Opinion
Adlène Hicheur ou le terroriste malgré lui
Jean-Pierre Lees
© pascal frautschi | Le professeur Jean-Pierre Lees.
«Qu’Adlène soit victime d’une erreur, lui coûtant sa
carrière, serait ignoble!
Mon intime conviction est qu’il est innocent, même si je
n’ai pas de preuve.»
Lundi 18 octobre 2010
J'aimerais par ce billet attirer
votre attention sur le sort de mon collègue et ami le physicien
des particules Adlène Hicheur.
Voici plus d’un an, le 8 octobre
2009, Adlène Hicheur était arrêté au domicile de ses parents à
Vienne, dans l’Isère, puis après plusieurs jours de garde à vue
était inculpé d’association de malfaiteurs en relation avec une
entreprise terroriste. Il est depuis incarcéré à Fresnes en
détention provisoire, un provisoire qui dure car le juge
anti-terroriste Jean-Christophe Teissier est bien sur
convaincu que notre homme s'est livré à des agissements très
graves et mettant en danger la sécurité de l' état et des
citoyens francais. Il est à noter qu’Adlène forme cette
association de malfaiteurs à lui tout seul puisqu’ il est le
seul inculpé dans cette affaire et a été à de nombreuses
reprises présentés par les autorités policières ou judiciaires
comme le prototype du terroriste solitaire.
Adlène a constamment protesté de son
innocence et se débat depuis son arrestation dans un univers
digne de Kafka. Depuis près d'une année toutes les demandes de
mise en liberté provisoire présentées par l’avocate d'Adlène,
Maitre Dominique Bayreuter, sont refusées, sans qu'aucune preuve
tangible ne soit avancée pour étayer les accusations. Sa
détention provisoire a à nouveau été prolongée de quatre mois
fin septembre 2010. L’acte d’accusation est mince : suspicions
de contacts avec Al-Quaida Maghreb Islamique (AQMI) suite à des
conversations d’Adlène sur des forums internet avec un
interlocuteur suspecté par les services de renseignements
français d’être un activiste de l’AQMI.Oui, en France, le
pays qui se prétend la patrie des droits de l'homme, on peut
aujourd'hui se retrouver incarcerer pendant des mois, voir des
années, pour avoir surfé sur un forum "suspect".
Ses collègues directs, beaucoup de
physiciens, comme sa famille et ses amis ont naturellement été
choqué par son arrestation et sont inquiets de son maintien en
incarcération. Ils s’inquiètent en particulier de l’avenir de ce
jeune physicien et de la possibilité qu’il ait, s’il était
finalement innocenté des charges qui pèsent sur lui, de
poursuivre sa carrière.
De nombreux rapports internationaux
on attiré l’attention sur l’arbitraire de la législation anti
terroriste française, dont les critères sont peu exigeants en
matière de preuve lorsqu’il s’agit de décider de l’arrestation
de suspects ou de l’ouverture d’une instruction par un juge. Sur
la base d’indices minimes, voire inexistants, elle permet le
maintien en détention provisoire des suspects pendant des mois,
voire dans certains cas pendant des années, tandis que les liens
étroits entre les juges d’instruction spécialisés et les
services de renseignement dans les affaires de terrorisme
mettent sérieusement à mal le droit des accusés à un procès
équitable. Pour comprendre mes inquétudes et mes doutes, je vous
invite à consulter l’excellent rapport d’human rights watch,
téléchargeable à ‘l’adresse suivante :
http://www.hrw.org/french/reports/2008/france0708/
Publié le 18 octobre 2010 avec l'aimable
autorisation de Jean-Pierre Lees
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