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Israël ou la barbarie féconde
Rachid Benzine
Mardi 30 décembre 2008 « …Si
vous nous piquez, ne saignons-nous pas ? Si vous nous
chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez, ne
mourons-nous pas ? Si vous nous faites tort, ne nous
vengerons-nous pas ? Si nous vous ressemblons dans le reste,
nous vous ressemblerons aussi en cela... »
William Shakespeare
Ainsi, c’est par un massacre que l’Etat d’Israël
a choisi de clore l’année 2008. Toutes les télévisions du monde
ont donné à voir ces effroyables images de policiers
palestiniens de la bande de Gaza, agonisant dans d’effroyables
souffrances après avoir été fauchés par les bombardements de
l’armée israélienne. Deux cent cinquante morts pour la seule
journée du 27 décembre. Des civils (les policiers ne sont pas
des combattants) victimes d’un raid où il s’agissait de tuer
massivement, afin de semer la terreur, d’effrayer.
Y a-t-il une différence avec les massacres qui
ont récemment été perpétrés en Inde par des jeunes gens
fanatisés, ou avec les attentats meurtriers qui se déroulent
presque quotidiennement en Irak ? La qualification de « crime
terroriste » serait-elle réservée aux groupes qui ne sont pas
officiellement mandatés par des Etats ? Israël prétend agir
ainsi pour sa sécurité, en réponse aux attaques dont son espace
territorial fait régulièrement l’objet de la part de combattants
palestiniens. Mais que produit un pareil massacre ? Davantage de
haine. Encore plus de désir de détruire Israël. Une rage encore
plus grande chez les jeunes Palestiniens qui ne peuvent nourrir
aucun autre rêve que celui de se venger.
Israël vit dans l’illusion que c’est en
terrorisant les populations des Etats voisins, qui lui sont
globalement hostiles, qu’il garantira son avenir. Il croit dans
la religion de la force. Mais plus l’Etat hébreu agit ainsi,
plus il suscite des vocations de combattants, et
particulièrement des vocations de kamikazes. Devant les images
de civils palestiniens agonisant, ce sont tous les Arabes et les
Musulmans du monde entier qui éprouvent des sentiments de colère
et des envies de châtier Israël à son tour. Depuis 1948, année
de sa création, l’Etat d’Israël est parvenu, de fait, à venir à
bout de toutes les menaces qui ont pesé sur son existence.
Mais combien de temps cela peut-il encore
durer ? Les trois cents millions d’humains qui entourent Israël
sont des barils de colère. Trois cents millions d’êtres qui n’en
peuvent plus de l’humiliation à travers le déni et le mépris que
subissent leurs frères palestiniens. Selon Olivier Abel « Le
fort devient toujours plus barbare avec le faible, il faut donc
armer le faible d’un contre pouvoir. Pour que la barbarie
s’arrête, il faudrait retrouver le sens « épique » : traiter
l’ennemi avec équité, avec respect, avec admiration même, comme
David épargnant Saül ».
Gaza, ce terrifiant ghetto où sont enfermés,
emmurés, un million et demi d’hommes et de femmes qui
s’efforcent de survivre dans une misère insoutenable et cette
terrifiante pénurie d’eau potable. Comment imaginer que, dans
pareille situation, plusieurs dizaines de milliers de jeunes ne
sont pas prêts à combattre jusqu’à la mort ? Israël peut tuer
deux cents d’entre eux chaque jour, il y en aura toujours
autant, et plus encore, qui seront prêts à aller se faire
exploser au coeur des quartiers juifs quand l’occasion s’en
présentera. Folie d’Israël qui creuse lui-même sa tombe.
Folie d’Israël qui génère la violence dont il se
protège. Folie d’Israël qui, à l’époque de la suprématie de
l’OLP, a tout fait pour favoriser le développement d’un
mouvement islamiste voulu comme concurrent, et qui aujourd’hui
fait tout pour le diaboliser. Or quand Israël agit avec
barbarie, Israël œuvre pour la gloire de ce Hamas. Dans toute la
Palestine d’abord. Dans tout le monde arabo-musulman in fine.
Rachid Benzine
Chargé de cours au Master Religion et Société. Institut d’Etudes
Politiques D’Aix en Provence. Chercheur associé à l’observatoire
du religieux (Aix en Provence).
Publié le 30 décembre 2008
avec l'aimable autorisation d'Oumma.com
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