Iran
Obama, l'Iran et les opérations secrètes
américaines
Fikret Ertan
on Turkishweekly.net, 1er février 2009
http://www.turkishweekly.net/news/63949/obama-iran-and-covert-operations-.html
L’administration Obama est en train de
mettre au point une nouvelle politique en Iran. Cette politique
sera différente de celle de l’administration Bush à bien des
égards, la principale nouveauté étant l’ouverture de canaux
permettant de pratiquer une diplomatie directe.
Dans ce domaine, le premier pas consistera
en une lettre que le Président Barack Obama adressera aux
dirigeants iraniens, visant à dégeler les relations bilatérales
et à ouvrir la voie à des pourparlers en face-à-face.
La seconde étape consistera en la
nomination d’un envoyé spécial en Iran. Ce nouvel envoyé sera
vraisemblablement Dennis Ross, qui a eu un rôle pionnier dans
les pourparlers au Moyen-Orient sous l’administration Clinton.
Il sera responsable, quotidiennement, de la mise en place d’une
politique vis-à-vis de l’Iran.
De fait, la seconde étape pourrait fort
bien « précéder » la première, dès lors que la lettre en
question en est encore au stade du brouillon et qu’aucune
décision finale quant à son contenu n’a été prise jusqu’à ce
jour.
Toutefois, en dépit de ces évolutions
positives, les Etats-Unis recourent à toutes sortes de manœuvres
en Iran. Depuis des actions navales ouvertes jusqu’à des
manipulations occultes dans le domaine du renseignement, depuis
les efforts diplomatiques jusqu’à l’imposition de sanctions
financières, le gouvernement américain s’ingénie, depuis
plusieurs années, à modifier le comportement général du
gouvernement iranien, en particulier en ce qui concerne son
programme nucléaire.
Pour en donner ne serait-ce qu’un seul
exemple, une force opérationnelle navale américaine a reçu
l’ordre d’envoyer par le fond toutes les cargaisons d’armes
envoyées par l’Iran au Hamas, afin de le réarmer, a indiqué le
quotidien britannique The Sunday Times. Citant des sources
diplomatiques américaines, ce journal a écrit que la
Combined Task Force 151,
censée lutter contre des « pirates » (?) dans le Golfe d’Aden, a
reçu pour instruction de traquer les chargements d’armes
iraniens.
La semaine dernière (autour du 20 janvier,
donc, ndt), l’US Navy a « intercepté et fouillé un navire de
nationalité iranienne, dont les responsables (américains)
redoutaient qu’ils ne transportassent des armes à destination du
groupe palestinien activiste (comprendre : résistant, ndt)
Hamas, mais deux de ces responsables ont indiqué qu’il n’était
pas évident, mercredi, que des armes suspectes auraient
effectivement été trouvées à bord.
Ce cargo battant pavillon chypriote avait
été pris en chasse par un bâtiment de l’US Navy dans la Mer
Rouge durant le week-end, a dit un officiel américain. Les
militaires américains sont montés à son bord et ils l’ont
fouillé, avec le consentement de l’équipage du cargo (?? Va
savoir, Charles ?, ndt) durant les journées de lundi et de
mardi », a indiqué un autre (Informations de l’Agence Associated
Press datée du 22 janvier 2009).
(Mais
bon, allez, puisque vous insistez) : un autre exemple concerne
l’augmentation de la pression exercée par les Etats-Unis sur
l’Iran, en persuadant l’Allemagne de geler ses garanties de
crédit à l’exportation. D’après le quotidien allemand
Handelsblatt, la chancelière Angela Merkel a donné à son
ministre de l’Economie la consigne de n’accorder de garantie de
crédits à l’exportation à des entreprises allemandes désireuses
de faire des affaires avec l’Iran que dans des conditions tout à
fait exceptionnelles. Ce journal écrit que cette mesure avait
été adoptée en réaction à des critiques adressées à l’Allemagne
par certains de ses partenaires, dont les Etats-Unis et Israël.
Autre instrument utilisé depuis des années
par le gouvernement américain à l’encontre de l’Iran, bien
entendu : les coups tordus. En raison de leur nature, nous ne
sommes évidemment pas en mesure d’en dire grand-chose. Mais nous
savons une chose, c’est que l’Iran est très préoccupé par ces
opérations secrètes. Le Washington Post a écrit, le 20 janvier :
« Dans un message adressé à l’administration Obama, un haut
responsable des services secrets iraniens a mis en garde les
Etats-Unis, lundi dernier, contre ses opérations d’espionnage
visant l’Iran.
« Nous nous devons de mettre en garde la
nouvelle administration américaine sur le fait qu’elle ferait
mieux de ne pas marcher dans les brisées du gouvernement
américain sortant », a ainsi déclaré le chef du service du
contre-espionnage du ministère iranien du Renseignement, d’après
l’agence de presse semi-officielle iranienne Fars New Agency.
« Ce responsable iranien a fait état d’une
« guerre totale du renseignement » entre les deux pays, et il a
fait des commentaires détaillés et exceptionnels sur ce qu’il a
qualifié de « lourdes pertes subies par les Etats-Unis dans ses
efforts pour recruter des agents parmi des médecins, des
artistes et des créateurs de mode, en Iran ».
L’article relevait également que le
responsable iranien a « accusé les Etats-Unis d’entretenir des
espions dans les pays voisins de l’Iran, mentionnant en
particulier les Emirats Arabes Unis, la Turquie, le Koweït et
l’Azerbaïdjan, pays d’où les Etats-Unis étaient en train
d’ourdir des « complots » contre l’Iran. Ces espions cherche à
générer « une crise sociale, des manifestations de rue et des
conflits interethniques », a-t-il précisé. « Une révolution
douce a été programmée contre notre pays, et elle a été mise à
exécution dans certains cas, mais elle a (jusqu’ici) toujours
été étouffée dans l’œuf ».
Comme nous l’avons mentionné, les
opérations secrètes ourdies par les Etats-Unis à l’encontre de
l’Iran obèrent les relations entre les deux pays depuis trente
ans. La question aujourd’hui posée est celle de savoir si Obama
(qui peut : Yes, he can ? ndt) va être capable d’y mettre un
terme et de prendre des initiatives positives, comme l’y
encouragent les responsables iraniens, dans l’intérêt de la
diplomatie directe ?
A notre avis : non.
Fikret Ertan est éditorialiste au quotidien
turc de langue anglaise TZ (Today’s Zaman)
Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier
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