Opinion
Un compte rendu de
l'audience en appel affaire Karsenty
Charles
Enderlin

© Charles
Enderlin
Lundi 21 janvier
2013
Pour mémoire, France Télévisions
et Charles Enderlin avaient porté
plainte en 2004 pour diffamation à
l’encontre de Philippe Karsenty pour un
communiqué de presse et un article sur
le site de l’agence « médias ratings »
intitulé : » Arlette Chabot et Charles
Enderlin doivent être démis de leurs
fonctions ». Au sein de ces écrits,
Philippe Karsenty accusait Charles
Enderlin et France Télévisions d’avoir
diffusé une « Fausse mort », « un faux
reportage », des « scènes jouées » de
s’être livrés à une « supercherie », une
« imposture », une » mascarade » … le 30
septembre 2000, lors de la diffusion de
la mort du petit Mohamed Al Durah.
Le Tribunal de Grande Instance de
Paris avait en 2006 condamné Philippe
Karsenty pour diffamation. Ce dernier
avait interjeté appel, et la cour
d’appel avait ordonné à France 2 la
communication des rushs du reportage
puis avait relaxé Philippe Karsenty au
bénéfice de la bonne foi en 2008.
La Cour de Cassation a, en février
2012, cassé les deux arrêts de la Cour
d’Appel au motif qu’il appartenait au
prévenu d’apporter la preuve de sa bonne
foi et qu’il n’appartenait donc pas à la
Cour d’Appel d’ordonner la communication
des rushs. L’affaire était donc rejugée
hier par la Cour d’appel de Paris.
Philippe Karsenty, maquette et montage
powerpoint à l’appui a essayé
d’expliquer à la Cour pourquoi il
pensait qu’il n’était pas possible que
l’enfant soit mort devant la caméra,
pourquoi les tirs ne pouvaient venir de
la position Israëlienne et pourquoi il
pensait donc qu’il s’agissait d’un «
faux reportage ».
Charles Enderlin a ensuite pu
s’exprimer. Il a rappelé son expérience
journalistique dans la région et la
confiance qu’il avait dans son caméraman
Talal ABU RAMAH.
Trois témoins cités par Philippe
Karsenty sont ensuite intervenus.
Esther Shapira, journaliste allemande
qui avait réalisé en 2002 un
documentaire intitulé « Qui a tué
Mohamed Al Dura? » pour la chaîne
Allemande ARD, Patrick Bloch, un expert
médical qui a indiqué que des plaies par
« arme de guerre » auraient dû causer
des dégâts plus importants sur les corps
qu’il y aurait donc dû y avoir plus de
traces de sang.
Enfin, un expert balistique a indiqué
qu’il n’était pas possible que les tirs
viennent de la position Israélienne.
L’avocate de France Télévisions,
Maître Bénédicte Amblard a ensuite
plaidé en indiquant que si Philippe
Karsenty avait la liberté de
s’interroger, il aurait dû prendre des
précautions de langage et d’enquête. Ce
qu’il n’a pas fait en 2004. Qu’il venait
aujourd’hui essayer de « donner à la
calomnie le masque de l’information »
mais qu’il ne fallait pas se laisser
berner. Ce dont il était question,
c’étaient des accusations graves à
savoir un « faux reportage » et une «
fausse mort ». Elle a également demandé
une publication judiciaire en cas de
condamnation de Monsieur Karsenty en
raison des retentissements personnels
qu’a eus cette affaire pour Charles
Enderlin.
· L’avocat général a souligné que
Philippe Karsenty demandait à la Cour
d’établir une réalité historique mais
que ce n’était pas la saisine de la
Cour. En effet, le débat porte
uniquement sur la question de savoir si
Philippe Karsenty pouvait ou non porter
des accusations très graves contre
Charles Enderlin au point de demander sa
démission.
L’avocat général a retenu que le
caractère diffamatoire des propos
n’était plus contesté par Philippe
Karsenty qui avait en outre abandonné
l’argument concernant la preuve de la
vérité des faits avancés. Philippe
Karsenty devait donc prouver sa bonne
foi au moment où les propos ont été
tenus. Pour cela, l’avocat général fait
état des experts et des «
pseudo-expertises » produites, en
indiquant que ces éléments sont
nécessairement partiels car consistant
en un travail a posteriori, à partir
d’images et donc difficiles à apprécier.
La vraie question pour l’avocat
général est la question de savoir si
Philippe Karsenty a fait preuve de
prudence dans les propos tenus. Il s’en
remet sur ce point à l’appréciation de
la Cour.
· Le premier avocat de Philippe
Karsenty, Delphine Melliet, a surtout
insisté sur la légitimité des propos
tenus par son client, sur l’importance
du débat lancé compte tenu de l’impact
des images de Mohamed Al Dura dans le
monde entier. Elle considère donc que «
l’immodération » des propos était
justifiée par l’intérêt général.
· Son deuxième avocat, Patrick
Maisonneuve a quant à lui insisté sur
les éléments en la possession de
Philippe Karsenty au jour où il a publié
les articles en cause.
La Cour rendra son délibéré le 3
avril prochain.
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