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Gulf News

Israël n’en démord pas : il s’entête à creuser sa propre tombe
Patrick Seale *

Spécialement pour l’agence Gulf News
22 juin 2007

Que faudrait-il donc pour persuader Israël de repenser son attitude vis-à-vis de ses voisins arabes – et, en tout premier lieu, envers les Palestiniens ? La victoire du Hamas, à Gaza, est de toute évidence un signal clair qu’un changement de direction d’Israël est devenu une urgence vitale.

Toutes les tentatives déployées par Israël pour dézinguer le gouvernement Hamas démocratiquement élu ont échoué. Sa politique de boycott, de siège et de faim, de bombardements, d’assassinats extrajudiciaires, de gel des versements des taxes et de destruction systématique des institutions palestiniennes n’ont abouti qu’à créer une bombe à retardement cliquetante, à l’explosif composé de faim, de désespoir et de méfiance, attachée à la ceinture d’Israël.

Et pourtant, Israël semble bien n’avoir retenu aucune leçon. Au lieu de rechercher la paix avec les Arabes – au lieu de s’emparer de leur main tendue – Israël persiste à rejeter toutes les ouvertures de paix, préférant de miser sur la force et toujours plus de force, ainsi que sur sa capacité de manipuler son allié américain.

La nomination d’Ehud Barak au poste de nouveau ministre de la Défense d’Israël est un autre signe menaçant annonçant des guerres, plutôt que la paix, à l’avenir.

Condoleezza Rice, la pauvre secrétaire d’Etat américaine dont d’aucuns pensait qu’elle préparait une nouvelle impulsion donnée aux négociations arabo-israéliennes a manifestement été mise sur la touche par les faucons pro-israéliens, tel un Elliott Abrams, du Conseil américain de Sécurité Nationale.

Le mot d’ordre donné par Washington consiste à dire que la lutte contre la « terreur » demeure la priorité usraélienne. Le président Abbas a reçu l’ordre de se joindre à la guerre contre ses frères palestiniens, s’il veut mériter ses quelques miettes tombées de la table des riches.

Il est évident, même pour les observateurs les plus neutres, que la politique expansionniste agressive d’Israël a généré une détérioration continue de son environnement stratégique.

Israël s’est fait – s’est même créé, devrait-on dire – des ennemis sur plusieurs fronts : le Hezbollah au Liban, le Hamas à Gaza, de très nombreux Palestiniens dépossédés, brutalisés et radicalisés, la Syrie, l’Iran et des groupes radicaux tels Al-Qa’ida.

Signaux d’alarme

Mais d’autres tendances encore devraient déclencher les signaux d’alarme en Israël. L’opinion européenne éclairée est de plus en plus outrée du comportement d’Israël ; tandis que les Arabes sont en train de devenir mieux formés, mieux armés et plus riches qu’ils ne l’avaient jamais été jusqu’ici ; de plus, la démographie arabe galopante produit des dizaines de milliers de recrues potentielles pour des guerres asymétriques qu’Israël est fort mal préparé à livrer, mais qui semblent s’imposer comme modèle pour l’avenir.

Comme si cela ne suffisait encore pas, la tendance à laquelle Israël devrait sans doute accorder le plus d’attention, c’est le fait que son principal allié, les Etats-Unis, est empêtré dans une guerre ingagnable, menée en grande partie à cause des amis américains d’Israël, les néoconservateurs de Washington, qui ont pensé que si l’Amérique écrasait l’Irak, Israël n’aurait plus eu à redouter aucun danger en provenance de l’Est.

Israël pourrait, dès lors, perpétuer ses confiscations de terres en Cisjordanie et sa destruction de la société palestinienne, sans risquer une quelconque réaction sérieuse des Arabes.

Par conséquent, Israël est-il en train de repenser sa stratégie ? Il n’y en a aucun signe. Israël refuse de voir que l’équilibre des pouvoirs risque d’être en train de changer. Il continue à croire qu’il est capable d’éradiquer le Hezbollah au Liban et le Hamas à Gaza, ainsi que de battre la Syrie et l’Iran militairement – ou, à défaut, de mettre les Etats-Unis dans l’obligation de le faire pour lui.

Afin d’éviter toute conversation de paix susceptible de l’obliger à céder un minimum de territoire, Israël persiste à dépeindre le Hamas sous les traits caricaturaux d’une « organisation terroriste » vouée à la destruction d’Israël, recourant ainsi au truc complètement éculé consistant à dire : « Comment pouvez-vous négocier avec quelqu’un qui veut votre peau ? »

Le Hamas est-il vraiment une organisation terroriste, ne s’agit-il pas plutôt d’un mouvement légitime de résistance à une oppression et à une occupation militaire ? Les Américains ont avalé l’appât terroriste avec l’hameçon, le flotteur et le fil de pêche, imités en cela par une Union européenne timide et veule, même si plusieurs de ses pays membres le regrettent aujourd’hui.

Actuellement, le Hamas restaure la loi et l’ordre à Gaza. Il désarme les gangs qui vivaient d’extorsions et de chantages (tel le gang des Doghmush, qui retient en otage le journaliste britannique Alan Johnston, de la BBC).

Et il s’efforce de pourvoir aux besoins immédiats d’une population douloureusement éprouvée d’1,4 million d’habitants densément entassés sur un minuscule territoire qu’Israël a transformé en la plus grande prison à ciel ouvert au monde.

Voici ce qu’a déclaré récemment au quotidien français Le Figaro Ismaïl Haniyyé, dirigeant du Hamas et aujourd’hui le gouvernant effectif de la bande de Gaza :

« Notre programme est clair. Nous voulons la création d’un Etat palestinien à l’intérieur des frontières de 1967, c’est-à-dire dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, avec Jérusalem Est comme capitale. L’OLP reste en charge des négociations sur cette position. Nous avons l’intention de respecter tous les accords précédemment paraphés par l’Autorité nationale palestinienne. Nous souhaiterions parvenir à la signature d’une trêve réciproque, générale et simultanée avec Israël. »

Imagine-t-on Olmert ou l’un quelconque de ses collègues tenant des propos d’une telle modération et d’une telle sagesse !?! Non, en lieu et place, Israël a bien l’intention de continuer, et même, pire, d’intensifier, sa politique consistant à isoler totalement la bande de Gaza du reste du monde.

La ministre israélienne des Affaires étrangères, Tzipi Livni, a récemment exhorté son gouvernement à continuer à isoler le Hamas, tout en relâchant la pression sur le Fatah en mettant fin au boycott financier imposé à la Cisjordanie depuis près de quinze mois. Mais cela suffira-t-il à sauver le soldat Abbas ? Une politique consistant simultanément à gaver la Cisjordanie, tout en affamant Gaza, a-t-elle une chance quelconque de succès ?

Peu probable. L’establishment sécuritaire israélien n’acceptera sans doute pas de lever les centaines de barrages routiers qui rendent la vie impossible aux Palestiniens.

Le puissant mouvement des colons israéliens ne sera pas d’accord pour un gel des colonies, quant à en démanteler certaines, n’en parlons même pas ! Et les dirigeants politique israéliens vont remuer ciel et terre pour éviter de négocier une paix avec les Arabes sur la base des frontières de 1967.

Résultat : Abbas va s’enferrer de plus en plus dans l’illégalité, et il sera de plus en plus perçu comme un Philippe Pétain palestinien ; le Fatah va poursuivre son déclin fatal, et Israël et ses voisins seront voués à des décennies supplémentaires de violence et de guerre.

Comme m’en a fait la remarque un observateur avisé, voici quelques jours de cela : « Le Moyen-Orient d’aujourd’hui ressemble à l’Europe à la veille de la Grande Guerre de 1914 – 1918. Il suffirait d’une étincelle pour que cette région du monde s’embrase. »

 

[* Le commentateur politique Patrick Seal est l’auteur de plusieurs ouvrages consacrés au Moyen-Orient.]

Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier 



Source et traduction : Marcel Charbonnier


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