Opinion
Pourquoi les
Africains ont-ils honte du culte de
leurs ancêtres ?
Jean-Paul Pougala
A chacun
de prier ses ancêtres.
Et ne te
moque pas de moi quand je prie les
miens, sinon, je ferai de même quand tu
prieras les tiens. Surtout, ne viens pas
me dire que je vais céder à tes
moqueries au point de venir t'aider à
prier tes ancêtre. Je ne suis pas con à
ce point là. A moins que 500 ans de
domination et d’humiliation aient porté
une lésion à mon cerveau
Jeudi 5 janvier 2012
L'Afrique est le
berceau de l'humanité. C'est-à-dire que
les Africains sont les géniteurs de tous
les 7 milliards d'hommes et de femmes
qui peuplent la planète terre. Sur le
plan scientifique, ceci est prouvé
notamment par l'ADN. La conséquence de
ce lien entre l'Afrique et ses enfants
éparpillés partout dans le monde est
l'exportation de la pratique religieuse
africaine sur toute la planète. C'est en
effet la seule véritable religion
universelle du monde qui n'a eu besoin
d'aucun pasteur, d'aucun missionnaire,
d'aucun imam pour être présente ici ou
là. C'est la seule religion qui s'est
rependue sur tous les continents sans un
seul mot, sans une phrase de
prosélytisme ou de propagande à la
recherche de convertis, sans un mort,
sans la moindre violence ? La religion
africaine est dès lors la mère de toutes
les religions, non seulement parce
qu'elle est la plus ancienne, mais aussi
et surtout parce que c'est celle qui
résiste le mieux au temps, à l'espace et
à la virulence des nouvelles religions
qui ont tout fait pour l'effacer. Mais
pourquoi les Africains eux-mêmes
donnent-ils la fâcheuse impression
d'avoir honte des croyances de leurs
ancêtres ?
A- LA FAUTE DES
INTELLECTUELS AFRICAINS
Dans sa pièce de
théâtre publiée en 1946 intitulée:
Malatesta,
Henry de Montherlant (1895-1972) a écrit
: "Vivent
mes ennemis ! Eux du moins, ne peuvent
pas me trahir". Et Bernard Werber de
renchérir disant : "Seuls vos vrais amis
savent où vous frapper pour que ça fasse
mal". Le peuple africain a été trahi par
ses propres intellectuels. La religion
africaine a été bradée pour un bout de
pain mal garni par ses propres fils
présumés éclairés, supposés la protéger.
Alors que l'Afrique était encore sous
occupation européenne, la plupart des
intellectuels africains ont mis tous
leur talent à aider à pérenniser sa mise
sous tutelle.
Le plus illustre
d'entre eux s'appelait Léopold Sédar
Senghor. Voici ce qu'il conseille en
1945 aux missionnaires catholiques pour
dompter son peuple; il cite son mythe,
il cite la phrase d'une circulaire
écrite un siècle plutôt (1847) par le
prêtre Libermann à ses missionnaires
envoyés en Afrique : "soyez nègres avec
les nègres afin de les gagner à Jésus
-Christ". Cette phrase des plus
humiliantes et grotesques se passe de
commentaire. Mais Senghor ne va pas
s'arrêter en si bon chemin. Il va
ajouter : " Le rôle du catholicisme est
de dégager plus nettement la personne de
la famille, Dieu des ancêtres ; (...)
Par le Christ, Dieu fait chair, qui
empêche ainsi le Catholicisme de tomber
dans l'abstraction formaliste. M.
Griaule me dira que je parle en croyant
et il n'aura pas tort." Alléluia. En
d'autres termes, pour Senghor,
l'individualisme et l'égoïsme européens
doivent remplacer la solidarité et la
générosité africaine, doivent se
substituer à la "famille africaine"
qu'il juge comme une abstraction
formaliste, c'est-à-dire une illusion,
une utopie entretenue par la tradition,
par le conformisme. Pour lui, un frère
doit être un vrai frère biologique, un
cousin doit être un vrai fils biologique
de l'oncle direct ou de la tante et non
cette "abstraction formaliste" africaine
qu'il déteste.
Mais le plus grave
c'est ce qui suit "dégager Dieu des
Ancêtres" surtout lorsqu'on le met en
relation avec la citation précédente de
Libermann "être nègre avec les nègres".
Senghor est un homme très intelligent.
Il réussit là où les missionnaires
avaient toujours échoué : en prônant de
dégager le Dieu chrétien des ancêtres,
son idée est de faire émerger cette
figure monothéiste pour remplacer en
tout et pour tout, la religion des
africains par celle des Européens. Il
sait très bien que pour les Africains,
il n'y a pas de Dieu. Les ancêtres sont
leurs divinités, sont leurs Dieux. et
c'est à eux qu'ils vouent leur culte.
Offrir un Dieu aux Africains c'est
déchoir leurs ancêtres de leur position
de divinité. C'est couper la relation
fusionnelle qui lie un africain avec son
mort; C'est le tuer, puisqu'il cesse
désormais d'être lui-même. Les Africains
cessent d'être eux-mêmes sans savoir
exactement ce qu'ils sont devenus. La
seule chose certaine est qu'ils sont
devenus dès lors très vulnérables parce
qu'ils doivent attendre que le nouveau
maître leur explique ce qu'ils sont, ce
qu'ils seront.
C'est ce rôle que
d'aucuns qualifient de "traitre",
d'autres de "bon nègre", d'autres encore
de "suppôt colonial", ou même de
"sous-préfet de la France", que la très
grande majorité d'intellectuels
africains a décidé d'adopter, vue la
très forte récompense que Senghor a
obtenu en son temps : Président de la
République. L'épilogue de la crise
ivoirienne en 2011 n'est pas là pour les
démentir. Ce qui fait froid dans le dos
c'est d'imaginer qu'à la même époque
plusieurs intellectuels africains
s'étaient retrouvés à Dakar au Sénégal
pour étudier comme le Docteur Félix
Moumié du Cameroun de 1945 à 1947 et
très probablement communiquaient avec
leur frère aîné Senghor (député du
Sénégal à l'Assemblée Nationale
Française) sur les voies et moyens pour
obliger la France à reconnaître
l'indépendance des pays africains. On
connait la fin de l'histoire :
assassinat de ces africains trop
idéalistes peut-être trop naïfs de
simplement rêver d'une Afrique libre.
(Dr. Moumié meurt, empoisonné par la
France à l'âge de 35 ans).
Les intellectuels qui
sont ceux qui partout dessinent
l'architecture et l'agencement des
croyances religieuses en écrivant par
exemple des livres saints devant servir
de référence aux croyants, en Afrique,
ont démissionné de leurs
responsabilités. Ce sont eux les
premiers qui se sont engouffrés dans les
offres religieuses élaborées par leurs
collègues des autres continents.
Ces déserteurs d'un
nouveau genre, souvent très instruits
ont laissé derrière eux un champ de
ruine à la merci des idées venues
d'ailleurs, des croyances importées et
qui se battent férocement pour avoir ce
territoire abandonné, d'où les violences
islamistes et chrétiennes de noël 2011
et les jours suivants au Nigéria.
B- RELIGION ET
SOUVERAINETE : LE CAS DU JAPON
Peut-on être
réellement indépendant en adoptant des
religions imposées avec de la violence
et accompagnée par de la soumission et
l'esclavage ? Le Japon, a érigé la
religion d'origine africaine du culte
des morts, au rang de religion d'état en
1868, les prêtres shintoïstes payés par
l'état, chaque habitant devant
s'inscrire comme membre d'un sanctuaire
non loin de son domicile. Tout ceci a
limité fortement l'installation du
christianisme au Japon.
Au 5ème siècle de
notre ère, les Japonais sont
culturellement très complexés par
rapport à leurs voisins Chinois qui ont
une religion très forte et structurée :
le Confucianisme depuis déjà plus de 8
siècles alors que les Japonais
pratiquent encore la religion d'origine
africaine non structurée. Chaque village
japonais pratique le culte des morts,
sans qu'il y ait une synergie entre eux,
avec des rites très différents. Pour
éviter que le peuple japonais se
convertisse en masse dans cette nouvelle
religion venue d'ailleurs, les
intellectuels japonais se réunissent et
posent très clairement la question :
"peut-on se développer et devenir un
pays fort et puissant en cédant sur
l'essentiel, sur la spiritualité venue
d'ailleurs? peut-on se dire patriote et
avoir honte des pratiques religieuses de
ses propres ancêtres ? La réponse à ces
deux questions est NON. Mais comment
faire ? Le peuple a besoin de croire et
est toujours plus naïvement séduit par
l'offre toujours alléchante venue
d'ailleurs. La réponse est toute trouvée
: regrouper et harmoniser le culte des
ancêtres des différents villages, pour
ne plus laisser à chaque communauté de
continuer seul et sans orientation dans
une jungle religieuse où elles sont une
proie trop facile pour les lucioles des
croyances importées. C'est cette
harmonisation qui prend le nom de
Shintoïsme. Le mont Fuji est désigné et
devient sur le plan national, le mont
sacré de référence pour la nouvelle
religion. Au 21ème siècle, les Japonais
de Tokyo sont même allés plus loin dans
leur pratique religieuse, en dédiant une
chambre entière dans leurs maisons pour
ceux qui en ont les moyens, au culte des
ancêtres à qui on fait des offrandes, de
la viande, de l'eau, du pain. Le
Japonais dialogue au quotidien avec son
mort, avec ses ancêtres. La conséquence
est qu'il est en paix avec lui-même et
avec les autres. Le pays est la
troisième puissance du monde sans la
grande violence, qu'on retrouve dans les
pays occidentaux.
C- ET L'AFRIQUE ?
Le christianisme et
l'Islam sont des religions introduites
en Afrique avec la violence. La religion
africaine a démontré d'être une religion
de la paix, son fondement est l'harmonie
entre les membres de la société. C'est
une religion de dialogue et de pardon.
C'est ce qui explique que malgré les
torts causé par les Européens aux
autochtones d'Amérique , aux Africains,
aux autochtones d'Australie ou de
Papouasie, aucun de ces peuples n'a
jamais développé le moindre sentiment de
vengeance et même pas de haine à long
terme. La religion africaine ne professe
pas l'éthique, elle est éthique et
morale. ses adeptes, convaincus qu'ils
deviennent des divinités après la mort,
prennent de la hauteur dans leurs
comportements au quotidien.
La jeunesse africaine
doit se préparer à reprendre son destin
en main, parce que leurs aînés ont
lamentablement failli même là où on
n'avait pas besoin de cerveau pour
avancer : la religion.
Pour éviter les
scénarios de terrorisme chrétien et
musulman sur le sol africain, il existe
une seule solution durable, à mon humble
avis, l'Afrique doit débuter sa
déconstruction des vérités venues
d'ailleurs sans aucune prise sur son
environnement, et cesser d'avoir honte
de ses croyances ancestrales, se livrant
de temps en temps en cachette à des
pratiques grotesques qu'il croit être la
religion africaine, mais qui au font, ne
sont plus que la caricature de
l'original. Les gouvernements doivent
avoir le courage de mettre les
spécialistes au travail pour reformuler
en l'adaptant au contexte moderne notre
propre religion.
D- LA RELIGION
AFRICAIN EST-ELLE RETROGRADE ?
La religion est
plutôt en avance par rapport aux
religions monothéistes, telle l'islam et
le christianisme parce qu'elle a réussi
à exorciser complètement la peur de la
mort. Le fait que les morts deviennent
une divinité permet une sorte de
régulation des débordements possibles,
garantissant ainsi la sécurité et la
sérénité de la communauté. Car chacun
est porté à s'auto réguler et éviter la
radicalisation dès lors qu'il sait que
son père, sa mère, son grand-père etc.
doit devenir très bientôt une divinité.
Les bombes des chrétiens et des
musulmans deviennent une inutilité et
une probabilité nulle dès lors qu'on
sait que celui qu'on fera passer de la
vie à la mort deviendra une divinité
capable de nous punir sur nos actions
mauvaises, ou alors de nous protéger de
tous les maux, que nous récitons et
promettons dans nos recueillements de ne
jamais les commettre. En d'autres
termes, dans la religion africaine, le
croyant ne peut pas demander la
protection d'un mal qu'il a pu
commettre, ce qui le décourage d'emblée
d'y recourir comme raccourci pour
résoudre ses problèmes. Ceci contraste
avec l'Islam et le christianisme qui au
contraire promettent à ceux qui
commettent du mal aux autres une
impunité totale, basée sur le pardon
inconditionnel, il suffit de quelques
prières et le mal est lavé. On peut donc
recommencer son forfait.
La religion qui à
priori est une question anodine et
intime, est pourtant décisive pour
l'affirmation des peuples. La Pape
Jean-Paul II s'était battu afin que le
christianisme soit inscrit dans le
traité européen comme le fondement de
l'identité culturel européenne. On ne
peut que lui donner raison, puisqu'il
rendait ainsi hommage aux croyances de
ses ancêtres et le revendiquait. La
vraie question était plutôt de savoir
quelle place dans cette identité
culturelle de l'Europe les Africains
chrétiens y trouvaient-ils ? La honte
qu'ont certains africains de leurs
ancêtres a transformé ce qui reste de
leurs croyances en folklore pour
charlatans à la recherche de quelques
âmes naïves à arnaquer avec des
prétendues révélations tout aussi bidon
sur l'avenir. Les Etats doivent
reprendre la main en Afrique pour fixer
la ligne rouge marquant la différence
entre les effets bénéfiques de la
mythologie religieuse de nos ancêtres et
la course au fric qui envahit toutes les
couches de la société africaine dite
traditionnelle avec la prétendue
sorcellerie dans toutes les sauces et
les injustes accusations des ennemis
choisis pour porter le chapeau sur tout
malheur qui peut subvenir.
E- EN AFRIQUE COMME
AU JAPON
Comme exprimé plus
haut, le Shintoïsme Japonais est une des
variantes de la religion africaine La
différence entre le Japon et l'Afrique
est que la bas, les intellectuels n'ont
pas eu honte de leurs croyances. C'est
un rapport, un dialogue direct avec son
mort que rien ne peut remplacer. Le
japonais prend sa sérénité de son mort à
qui il voue un culte quotidien, avec qui
il dialogue et se sent en paix d'abord
avec lui-même et ensuite avec la société
entière. c'est le même scénario que nous
retrouvons dans la plupart des villages
africains où la chambre des morts est
remplacée par la foret sacrée, par
l'arbre sacré en dessous duquel les
sacrifices sont déposés, de l'huile de
palme versée à même le sol ou de morceau
de viande de chèvre que les fourmis en
feront un vrai festin.
F- QUELLE RELIGION
AFRICAINE AU 21ème SIECLE ?
Au moment où on
assiste à la plus forte urbanisation de
l'Afrique, avec des villages qui sont en
passe de devenir des villes, les états
africains devraient se concerter pour
harmoniser l'offre religieuse africaine,
avec la création dans toutes les villes
africaines, d'une sorte de jardin
botanique d'un genre nouveau, devant
servir au recueillement et aux
sacrifices que les croyants africains et
les convertis d'autres continents
pourront venir trouver un moment de paix
en écoutant bruit des oiseaux ou tout
simplement le ruissèlement de la rivière
artificielle si importante dans les
croyances africaines comme instrument de
purification.
Si au contraire rien
n'est fait, le désarrois religieux des
populations africaines continuera à
créer cette espèce de no man's land, la
terre de personne, une sorte de
supermarché des âmes où tous les chacals
du monde viendront à la chasse de leurs
proies pour alimenter d'abord leurs
caisses et leurs gloires avec des
conséquences souvent fâcheuses entre les
prédateurs comme les événements tristes
de Abuja au Nigéria le jour de noël et
les jours suivants pour la vengeance.
L'Afrique n'a rien à
voir dans des batailles de conquête et
de positionnement des religions
importées. Sans la religion de nos
ancêtres, le nomadisme spirituel dans
lequel vivent les Africains depuis trop
longtemps sera toujours un élément de
déséquilibre sociétal et de déchéance
culturelle. Plus l'état cède sa place
aux religions importées qu'elle ne peut
pas maîtriser et plus il descend en
enfer pour la gestion courante de la vie
de ses citoyens.
G- QUELLE MODEL DE
SOCIETE POUR UNE AFRIQUE BIENTOT
PROSPERE L'Afrique deviendra dans les
prochaines années une des principales
puissances économiques du monde . La
religion que nous adopterons formatera
la société dans laquelle nous voulons
vivre. Les deux principales religions
importées ont des choses en commun,
contraires à nos intérêts :
- le fatalisme : les
africains qui ont subit le travail forcé
ont tendance à associer au travail
l'explication de punition, de
soumission. Si une religion peut le
consoler en attribuant toutes les causes
à un dieu. Il n'en reste pas moins que
notre priorité est de mettre les
personnes au travail, c'est d'amener les
jeunes à aimer le travail. C'est
d'encourager les jeunes à créer le
travail afin d'être maîtres de leurs
destins. Pour l'Afrique, le fatalisme de
ces deux religion est plutôt nocif.
- triomphe de
l'individu sur la société, sur la
communauté. La richesse la plus
insolente du monde peut côtoyer la
misère la plus criante sans gêner
personne à New-York ou à Dubai. La
pauvreté est même vantée comme une
vertu. Ainsi, Dieu ne préfère-t-il pas
les pauvres aux riches ? Dans tous les
cas, ces deux religions ont besoin qu'il
y ait des pauvres afin que le riche
puisse avoir l'opportunité de laver sa
conscience en donnant quelques miettes.
Notre objectif en Afrique est de fuir la
pauvreté à vitesse grand V.
- Manque de
patriotisme : Les dettes de l'état
japonais sont totalement absorbées par
les entreprises japonaises qui dans le
Shintoïsme, évite que ce soit quelqu'un
en dehors du groupe à venir résoudre les
problèmes financiers de leur état, au
moment où en Occident, ce sont des
individus qui spéculent sur le chute de
leur gouvernement, qui parient sur leur
déclin à eux tous. Le jour où ils ont
compris qu'ils pouvaient gagner quelques
dollars en plus en déplaçant les usines
vers la Chine, ils se sont tous
précipités à fermer les entreprises en
Occident sans se préoccuper des dommages
que cela pouvait créer à la société qui
leur avait donné tant de chance et de
fortune. Le plus ridicule est que mêmes
les Etats s'y sont mis. On a ainsi vu
l'Etat Français actionnaire dans une
grande compagnie, délocaliser les
parties administratives et comptables
vers l'Inde en mettant au chômage des
centaines de ménages de Français.
Est-ce le genre de
modèle de développement que nous voulons
pour l'Afrique ? Je ne pense pas. Nous
devons revenir au culte de nos ancêtres
afin de retrouver cette solidarité
ancestrale qui a fait notre force et
garanti l'équilibre de notre société
même durant les dures périodes de
l'oppression et de l'humiliation de
l'occupation européenne. La prospérité
du continent africain ne sera effective
et stable que si elle impliquera tout le
monde, comme tout un village. Arrêtons
de singer des modèles de développement
que nous ne maitrisons pas et surtout,
des modèles que même celui qui nous l'a
apporté ne le maitrise pas lui-même, vue
la crise profonde dans laquelle lui-même
se trouve, afin de réinventer notre
propre modèle de développement humain en
partant de nos villages, en commençant
par faire de nos campagnes le premier
cercle de production et de distribution
de la richesse. Nos villes ne pourront
que suivre la vague ainsi créée et
maîtrisée.
Si nous ne revenons
pas à nos fondamentaux, le déséquilibre
entre l'économie florissante et une
poche de miséreux sera inévitable.
L'individualisme et l'égoïsme des
religions monothéistes dans lesquelles
personne n'a de compte à rendre à
personne d'autre qu'à Dieu ont fabriqué
le Dieu Argent.
H- CONCLUSION
Les Africains qui
vivent en Europe ont entendu au moins
une fois cette phrase "tu n'es pas comme
les autres, tu es plus intelligent" La
plupart de ceux qui sont chrétiens ou
musulmans réagissent comment ? Ils se
sentent flattés. Ils se sentent élus et
très souvent, ils en rajoutent. Par
contre ceux qui pratiquent le culte des
morts réagissent par l'indignation .
Parce que ces autres jugés
peu-intelligents c'est une partie de
nous-mêmes, c'est nous mêmes qu'on
insulte. car selon nos croyances, nous
ne sommes rien dans notre groupe, nous
avons beau exceller dans le monde
entier, mais tant que notre peuple est
piétiné, c'est nous-mêmes qui sommes
piétinés. Les prisons européennes sont
pleines à craquer d'Africains qui ont
commis un seul tort, celui dit de
"l'immigration clandestine" et les
autres africains qui sont en règle ou
qui ont la nationalité dans ces pays
sont convaincus que cela ne les regarde
pas. Erreur. Nous devons à chaque fois
faire un retour aux sources dans nos
propres racines, dans nos propres
traditions et croyances pour chercher à
interpréter tout ce qui nous arrive. On
comprendrait alors très vite que ces
sans-papiers incarcérés sont une partie
de nous-mêmes. Qui sommes-nous ? Nous
sommes ce qu'est notre famille. Nous
sommes ce qu'est notre pays. Nous sommes
ce qu'est notre continent. S'il est
pauvre, c'est nous qui sommes pauvres.
S'il est humilié, c'est nous tous qui le
sommes.
Lorsqu'on trahit la
mémoire de ses ancêtres on peut tout
trahir. Lorsqu'on trahit ses propres
morts on ne peut reculer devant rien
pour ses intérêts personnels. Ceux qui
ont honte de nos ancêtres sont une
indication de ceux sur qui nous ne
pouvons baser l'espoir de la renaissance
africaine. L'Afrique fera bientôt partie
de ceux qui comptent dans le monde . Se
présentera-t-il à ce rendez-vous en
revendiquant fièrement son authenticité
ou en singeant les autres? Les langues
africaines feront-elles partie de cette
fierté ? Mais existera-t-il une Afrique
digne sans sa religion ?
Jean-Paul Pougala est Camerounais et
Directeur de l'Institut d'Etudes
Géostratégiques de Genève en Suisse
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