Opinion
Qui sera la Libye
de demain ?
Hedy
Belhassine
Vendredi 2
septembre 2011
50 mille bombes, 50
mille morts. Kadhafi toujours vivant.
Fallait-il faire la guerre au prétexte
que le dictateur est fou ? Car la chose
est entendue, depuis quarante ans les
observateurs et spécialistes de la
pathologie du pouvoir nous assurent
qu’il est maboul à enfermer dans sa
guitoune. Le Guide agité du bocal
sera-t-il finalement camisolé par un
autre malin patient ?
On se souvient que Mouammar dans un
moment de lucidité, avait jadis estimé
que son collègue français était un peu
dérangé. Il tenait du camping de Marigny
et de l’Elysée que le Président était à
soigner. Qui mieux qu’un fou pour juger
de la folie d’un autre fou ?
Restons lucide et équitable, le rôle du
Président instrumentalisé est
secondaire. Reconnaissons le mérite de
l’instigateur Général - « le philosophe
est le spécialiste des généralistes » -
qui a libéré les arabes de la
quadragénaire honte que leur inspirait
le clown de Tripoli.
Dans ce monde de dérangés, de
néoconservateurs pétro-givrés, de
sionistes terrifiants, de philosophes
déjantés, de nucléaristes acharnés, de
va-t-en guerres exaltés, d’hominidés
écervelés, la Libye du Kadafou était un
refuge où se précipitaient tous les
aliénés de la terre. Les palais du roi
des fêlés abritaient le gotha des
psychopathes cupides, sans vergogne. Où
vont-ils trouver asile à présent ? Que
va devenir la Gouvernance Mondiale sans
bouffon ? Ce régime insupportable était
indispensable à l’équilibre
international ; c’était le maître étalon
de la gouvernance vulgaire, l’exemple de
ce que la richesse peut produire de
pire. Qui demain prendra sa place ?
L’Algérie est sur les rangs. Elle a tous
les superlatifs de la fonction :
fortune, corruption, gabegie. Sa
jeunesse se jette à l’eau sur des
radeaux d’infortune, ses chômeurs s’entretuent,
ses anciens meurent faute de soins. De
1992 à 2002, les algériens se sont entre
massacrés. Combien ? Nul ne le sait
exactement ; plus de cent mille,
peut-être plus de deux cent mille…
Hommes, femmes, enfants. De bons
musulmans, abattus ou égorgés par des
takfirites illuminés. Dix ans de
cauchemar absolu. Puis dix ans
d’accalmie relative. Mais voici que la
bête immonde montre à nouveau son
museau. Le pays vient de connaître un
ramadan de sang.
Le plus spectaculaire attentat du mois
sacré est celui de Cherchell. La ville
Phénicienne abrite depuis soixante dix
ans une Académie militaire qui a formé
plusieurs générations d’officiers
français, puis algériens.
Le 27ème jour de ramadan, alors que les
cadets se rassemblent au réfectoire pour
rompre le jeûne, un kamikaze se fait
exploser. Les survivants se précipitent
au secours des blessés lorsque
surgissant à moto, une seconde bombe
vivante vient parachever l’horreur.
Je songe à relire « L’attentat » d’alias
Yasmina Khadra. Le grand écrivain est un
ancien officier de Cherchell. Aidera
t-il à comprendre… Qui et pourquoi ? En
chaque attentat il y a un message de
chantage. Quel est celui de la nuit du
destin ?
En 2012 la France commémorera la paix
d’Evian et l’Algérie ses cinquante
années d’indépendance. Souhaitons que
l’une ne fasse plus la guerre et que
l’autre soit enfin réconciliée avec
elle-même pour affronter tous les
insensés de la terre en quête d’un
nouvel asile.
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