Tendances au Moyen-Orient
Clinton avoue:
Washington s'allie à Al-Qaïda pour
renverser Bachar al-Assad
Michel Chossudovsky et Fanian Cunningham
Lundi 12 mars 2012
La secrétaire d'Etat américaine, Mme
Hillary Clinton, a reconnu qu'Al-Qaïda
et d'autres organisations inscrites sur
la "liste terroriste" des États-Unis,
soutiennent l'opposition syrienne. Mme
Clinton a déclaré: "Nous avons un
ensemble très dangereux d'acteurs dans
la région, Al-Qaïda, le Hamas, et ceux
qui sont sur notre liste des
organisations terroristes, qui
prétendent soutenir l'opposition en
Syrie."
Pourtant, la secrétaire d'Etat répète,
dans une interview accordée à la BBC,
que la situation en Syrie est celle
d'une population sans défense, victime
d'«attaques sans relâche» de la part des
forces gouvernementales syriennes.
Il est connu que les tireurs d'élite qui
ont tué des civils au cours de la
dernière année en Syrie appartiennent
aux formations terroristes auxquelles
Mme Clinton fait allusion.
Dès la mi-mars 2011, des groupes
islamistes armés, soutenus secrètement
par les services de renseignements
occidentaux et israéliens, ont mené des
attaques terroristes contre des
bâtiments gouvernementaux. Bien
renseignés, des hommes armés entrainés
et des tireurs d'élite, ainsi que des
mercenaires, ont pris pour cible la
police, les forces armées ainsi que des
civils innocents. Il est prouvé, comme
il est indiqué dans le rapport de la
mission des observateurs de la Ligue
arabe, que ces groupes armés sont
chargés de tuer des civils.
Certes, le gouvernement syrien et les
militaires assument une grande part de
responsabilité. Mais il est important de
souligner le fait que ces actes
terroristes, y compris le massacre
d'hommes, de femmes et d'enfants, font
partie d'un plan
américano-israélo-atlantiste, qui
consiste à appuyer, former et financer
une entité armée à l'intérieur de la
Syrie.
Les propos de Hillary Clinton, à la fin
de semaine dernière, confirment que des
groupes armés attaquent les civils, et
que ces groupes sont terroristes, selon
la définition américaine. Les
déclarations de la secrétaire d'Etat
prouvent que ce qui se passe en Syrie
n'est pas uniquement une violence
exercée par un État contre sa
population, mais plutôt une insurrection
armée. Les propos de Mme Clinton
justifient a posteriori la position
prise par la Russie et la Chine, qui ont
opposé leur veto à un projet de
résolution au Conseil de sécurité, le 4
février, précisément parce que le texte
était fondé sur une notion fausse que la
violence en Syrie était la seule
responsabilité du gouvernement de Bachar
al-Assad.
La secrétaire d'Etat affirme aussi à la
BBC qu'il y a «une très forte opposition
à l'intervention étrangère à l'intérieur
de la Syrie", reconnaissant
implicitement que la population syrienne
est consciente que les opposants dans le
pays sont des mercenaires affiliés à
Al-Qaïda.
Dans le même temps, les alliés des
États-Unis dans le Golfe, notamment
l'Arabie saoudite et le Qatar, ont
séparément fait des déclarations selon
lesquelles ils seraient prêts à envoyer
des armes en Syrie et à soutenir
l'insurrection. Sachant que le
gouvernement de Bachar al-Assad jouit
d'un soutien populaire substantiel, de
telles déclarations à l'intention d'un
pays membre de la Ligue arabe
constituent une ingérence sans précédent
dans les affaires intérieures d'un État
souverain. En effet, les avis juridiques
pourraient faire valoir qu'elles
constituent une agression.
De plus, de telles déclaration sur
l'intention de l'Arabie saoudite et du
Qatar d'armer les insurgés syriens
servent à couvrir le fait que ces pays,
ainsi que la Turquie et Israël
fournissent des armes illégalement à
l'Armée syrienne libre.
Jusqu'à présent, les Etats-Unis
continuent de dire officiellement qu'ils
ne sont pas impliqués dans les
livraisons d'armes, même si Washington a
demandé "un changement de régime" et en
dépit des preuves que les forces
spéciales occidentales, y compris des
agents américains, britanniques et
français, sont activement engagés avec
les groupes d'opposition syriens.
Que de riches régimes fondamentalistes
sunnites du Golfe, non-élus
démocratiquement, soutiennent des
groupes affiliés à Al-Qaïda en Syrie,
pour «mettre en œuvre des réformes
démocratiques", relève de l'ironie.
C'est la même dynamique qui a prévalu en
Libye, où le renversement du
gouvernement de ce pays par l'Occident
et les pays du Golfe s'est soldé par un
effondrement des droits de l'homme et
des conditions sociales.
Une fois de plus, la Syrie est victime
de la même alliance: Washington, Londres
et d'autres puissances de l'Otan,
installés confortablement dans un lit
avec des salafistes tyranniques et
terroristes, sous prétexte de vouloir
soutenir la liberté, la démocratie et
les droits de l'homme.
Bien entendu, le véritable ordre du jour
n'a rien à voir avec les libertés, la
démocratie ou les droits de l'homme. Il
s'agit plutôt pour Washington de
provoquer des changements de régime dans
le monde arabe, et au-delà de réaliser
des objectifs géopolitiques concernant
la maîtrise de l'énergie. L'Irak,
l'Afghanistan, la Libye et la Syrie ne
sont que des étapes sur la carte d'un
monde secoué par des guerres
permanentes. La Russie, la Chine et
l'Iran étant les ultimes cibles.
Washington est manifestement prêt à
utiliser tous les moyens nécessaires
pour réaliser cet ordre du jour: des
guerres injustes, des morts à grande
échelle, et, éventuellement, déclencher
une guerre mondiale qui verrait
l'utilisation des armes nucléaires. Mais
la couverture la plus absurde est sans
doute la "guerre contre le terrorisme",
surtout que les propos de Mme Clinton
prouvent que Washington collabore
désormais ouvertement avec le supposé
«ennemi terroriste», pour provoquer un
changement de régime en Syrie.
Le sommaire des Tendances d'Orient
Les dernières mises à jour
|