Actualités du droit
Nouveau crime de
l'OTAN en Afghanistan :
Dix enfants tués
Gilles
Devers
Lundi 8 avril 2013 Les troupes criminelles de l’OTAN ont
encore frappé en Afghanistan, et le
bilan est lourd : dix enfants morts et
une femme. Ils étaient dans leur maison,
et la maison a été bombardée. Les faits sont établis, et ont été
condamnés par Hamid Karzaï.
La scène s’est passée dans l’Est du
pays, province du Kunar, district de
Shigal. Les troupes afghanes avaient
lancé depuis le sol une attaque contre
un poste tenu par les troupes
résistantes. Les heurts étaient
violents, et ont causé la mort de quatre
soldats afghans et d’un civil US, venu
renforcer le commandement.
Le commandement a perdu son sang-froid,
et les hélicoptères de l’OTAN ont été
appelés pour bombarder. Ils ont ciblé
une maison, dans la zone d’habitation :
bilan dix enfants morts et une femme.
Un journaliste de Reuter, présent, a
reçu les explications des forces de
sécurité afghanes : « On nous tirait
dessus depuis plusieurs maisons de la
zone. Un Américain (Ndr : un
Etatsunien) a été tué et plusieurs
de nos hommes blessés. La force de la
coalition a répondu par un bombardement
».
Et d’ajouter : « Nous ne savions pas
qu'il y avait des femmes et des enfants
dans la maison. Les talibans les ont
utilisés comme des boucliers ».
De tels faits appellent quelques mises
au point.
1/ L’OTAN a obtenu de l’ONU de débarquer
en Afghanistan pour répondre à Al Qaeda,
mais elle n'a aucun mandat pour éliminer
les Talibans.
2/ En février, à la suite d’un massacre
– dix femmes et enfants tués dans le
Kunar – Hamid Karzaï avait interdit à
ses forces armées de solliciter l'appui
aérien de l'OTAN. Il y a donc un refus
d’appliquer les ordres militaires reçus.
3/ Après la mort des soldats et du
conseiller étatsunien, les troupes
pouvaient se mettre en repli. Elles
n’étaient pas menacées. Le bombardement
est donc une représaille, et les
représailles sont interdites par
l’article 33 al 3 de la IV° convention
de Genève «
Les mesures de
représailles à l'égard des personnes
protégées et de leurs biens sont
interdites ».
Dans le
commentaire officiel de la Convention,
le Comité International de la Croix
Rouge (CICR) ajoute : « L'interdiction
des représailles constitue une garantie
en faveur de toutes les personnes
protégées, qu'elles se trouvent sur le
territoire d'une Partie au conflit ou
sur un territoire occupé. Elle n'est
subordonnée à aucune condition et son
caractère impératif exclut toute
interprétation tendant à admettre
l'existence de la réserve tacite des
nécessités militaires.
Il convient
d'insister sur le caractère solennel et
inconditionnel de l'engagement contracté
par les Etats parties à la Convention »..
4/ Le bombardement visait une maison
d’habitation dans un village,
c'est-à-dire que les enfants ont été
tués chez eux. La thèse du bouclier
humain ne tient pas, car il est interdit
de viser des biens civils, surtout dans
une zone d’habitation, et alors qu’il
est prévisible que l’attaque causera des
victimes civiles. Aucune nécessité
militaire ne l’imposait. Ce fait, à lui
seul, qualifie le crime.
Selon le statut de la Cour Pénale
Internationale, sont des crimes de
guerre :
8,2,b,ii : Le fait de diriger
intentionnellement des attaques contre
des biens de caractère civil,
c'est-à-dire des biens qui ne sont pas
des objectifs militaires ;
8,2,b,iv : Le fait de diriger
intentionnellement une attaque en
sachant qu'elle causera incidemment des
pertes en vies humaines dans la
population civile, des blessures aux
personnes civiles, des dommages aux
biens de caractère civil ou des dommages
étendus, durables et graves à
l'environnement naturel qui seraient
manifestement excessifs par rapport à
l'ensemble de l'avantage militaire
concret et direct attendu ;
8,2,b,v : Le fait d'attaquer ou de
bombarder, par quelque moyen que ce
soit, des villes, villages, habitations
ou bâtiments qui ne sont pas défendus et
qui ne sont pas des objectifs
militaires.
Selon le CICR, ce principe de précaution
dans l’attaque est reconnu comme étant
de droit coutumier, c’est-à-dire
opposable même sans texte (Règle 15)
: « Les
opérations militaires doivent être
conduites en veillant constamment à
épargner la population civile, les
personnes civiles et les biens de
caractère civil. Toutes les précautions
pratiquement possibles doivent être
prises en vue d’éviter et, en tout cas,
de réduire au minimum les pertes en vies
humaines dans la population civile, les
blessures aux personnes civiles et les
dommages aux biens de caractère civil
qui pourraient être causés incidemment
». Le CICR ajoute : « Les commandants
militaires responsables de planifier, de
décider ou d’exécuter des attaques
doivent nécessairement prendre leurs
décisions en se fondant sur leur
évaluation des informations de toute
origine dont ils disposent ».
Cette attaque est
donc un crime de guerre, et les
criminels sont les commandants de
l’OTAN. Bien sûr, la justice ne sera pas
saisie, et cette impunité est
inadmissible.
Mais le pire est
cette accoutumance au crime. Dans
l’opinion occidentale, que vaut la vie
d’un enfant afghan ? Ce qui conduit à
une autre question, qui deviendra de
plus en plus centrale : que vaut un
système des droits de l’homme qui
cautionne le crime et ignore les
victimes parce qu’elles ne sont pas du
bon camp ?
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