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Ha'aretz
Un
dirigeant fantoche
Gideon
Lévy
Haaretz, 23
septembre 2007
www.haaretz.co.il/hasite/spages/906283.html
Version anglaise : Puppet
leader
www.haaretz.com/hasen/spages/906199.html
Mahmoud
Abbas devrait rester chez lui. Les conditions actuelles devraient
lui interdire de se rendre à Washington. Ses rencontres avec
Ehoud Olmert tournent graduellement à l’humiliation pour son
peuple : rien de bon n’en sortira. Le spectacle des visites
amicales du dirigeant palestinien à Jérusalem est devenu
insupportable à la conscience, avec ce déluge de baisers sur la
joue de l’épouse d’un Premier ministre qui menace, dans le même
temps, d’imposer le blocus à un million et demi de personnes
appartenant à son peuple, de les plonger dans le noir et de les
affamer.
Si
Abou Mazen était un vrai leader national, et pas un petit
revendeur, il devrait annoncer qu’il n’y aura ni conférence
ni rencontres tant que le blocus de Gaza ne sera pas levé. S’il
était doté d’une stature historique, il ajouterait qu’il
n’y aura de conférence que si Ismaïl Haniyeh en est. Lui aussi
représente les Palestiniens. Et si Israël voulait vraiment la
paix et pas simplement, avec un dirigeant fantoche, un « accord
de principes » ne menant à rien, il s’empresserait de
respecter cette exigence. Israël devrait lui aussi être intéressé
à ce qu’Abou Mazen soit considéré par son peuple comme un
dirigeant et non comme une marionnette à fils actionnée par Israël
et les Etats-Unis ou par des considérations de pouvoir à court
terme.
Le
faible Abou Mazen dispose maintenant de pouvoir. A un moment où
Washington et peut-être Jérusalem aspirent tellement à ce prétexte
à photos baptisé « Conférence pour la paix » afin
de pouvoir présenter un « résultat » quelconque, il
pourrait et devrait faire peser la menace d’un boycott de sa
part pour essayer d’obtenir au moins quelque chose pour son
peuple. Dans Gaza maintenant aux mains du Hamas qu’il exècre,
vivent aussi des Palestiniens et Abou Mazen ne peut pas continuer
d’ignorer la situation inhumaine dans laquelle ceux-ci vivent,
emprisonnés par Israël.
Mais
Abou Mazen donne l’impression de n’être rien de plus qu’un
survivant politique. Ce n’est ni naïveté ni faiblesse s’il
prête la main au bal masqué américano-israélien : Gaza
est maintenant pour lui, non moins que pour Israël, un « territoire
hostile ». Entre Israël et lui existe par conséquent une
unité d’intérêts honteuse et qui ne sera utile à aucun des
deux camps. A en juger par son comportement, non seulement Abou
Mazen ne s’oppose pas à ce qu’Israël fait subir à Gaza,
mais peut-être même s’associe-t-il à la doctrine aberrante
selon laquelle ces pressions brutales amèneront la capitulation
du Hamas et le retour des habitants dans le giron du Fatah. En
fait, Abou Mazen démontre par là qu’il n’est pas un
poulet-qui-n’a-pas-encore-ses-plumes, comme l’appelait Ariel
Sharon, mais un coq cynique pour qui le bien de son peuple est le
cadet des soucis.
Un
véritable sommet pour la paix devrait réunir toutes les parties
au conflit. La paix se fait entre ennemis acharnés. La question décisive
n’est pas de savoir si oui ou non l’Arabie Saoudite y
participera – c’est sans importance – mais si pourra s’y
rendre une véritable représentation palestinienne. Abou Mazen
représente tout au plus la moitié de son peuple et il peut
aboutir, dans le meilleur des cas, à un demi-accord qui ne pourra
pas tenir l’eau face à une puissante opposition du Hamas. Il
est dans l’intérêt de toutes les parties, y compris celui d’Abou
Mazen, d’amener le Hamas à la table des discussions. Un sommet
pour la paix, sans le Hamas et sans la Syrie, n’est qu’une
vaste blague. Mais la coalition myope du trio artificiel, Jérusalem-Washington-Ramallah,
tente de présenter la vision fallacieuse de « discussions
sur la paix » sans la participation des partenaires décisifs,
et le monde applaudit à cette mystification.
Il
semble difficile d’attendre d’Abou Mazen qu’il s’élève
au-dessus de ses considérations étroites et demande qu’on
invite le Hamas, qui a été élu, faut-il le rappeler, pour
diriger le gouvernement palestinien lors d’élections démocratiques.
Mais le minimum qu’on puisse exiger de celui qui porte le
glorieux titre de « Président de l’Autorité
Palestinienne », serait qu’il essaie de se préoccuper de
tous ceux qui appartiennent à son peuple, en particulier quand
ils sont plongés dans une détresse aussi terrible. Cependant, au
lieu d’œuvrer à un cessez-le-feu et à l’ouverture de Gaza
au monde, on s’occupe en ce moment de la formulation d’un
nouveau document – qui ne vaudra pas le papier sur lequel il
sera signé et sera aussitôt expédié dans la poubelle de l’Histoire
comme ceux qui l’auront précédé – ainsi que de nouvelles
mesures brutales à imposer aux habitants de Gaza. Il n’est pas
permis à Abou Mazen de participer à cette farce qui déferle sur
nous depuis Washington.
(Traduction
de l'hébreu : Michel Ghys)
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