Prisonniers palestiniens
La centralité de
la Palestine et la grève des prisonniers
Fadwa
Nassar
Photo: CPI
Jeudi 10 mai 2012 Plus de trois
semaines de grève illimitée de la
faim menée par près de 3000
prisonniers palestiniens détenus
dans les geôles de l’occupation !
Cette mesure ultime prise par les
prisonniers pour protester contre
l’isolement, l’interdiction des
visites familiales, les fouilles
humiliantes des prisonniers et de
leurs familles, la sauvagerie des
gardiens et des forces spéciales, ne
semble émouvoir ni la communauté
internationale, ni les peuples
arabes et musulmans, à plus forte
raison leurs dirigeants. Les prisonniers
palestiniens Thaer Halahla et Bilal
Diab entament leur 75ème
jour de la grève de la faim,
protestant contre le crime de la
détention arbitraire que l’Etat de
l’occupation sioniste a commis et
commet toujours, à l’encontre des
dizaines de milliers de Palestiniens
vivant en Cisjordanie, y compris al-Qods,
et avant 2005, à Gaza. Six autres
prisonniers ont dépassé les deux
mois de grève de la faim, malgré les
pressions exercées par
l’administration pénitentiaire,
certains pour protester contre la
détention arbitraire, d’autres
réclamant le statut de prisonniers
de guerre ou tout simplement pour
autoriser les visites familiales (le
combattant Abdallah Barghouty,
dirigeant des Brigades d’al-Qassam,
condamné à la plus lourde peine
prononcée par les sionistes). Malgré
ces lourds sacrifices consentis par
les prisonniers, ces résistants et
combattants devenus symboles de la
résistance, l’Etat colonial sioniste
est à peine égratigné par la
communauté internationale, qui
dévoile une fois encore son visage
impérialiste et inhumain, et surtout
son hypocrisie. Le peuple
palestinien l’a compris, et depuis
longtemps déjà. C’est pourquoi les
manifestants ont bloqué, à Ramallah,
l’entrée de la mission de l’ONU,
interdisant aux employés d’y entrer,
en solidarité avec la lutte des
prisonniers. Ils ont également
bloqué l’entrée du siège du CICR,
qui avait déjà montré sa complicité
avec l’ennemi, en autorisant les
bandes armées sionistes de kidnapper
les députés maqdisis, qui s’y
étaient réfugiés, refusant leur
déportation. C’est contre le silence
et la collaboration de la communauté
internationale avec les bourreaux
sionistes que protestent les
Palestiniens, qui s’attendent d’un
moment à l’autre à recevoir la
nouvelle du décès d’un ou de
plusieurs grévistes. Ce n’est pas la
première fois que les Palestiniens
protestent contre la complicité de
la communauté internationale avec
l’occupation et ses pratiques
barbares, s’agissant des
prisonniers. Il y a quelques mois,
le secrétaire général de l’ONU, Ban
Ki Moon, avait été accueilli par des
slogans hostiles par les familles
des prisonniers à Gaza, qui
protestaient contre son refus de
recevoir leur délégation à Ramallah,
tout comme ils avaient protesté, il
y a plus d’un an, contre un ministre
français, qui avait ignoré la cause
des prisonniers, pour ne parler que
du soldat sioniste kidnappé par la
résistance. Si la communauté
internationale, c’est-à-dire les
grandes puissances et leurs
structures qui exercent leur
dictature sur le monde, reste sourde
à l’appel des prisonniers
palestiniens et plus généralement, à
l’appel du peuple palestinien qui
lutte depuis plus d’un siècle contre
le colonialisme sioniste et la
domination impériale, on ne peut
s’en étonner, puisque le
colonialisme sioniste avait reçu
pour mission de maintenir
précisément cette domination, au
prix de massacres, de nettoyage
ethnico-religieux, de déportation et
d’enfermement des résistants et du
peuple dans ses sinistres prisons.
Mais ce qui étonne, ou plutôt
suscite la colère et la révolte,
c’est que cette communauté
internationale prétend défendre les
droits des peuples, prétend même
vouloir instaurer un ordre mondial
juste, alors qu’en réalité, c’est
son ordre mondial qu’elle instaure,
où le peuple palestinien devra être
réduit à la servitude ou inexister,
pour satisfaire les appétits
insatiables des colons sionistes qui
se sont emparés de son pays et sa
terre, la Palestine. Aujourd’hui, la
lutte des prisonniers palestiniens,
que menacent la mort, le handicap ou
les maladies chroniques, à cause
précisément du silence de la
communauté internationale, est
devenue la scène de la confrontation
avec l’ennemi sioniste. Par les
dizaines de tentes de protestation,
les manifestations quotidiennes, les
affrontements près des prisons, à Ascalan et près de la colonie Ofer,
et dans la ville d’al-Qods, les
Palestiniens comptent faire de cette
question, qui les unit, le terrain
de leur lutte contre l’occupation.
C’est autour de la cause des
prisonniers qu’ils se rassemblent
tous les jours et inventent de
nouvelles formes de confrontation,
mettant à nu l’attitude complice de
la communauté internationale et de
ses laquais arabes et musulmans. Mue par la honte à
cause de son silence ou de
l’insouciance des dirigeants arabes,
la Ligue arabe décide enfin de se
réunir, sous la direction de la
nouvelle figure, Nabil Arabi, issue
de la révolution égyptienne. Mais sa
réunion n’accouche que d’une souris,
toute minuscule, puisqu’elle décide,
à l’unanimité, de convoquer à une
conférence sur la question des
prisonniers palestiniens, sous
l’égide de l’ONU…. au mois de
novembre prochain. Quel exploit !
Cet organisme qui a autorisé, en
quelques jours, la destruction de
pays arabes, la Libye (par l’OTAN)
et la Syrie (par les grandes
puissances) n’a eu pour seule idée
que de renvoyer la question des
prisonniers à l’ONU, l’organisme
international qui a offert la
Palestine aux colons sionistes et
qui exerce tout son pouvoir pour
maintenir l’occupation en place.
Est-ce là le résultat de la
révolution égyptienne ou des
révoltes « populaires » arabes ?
Quelle est alors la différence entre
sa récente proposition concernant
les prisonniers palestiniens et une
précédente, concernant la Palestine
également, et consistant à verser 3
millions de dollars à la ville d’al-Qods,
pour soutenir sa population meurtrie
par la judaïsation et le nettoyage
ethnico-religieux, somme qui n’a
encore pas frôlé le sol palestinien
? Aucune, puisque la Ligue arabe,
dirigée par le candidat aux
élections égyptiennes ‘Amr Moussa ou
le fils de la révolution égyptienne
Nabil ‘Arabi, est toujours
impuissante lorsqu’il s’agit de la
Palestine et du peuple palestinien.
Mais au-delà de
l’attitude insouciante, sinon
complice, de la Ligue arabe et des
dirigeants arabes, il faudra se
poser des questions sur l’atittude
des peuples arabes et de leurs
mouvements contestataires ou prônant
la résistance, vis-à-vis de la
Palestine et du mouvement de révolte
des prisonniers, combattants et
résistants palestiniens. Il faudra
également se poser des questions sur
les médias arabes dont certains se
contentent de quelques flashs, comme
si la Palestine pouvait se contenter
de flashs et ne pas occuper le
centre des préoccupations arabes.
Quelles que soient
les préoccupations du moment, la
Palestine ne peut se retrouver à la
périphérie. C’est ce que souhaitent
les sionistes et leurs alliés, alors
qu’ils essaient de diriger
l’attention du monde vers d’autres
cieux, pour avoir les mains libres
et détruire le mouvement des
prisonniers et plus généralement,
détruire la Palestine et les
Palestiniens. La Palestine, et
aujourd’hui la lutte des prisonniers
pour la dignité des peuples du
monde, doivent rester, comme en
Palestine même, le centre de notre
attention. C’est ainsi que nos
révoltes populaires peuvent éviter
la récupération par les cercles
impérialistes et leurs valets, et
c’est ainsi que nos slogans « la
Palestine d’abord » peuvent avoir
pleinement leur sens et ne pas être
juste des joutes lancées aux
adversaires du moment. Sinon, nous
ne faisons que reproduire ce que nos
régimes ont fait, pendant soixante
ans et plus, et ce que fait la Ligue
arabe, actuellement, évoquer juste
la Palestine pour se donner bonne
conscience, mais agir ailleurs.
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