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Al-Ahram Hebdo
L'option de
proclamer un Etat palestinien indépendant
Emad Awwad
La colonie de Gilo
Mercredi 2 décembre 2009
« Nous avons décidé de nous adresser au Conseil de sécurité pour
essayer d’obtenir son soutien à la création d’un Etat
palestinien indépendant ayant Jérusalem-Est comme capitale et
dont les frontières seraient celles de juin 1967 », a déclaré le
négociateur palestinien, Saëb Erakat, le 15 novembre 2009. Cette
déclaration, ayant été confirmée par le chef de l’Autorité
palestinienne lui-même, a été suivie par une série de
consultations avec pour objectif d’obtenir l’appui de puissances
étrangères, à commencer par l’Union européenne. Mais les
Palestiniens n’avaient-ils pas proclamé leur indépendance
unilatéralement le 15 novembre 1988 sans qu’ils puissent
traduire cette déclaration concrètement sur le terrain ? Quelles
seraient les différences entre l’acte symbolique fait en Algérie
en 1988 sous la direction de Yasser Arafat et celui que pourrait
envisager en 2009 son successeur Mahmoud Abbass ? Contrairement
à la proclamation d’Alger en 1988, qui intervenait à un moment
où l’OLP n’était que la « bête noire » de l’Etat hébreu, la
démarche envisagée fin 2009 est celle d’une autorité ayant
derrière elle plusieurs années de négociations et de contacts
qui ont débuté officiellement avec l’accord des principes entre
l’OLP et Israël, dit l’Accord d’Oslo. Le fait d’évoquer cette
option, après tant d’années d’échanges ayant abouti à plusieurs
accords, n’est qu’un constat d’échec flagrant de l’option de
négociation. Désormais, le problème palestinien retrouve son
point de départ, à savoir la cause d’un peuple en quête de son
indépendance. Toutefois, le dossier est désormais lourd,
puisqu’il contient des chapitres infructueux sur plusieurs
moyens de règlements pacifiques allant de la médiation à la
négociation, en passant par la Cour internationale de justice.
On y trouve de multiples résolutions adoptées par l’Onu
reconnaissant aux Palestiniens leurs droits nationaux et
légitimes, à commencer par celle du partage adoptée le 29
novembre 1947. On y voit des lignes directrices, approuvées par
la communauté internationale, qui indiquent la marche à suivre
pour la paix. Cette nouvelle orientation, qui ne croit plus aux
négociations selon le modèle israélien, croise, plus ou moins,
celle prônée par le Hamas et d’autres formations palestiniennes
qui ne croyaient point à l’utilité des négociations telles
qu’elles étaient menées pendant des années. En effet, avec le
passage du temps, cette option est devenue également sujet des
interrogations parmi les cadres du Fatah. Cette évolution était
le fruit de l’expérience endurée depuis 1993 qui a révélé, à
plusieurs reprises, une volonté israélienne d’exploiter la
façade de la négociation pour imposer sur le terrain les
contours d’un règlement de facto. Or, si la position adoptée par
le président Barack Obama, exigeant le gel des activités de
colonisation, y compris la croissance naturelle, avait renforcé
celle de l’Autorité palestinienne qui refusait la reprise des
négociations tant que la colonisation se poursuivait, la
volte-face dans la position de l’administration, exposée par la
voix de la chef de sa diplomatie, était la goutte qui a fait
déborder le vase. En effet, non seulement Mme Clinton a demandé
la reprise de négociations sur les questions du statut final
sans conditions préalables, mais elle a aussi assuré qu’en
mettant « des limites importantes à la colonisation » Israël a
fait « des concessions sans précédent ». Il était normal que les
Palestiniens, dans leur ensemble, s’interrogent sur la capacité
américaine à mener à bien des négociations sur les questions
épineuses qui croisent, elles aussi, les activités de la
colonisation, telles que les frontières ainsi que Jérusalem-Est.
Dans ce contexte, l’on peut comprendre les propos de M. Marouane
Barghouthi qui estime que face à l’immobilisme de la diplomatie
américaine au Proche-Orient, le Hamas et le Fatah ont le devoir
de se réconcilier. « Je ne vois pas de divergences de fond entre
le Fatah et le Hamas », a-t-il déclaré de sa cellule. En
réalité, l’idée de s’adresser au Conseil de sécurité de l’Onu
pour obtenir la reconnaissance d’un Etat à s’établir dans les
frontières du 4 juin 1967 signifie l’apport de précisions, voire
de modifications aux termes de la résolution 242 adoptée par le
conseil suite à la guerre de 1967. Il s’agit d’un retour à
l’option d’un règlement imposé de l’extérieur, ce qui a permis
auparavant à l’Etat hébreu de voir le jour se basant sur la
résolution du partage adoptée le 29 novembre 1947. Les réactions
peu encourageantes de la part des puissances mondiales, qui tout
en exprimant le soutien à l’option d’un Etat palestinien
indépendant, ont privilégié, une fois encore, la voie de
négociation pour atteindre cet objectif d’une part et les
multiples menaces de rétorsion proférées par les responsables
israéliens d’autre part, nous amènent à conclure que l’option de
proclamer un Etat palestinien indépendant, avec la caution du
Conseil de sécurité de l’Onu, est irréaliste, sinon irréalisable
au moins à l’heure actuelle. Cependant, le fait de l’évoquer à
ce moment précis semble un signal d’alarme tiré par l’Autorité
palestinienne à l’attention de la communauté internationale. Au
fond, on demande à cette dernière d’être plus claire quant à
l’avenir d’un peuple qui n’arrive plus à savoir en quoi il peut
croire et à qui il peut faire confiance. En effet, il a du mal à
comprendre comment on peut affirmer que les colonies du
peuplement juives sont illégales, tout en lui demandant de
poursuivre des négociations sur un règlement qui ne pourrait
plus satisfaire ses revendications reconnues légitimes. Partant,
on peut y voir une dernière chance pour s’atteler à trouver une
solution pacifique et honorable au conflit. Autrement dit, la
direction palestinienne actuelle, désignée comme un
interlocuteur modéré, n’arrivera plus à se justifier dans ce
rôle. En conséquence, l’alternative qui s’impose est celle de la
résistance armée. Une option qui pourrait unifier un peuple en
détresse, mais qui n’irait évidemment pas dans l’intérêt du
monde, surtout dans une zone aussi sensible et complexe que le
Proche-Orient avec ses multiples défis et contradictions.
Droits de reproduction et de diffusion
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AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 2 décembre 2009 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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