Aujourd’hui, samedi 17 janvier, 21ème jour du
massacre, 1199 morts, 5600 blessés ! Rien que de l’ordinaire à
Beit Lahia, une maison, bombardée et détruite sur la tête de ses
habitants, une famille entière a été décimée. Jabalia, même
scénario, 6 morts, la mère et ses 5 enfants viennent de
disparaître dans l’enfer israélien. Une école de l’UNRWA qui
abritait 1600 personnes ayant cru pouvoir échapper à l’horreur.
Erreur, l’Ecole de l’ONU vient d’être bombardée, à 10h30 ce
matin, des morts et de blessés, combien ? on ne le sait pas
encore !
Etant donné qu’Israël nous a habitué à un certain génie de la
manipulation du symbolique, beaucoup d’observateurs
moyen-orientaux pensaient qu’Israël allait arrêter le massacre
avant d’atteindre la barre des 1000 morts. Erreur, Israël a
choisi cette fois de mettre l’accent sur une symbolique bien
plus fondatrice: Israël est le Maître du Moyen-Orient !
La quasi totalité des pays arabes lui ont accordé leur totale
soumission, l’Occident et l’Orient asiatique, y compris la
Chine, lui ont accordé leur totale complicité et donc un soutien
sans faille.
Il ne
reste à Israël qu’à affirmer sa totale détermination à tracer
des lignes politiques nouvelles et symboliques de cet agréable
mélange de soumission et de complicité des uns et des autres. Il
arrêtera le massacre lorsqu’il le décidera.
Un autre
symbole
Par
ailleurs, une autre barre symbolique à été franchie :
21
jours pendant lesquels la puissance destructrice israélienne est
parvenue à détruire infrastructures, habitations, écoles,
université et ôter la vie à plus de 1100 Palestiniens, blesser
près de 4000 autres dont au moins 600 en état critique. Une
puissance de feu inégalée, un massacre méthodiquement exécuté,
un enfer qui fait penser à l’éternité !
Mais, les Gazaouis et la résistance ne se sont pas rendus ! Pas
un seul d’entre eux n’a cherché à fuir durant les courts moments
où le passage avec l’Egypte a été ouvert. Plus extraordinaire,
les Palestiniens coincés en Egypte depuis que le blocus est
imposé à la Bande de Gaza, ont profité de cette courte ouverture
du passage de Rafah pour rejoindre les leurs. La leçon de la
Nakba est prise et le symbole est grand : les Palestiniens ne
quitteront plus leur terre même s’ils doivent en perdre la vie !
Que faut-il en déduire ?
21
jours de résistance, ce sont 15 jours de plus que ce qui a été
nécessaire à l’armée israélienne, en 1967, pour détruire les
armées de l’Egypte, de la Syrie, de la Jordanie et de l’Irak et
occuper la Cisjordanie et la bande de Gaza (22% restante de la
Palestine dont 78% a été occupé en 1948), le Sinaï en Egypte et
le Golan en Syrie.
Je pense qu’il est important de rappeler au monde que résister
est possible.
Il n’y a
pas de limite au fond !
On
croyait que les régimes arabes avaient touché le fond, erreur,
ils ont trouver les moyens de creuser le fond pour descendre
encore plus bas. Depuis la défaite de 1967, quarante ans sont
passés, le nationalisme arabe s’est affaibli, les régimes
autoritaires et archaïques ont su se protéger et rester en
place. Oslo a eu lieu et a engendré l’interminable
comédie dite « processus de paix entre Israéliens et
Palestiniens ». C’est ainsi que par la reconnaissance offerte à
Israël par les représentants des palestiniens, en échange d’un
« processus », le
monstre israélien arrache sa deuxième plus grande victoire
depuis sa naissance en 1948 !
En effet c’est bien ce dit
processus qui a
permis à Israël de retrouver sa respectabilité là où il l’avait
perdue grâce à la résistance palestinienne durant les décennies
qui ont précédés Oslo.
Le président égyptien et plusieurs chefs d’état arabes et
européens ont été informés par les Israéliens de l’offensive qui
allait avoir lieu. Il n’y a pas de doute que le feu vert a été
donné à Israël , bien qu’Israël n’ait besoin que d’un seul feu
vert, celui des Américains.
Amro
Mussa, secrétaire général de la Ligue arabe, ancien ministre des
affaires étrangères d’Egypte, activiste acharné dans les
négociations d’Oslo, a convoqué une réunion des ministres des
affaires étrangères ! Cette réunion, censée préparer un sommet
arabe, n’a abouti qu’à l’envoi d’une délégation à New York afin
de demander au Conseil de sécurité de condamner l’agression
israélienne et prier Israël d’accepter une trêve humanitaire !
Une dizaine de jours sont passés avant que le Conseil de
sécurité ne se réunisse et invite les deux parties à cesser le
feu !
Quand on a demandé à A.Moussa ce qu’il comptait faire pour que
les Arabes réagissent, il a répondu : « Je n’ai pas de baguette
magique ».
L’Egypte, surnommée « le
cœur battant de la nation arabe » dont la principale
préoccupation nationale, ces dernières années, est
d’assurer l’héritage de la présidence du pays au fils Mobarak,
considère que le Hamas est responsable de ce qui arrive à Gaza.
Elle considère aussi que le problème essentiel à régler de suite
est celui de la réconciliation entre Palestiniens ! Elle ne
prendra aucune mesure contre l’agression israélienne, elle
n’arrêtera pas sa fourniture du Gaz à Israël à des prix
privilégiés. Elle mettra plusieurs jours avant d’autoriser
épisodiquement l’entrée des secours par le passage de Rafah sur
lequel elle est souveraine.
Les autres chefs arabes ne feront pas mieux, c’est-à-dire rien,
mise à part la classique indignation de forme. Ils s’avèrent
incapables de se parler et encore moins de faire une déclaration
commune.
A défaut d’une initiative arabe, c’est la Turquie qui s’active!
Grande alliée d’Israël, elle se charge en sa qualité d’héritière
de l’empire Ottoman, de concilier les Arabes
et de raisonner
Israël. Ce dernier renvoie à Istanbul le Premier Ministre
Erdogan les mains vides. lequel dit avoir été humilié !
Le 16
janvier, Une dizaine de pays décident de se réunir à
l’invitation du Qatar. Ils présenteront leur délibération au
sommet économique arabe qui se réunira dans quelques jours au
Koweït. Le président de l’Autorité palestinienne s’excusera de
ne pas pouvoir se rendre à Qatar ! Le ministre des affaires
étrangères qatari déclare qu’Abbas a subi « des pressions » pour
ne pas participer au sommet Gaza de Qatar.
Le diable
est diable parce qu’il se croit bon !
Les
peuples arabes bouillonnent, le massacre se déroule sous leurs
yeux en direct sur les écrans ! ils se sentent impuissants,
trompés, humiliés, trahis… Ils ont l’habitude, ce n’est pas le
premier massacre ni la première humiliation, mais que faire ?
Les peuples ne demandent pas à leurs gouvernements d’aller à la
guerre contre Israël, ils savent que les pays arabes n’en sont
pas capables. Ils attendent un geste, un peu de colère, un
semblant de dignité, un peu de solidarité… Par exemple, rien que
menacer de couper leurs relations diplomatiques avec Israël,
suspendre « l’Initiative
arabe de paix » ou menacer de traduire les responsables du
massacre devant la justice internationale…rien de tout cela n’a
été fait ! Nous
verrons si le président de l’Autorité palestinienne signera la
demande présentée par différentes associations et organisations
de porter plainte contre Israël devant les tribunaux
internationaux !
Il ne
reste aux peuples arabes que la manifestation qui leur sera
autorisée. C’est bon pour se donner une image démocratique et
surtout les manifestations sont des excellents exutoires
thérapeutiques ! Décidément, ces régimes ne semblent pas avoir
compris que la seule soumission à Washington ne suffira pas à
leur survie.
D’ailleurs, leurs propres « maîtres » les méprisent. Vendredi 23
janvier pendant que l’Egypte défend son plan comme le seul
possible et efficace, Israël et les Etats-Unis signent un accord
à Washington pour garantir l’arrêt des trafics d’armes vers Gaza
par les frontières égyptiennes !
Hallucinant. S’agirait-il d’une pure stupidité ou plutôt d’un
simple oubli ? Les « maîtres » auraient-ils pu oublier les
premiers concernés : l’Egypte et son président leur fidèle
porte-parole dans la région? Auraient-ils considéré que la
souveraineté de l’Egypte leur revient ? Cet « incident »,
particulièrement humiliant pour le plus grand pays arabe, a
obligé Mobarak à improviser un discours dans lequel il a essayé
de jouer le rôle d’un président exigeant vis-à-vis d’Israël.
L’écouter donnait envie de rire, mais ce n’était pas drôle !
Quant aux
élites arabes, elles ont oublié que le monde se pense, l’avenir
se prépare et la résistance ça se réfléchit…On comprendra
pourquoi elles sont si silencieuses !
En effet,
des millions d’Arabes descendront dans les rues, ils
contesteront, hurleront, accuseront leurs dirigeants de
trahison. L’Islam radical récoltera les bénéfices, c’est normal,
ce sont les siens ! Seuls les islamistes sont en résistance !
Plus le monstre israélien est monstrueux avec les palestiniens,
plus les islamistes radicaux se renforceront, plus Israël aura
la complicité du monde arabe et non arabe, plus il aura les
mains libres de continuer sa colonisation de la Palestine,
imposer des faits accomplis et rendre impossible la création
d’un Etat palestinien.
Il est vrai que le diable est diable parce qu’il se croit bon !
Nabil El-Haggar,
universitaire,
Université de Lille