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CCLJ
Un parfum d’élections anticipées…
Ilan Greilsammer
Netanyahou,
premier ministre? - Photo CCLJ Si,
comme nous l’indiquent les derniers sondages parus dans la
presse israélienne, seulement 3% de la population souhaitent voir
Ehoud Olmert rester Premier ministre, et 1% voudrait voir Amir
Peretz à la tête du gouvernement, force est de constater que le
leadership du pays est devenu particulièrement impopulaire.
L’un des commentateurs de ce sondage étonnant,
à qui l’on demandait si les deux dirigeants pourraient « se
relever » d’une telle situation, a répondu que c’était
pratiquement impossible, à moins d’un événement
exceptionnellement positif, comme la libération soudaine des
trois soldats prisonniers ou la reprise effective du processus de
paix. Autant parler de la venue du Messie !
C’est un fait : les deux partis au pouvoir, Kadima et les
Travaillistes, sont en très mauvaise posture. Les révélations
concernant l’impréparation totale du pays à la seconde guerre
du Liban et le caractère amateur de la conduite de cette guerre,
le fait que, plusieurs mois après la fin des hostilités, le
territoire n’est pas mieux préparé qu’en juillet 2006 à une
attaque éventuelle venue du Nord, la vague de scandales à
consonance sexuelle ou financière qui frappe l’équipe
dirigeante, tout cela fait très, très mauvaise impression.
Du côté travailliste, beaucoup d’espoirs sont placés dans les
primaires qui doivent, au mois de mai, élire le nouveau dirigeant
du Parti. Les deux principaux personnages en lice pour remplacer
Amir Peretz, les ex-généraux Ami Ayalon et Ehoud Barak, sont
censés, aux yeux des militants, donner une nouvelle vie au parti
de centre-gauche. Chacun des deux hommes a sa chance, même si
Ayalon jouit d’un léger avantage. Un troisième candidat, Ofir
Pinès (qui a démissionné du gouvernement car il s’opposait à
l’entrée de Libermann dans la coalition), pourrait bien se
rallier à Ami Ayalon.
Mais c’est surtout le parti Kadima qui souffre actuellement de
l’incurie de son leadership. N’oublions pas que cette force
politique avait été établie par Ariel Sharon, juste avant sa
maladie, par l’association d’éléments venus de la droite, du
centre et de la gauche modérée. Devant la chute catastrophique
de Kadima dans les sondages, et la bonne tenue du Likoud, les
anciens membres de ce dernier risquent fort d’être tentés de
faire amende honorable et de retourner au bercail… Déjà,
Benyamin Netanyahou multiplie les manœuvres pour tenter de
convaincre les anciens Likoud de quitter leur navire en train de
sombrer et les faire revenir à leur maison mère. Dans ce but, on
peut noter une très nette inflexion des positions du leader de la
droite en direction du centre : paroles plutôt aimables à l’égard
des Palestiniens, évocation de concessions douloureuses, appel à
une reprise du processus de paix, « Bibi » Netanyahou fait feu
de tout bois… Déjà, le frère de Tsipi Livni, la ministre des
Affaires étrangères, a annoncé à la télévision d’un air
contrit son retour au parti fondé par Menachem Begin. De tels
ralliements risquent de faire boule de neige, et il suffirait que
11 députés Kadima fassent scission et rejoignent le Likoud pour
que Netanyahou soit sacré Premier ministre sans même avoir
besoin de nouvelles élections !
A l’heure actuelle, tout le monde attend le Rapport de la
Commission Vinograd sur la guerre du Liban. Ce rapport risque d’être
assassin à l’égard du Premier ministre. Des fuites indiquent déjà
qu’il sera d’une sévérité exceptionnelle à l’égard du
trio Olmert-Peretz-Haloutz. L’un des scénarios les plus
plausibles est que les députés de Kadima, de plus en plus
anxieux face à l’impopularité extrême de leur leader, décident
de le forcer à démissionner, et le remplacent par une
personnalité bien considérée par le public, comme par exemple
Tsipi Livni. D’un autre côté, on peut se demander combien de
temps cette situation pourra durer. Un parfum d’élections
anticipées flotte dans l’air et, malheureusement pour la gauche
et le Camp de la paix, très grandes sont les chances du Likoud et
de Netanyahou de l’emporter.
Ilan Greilsammer, correspondant
israélien
© CCLJ 2005
Publié avec l'aimable autorisation du CCLJ
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