentats du 11
septembre
Une mise en scène
pour camoufler les informations
procurées de sources israéliennes?
Imad Moughnieh, chef de la branche
militaire du Hezbollah, tué par une
explosion à la voiture piégée à Damas,
en 2008, ainsi que l’Iran, ont été mis
en cause dans les attentats du 11
septembre dans une déposition faite
devant un tribunal du district de
Manhattan, rapporte samedi 26 aout 2011
Le spécialiste des affaires du
renseignements au journal israélien
Yedioth Aharonoth, Ronine Bergman, a
rapporté cette information surréaliste
se référant à des responsables du
renseignement américain. Selon le
journal, Imad Moughnieh aurait
personnellement assuré la livraison des
explosifs.
Curieux cheminement
que cette information qui reviendrait à
imputer la responsabilité des attaques
du 11 septembre aux Chiites et à
blanchir rétrospectivement les Sunnites,
particulièrement les sunnites alliés de
l’Amérique, les adversaires implacables
tant de l’Iran que des chiites, qu’ils
considèrent comme des parias de l’Islam,
alors que les Etats-Unis ont envahi
l’Afghanistan précisément pour châtier
les Taliban de cette opération, l’Irak
laïc pour sa connivence supposée avec Al
Qaïda, enfin le Pakistan pour
l’élimination du chef d’Al Qaida,
Oussama Ben Laden.
Doublement curieux le cheminement que
cette information qui consiste à confier
à un ancien responsable des services de
renseignements israéliens de charger
l’Iran et le Hezbollah en se référant à
des anciens responsables de la CIA. Que
n’a-t-on cité directement les
responsables américains, sans s’abriter
derrière les Israéliens?
Pourquoi une telle
révélation si tardive? Pourquoi avoir
attendu dix ans pour révéler une
information explosive détenue par les
Américains eux-mêmes? S’agit d’il de
préparer une nouvelle campagne de
diabolisation de «l’axe du mal» en de
détourner l’attention sur la question
palestinienne, en pleine offensive
diplomatique pour la reconnaissance de
l’Etat de Palestine à l’ONU.
Le lendemain, le
Yedioth Aharonoth, en phase
d’inspiration aigue, faisait état de
l’installation d’une base de Hezbollah à
Cuba, pour servir de tête de pont au
déploiement du mouvement chiite pour
l’observation et le repérage des
activités américaines et israéliennes
dans la zone des Caraïbes.
Intervenant après
la chute de Tripoli aux mains de l’Otan,
dans la foulée de la déstabilisation de
la Syrie, la mise en cause du Hezbollah,
visait à stranguler le noyau dur de la
résistance à l’hégémonie
israélo-américaine dans la zone en
cherchant à faire rétrospectivement
payer, par le biais judiciaire, au trio
Hezbollah-Syrie-Iran, la responsabilité
des attentats anti occidentaux de
Beyrouth, contre le QG des marines à
Beyrouth, en 1983, et les deux attentats
contre l’ambassade américaine, en 1983
et 1984 (1).
Les instances
judiciaires de Manhattan paraissent
répondre aux mêmes motivations que le
Tribunal spécial sur le Liban, mettant
en cause le Hezbollah dans l’assassinat
de l’ancien premier ministre Rafic
Hariri sur la base des relevés des
données téléphoniques, sans tenir compte
du fait que le réseau libanais des
télécommunications était virusé par des
taupes israéliennes. L’équipe des
enquêteurs internationaux en rapport
avec la CIA, affectée au service du TSL,
témoigne en tout état de cause de cette
préoccupation.
La mystérieuse
disparition du général ALI Akhbar
Asghari
La mise en scène du
TSL vise-t-elle à blanchir les
informations biaisées procurées de
source israéliennes, par le traficotage
des données téléphoniques libanaises et
les informations présumées fournies sous
la torture par le général Ali Akbar
Asghari? Vice- ministre de la défense
sous le régime du Président Mohamad
Khatami, évincé par son successeur
Mohamad Ahmadi Nijad, le général Asghari
est l’ancien responsable des Pasdarans
et des services secrets iraniens au
Liban. Disparu le 7 février 2007 à
Istanbul, il se serait officiellement
réfugié aux Etats-Unis.
Des informations
fuitées dans la presse laissent entendre
que l’officier iranien aurait été
liquidé par ses tortionnaires israéliens
après un interrogatoire musclé sur la
coopération du Hezbollah avec l‘Iran
notamment le rôle de la brigade de
Jérusalem (Faylaq Al Qods) de la garde
révolutionnaire iranienne dans la
défense de la banlieue sud de Beyrouth
lors de la guerre israélienne contre le
Hezbollah, en juillet 2006.
Les aveux qui pourraient lui être
attribués valent-ils quitus pour les
manipulations israéliennes? Autrement
dit, le général Asghari aurait-il servi
de blanchisseur aux turpitudes
israéliennes, en accord avec les
Etats-Unis. Au vu des dysfonctionnements
relevés dans la mission du tribunal, la
question mérite d’être posée.
A l’arrière-plan
d’un printemps arabe corrosif pour les
principaux pivots de l’influence
occidentale sur la rive arabe de la
Méditerranée, -le tunisien Ben Ali et
l’Egyptien Moubarak-, la valse des
instances dirigeantes pourrait donner le
coup de grâce au Tribunal Spécial sur le
Liban, déjà considérablement discrédité.
Le mandat triennal du tribunal a expiré
fin février 2012 et prorogé par tacite
reconduction aux mépris des dispositions
constitutionnelles.
La cause de la
justice internationale est-elle servie
par une falsification permanente des
preuves? par une violation permanente
des lois du pays hôte en ce que le
Tribunal a été institué au mépris des
procédures constitutionnelles du Liban
sans approbation du président de la
république, seule autorité habilitée à
ratifier les conventions
internationales, sans approbation du
conseil des ministres, ni ratification
par le parlement?
Dans la perspective du retrait américain
d’Afghanistan et d’Irak, alors que leurs
propres alliés se retournent contre eux
comme ce fut le cas avec l’assassinat de
leur ambassadeur en Libye Christopher
Warren (septembre 2012), la cause de la
justice internationale est-elle servie
par un dévoiement de sa fonction? Par
son instrumentalisation en guerre de
substitution de basse intensité contre
l’Iran, la Syrie et le Hezbollah,
c’est-à-dire le dernier carré des
récalcitrants à l’ordre hégémonique
israélo-américain?
Références
1- Le bureau de la
défense du Tribunal spécial pour le
Liban (TSL) a désigné, le 26 octobre
2011, huit avocats pour les quatre
prévenus membres du Hezbollah, commis
d’office pour le procès en contumace qui
devrait se tenir en 2012. Chaque prévenu
a eu droit à un conseil principal et un
Co-conseil. Me Antoine Korkmaz, avocat
franco-libanais défenseur du Général
Jamil As Sayyed, qui poursuit le parquet
international pour son incarcération
abusive, a été chargé de la défense de
Moustapha Badr Eddine; Eugene D.
Sullivan (GB) et Emile Aoun (Liban) pour
Salim Ayache; Vincent Courcel de la
Brousse (français, ancien du tribunal
spécial pour la Rwanda) et Yasser Hassan
(Liban) pour Hussein Oneissi ; David
Young (GB) et Gwenaelle Metro Assal
(ancien du TPS Yougoslavie) pour Y
Sabra.
Pour aller plus
loin
HARIRI DE PÈRE EN
FILS : Hommes d’affaires et premiers
ministres
Dix ans après le raid apocalyptique
contre les symboles de l’hyper puissance
américaine, les principaux vecteurs
d’influence occidentale en terre
d’Orient ont été pulvérisés, du
commandant Massoud Shah à Benazir Bhutto
en passant par Rafic Hariri. Chef du
clan américano-saoudien au Liban,
l’ancien Premier ministre a été un
exécutant majeur de la pantomime du
Moyen-Orient et, à ce titre, victime
majeure du discours disjonctif
occidental. Pur produit de la
financiarisation de la vie politique
nationale, Rafic Hariri aura, à l’instar
d’une bulle financière, implosé.
http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=33521
www.renenaba.com
remet en mémoire cette problématique
dans une série de papiers publiés en
Août 2010, en pleine médiation syro
saoudienne. :
TSL/Hariri: 1ère partie Le Tribunal
spécial sur le Liban à l’épreuve de la
guerre de l’ombre Part 1/3
TSL/Hariri: 2eme partie Les Libanais
«des analphabètes secondaires»
TSL/Hariri 3eme partie Les Etats-Unis,
une justice «à la carte», la France, une
suspicion légitime
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© René Naba • 2013
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