Opinion
Les plans
occidentaux pour la Syrie:
les visées, les moyens et les obstacles
Béchir Turki
Lundi 27 août 2012
Les violences actuelles en Syrie sont
actionnées à distance par les puissances
occidentales, les Etats-Unis en tête,
qui cherchent à redessiner la carte du
Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord
conformément à leurs intérêts.
Par Béchir Turki
Subrepticement nos médias signalent
l’existence de certains de nos
compatriotes faits prisonniers ou morts
parmi les combattants de l’Armée de la
Syrie libre (Asl).
Des
mercenaires tunisiens mobilisés par des
agents de l’Arabie saoudite
Ces jeunes mercenaires, c’est ainsi
qu’il faut les nommer, sont recrutés sur
notre territoire parmi une jeunesse
désœuvrée et rêvant de trouver des
emplois mirobolants. C’est ce que leur
promet leurs recruteurs, connus de nos
autorités locales et centrales, sinon à
quoi servent les «ômdas» et les
délégués; ces recruteurs sillonnent nos
cafés et nos campagnes en remplissant
les poches de leurs recrus de vrai ou de
faux billets de dollars. Ces recruteurs
agissent, directement ou indirectement,
pour le compte du Qatar et de l’Arabie
saoudite où le prince Bandar Ben Soltane,
réputé pour son génie pour les
opérations secrètes, qui est en charge
du dossier.
Les recrus sont convoyés en toute
légalité vers la Libye, où ils se
retrouvent dans des camps de lavage de
cerveau et d’entrainement militaire
intensif, avant d’être affectés dans
zones de combat pour se donner au «jihad»
(guerre sainte), porte du paradis, avec
d’autres mercenaires de différentes
nationalités, anciens combattants arabes
de l’Afghanistan ou de Bosnie ou de
l’Irak... ou des ex-voyous et des repris
de justice appâtés par l’argent facile.
Des
combattants tunisiens en Syrie capturés
et montrés à la télévision syrienne
La
salle des opérations est basée en
Turquie
Pour ce qui concerne la Syrie, le
centre de transit se trouve en Turquie,
dans la base aérienne de l’Otan à
Incirlik, sous commandement turc, mais
en fait aux ordres du Pentagone.
C’est à travers un tronçon de la
frontière turco-syrienne qui s’étend sur
une longueur de quelques dizaines de km,
près de la ville d’Idlib, actuellement
contrôlé par l’Asl avec ses postes de
douane, que transitent les armements
avec toute leur logistique. C’est par
cette frontière que transitent les
divers spécialistes européens et
particulièrement français et les divers
conseillers en tout domaine:
télécommunications, renseignements,
tactiques de combat... ainsi que les
mercenaires qui composent la majeure
partie des effectifs de cette armée,
commandée par des traitres à leur pays
et aux ordres de certains pays
occidentaux, réunis en un club sous la
dénomination des «Amis de la Syrie»
afin de pouvoir répartir une grande
partie de son territoire, sinon la
totalité, aux pays limitrophes: Israël,
Turquie, Kurdes de l’Irak... et de jouir
de ses richesses dont le gaz qui vient
d’être découvert, avec une production
prochaine qui placerait la Syrie au
quatrième rang mondial.
La Turquie joue un rôle important,
soi-disant pour préserver ses intérêts.
Non seulement les passages continus de
sa frontière se passent sous sa
bienveillante protection, mais elle
dispose d’un important contingent armé
pouvant assurer une intervention
militaire immédiate si besoin est. Elle
assure également et en permanence un
secours immédiat à ceux voulant fuir
l’enfer, et aux blessés, par de
nombreuses ambulances stationnées à la
frontière.
Avec regret, il faut signaler
l’adhésion bénévole à ce club malfaisant
et agissant en dehors de la charte de
l’Onu, du président Moncef Marzouki, une
nullité en tout et particulièrement en
matière de diplomatie et d’affaires
étrangères. Par ce geste pendable
inconscient et irréfléchi, il a
hypothéqué désavantageusement notre
avenir politique.
Terminal
de base aérienne américano-turque
d'Incirlik.
La France
dans le bourbier syrien
La France mène une guerre secrète
contre l'armée syrienne en fournissant à
la légion wahhabite des renseignements
satellitaires. Lors de la prise du
bastion des insurgés dans le quartier de
Baba Âmr à Homs, l’armée syrienne a fait
plus de 1.500 prisonniers
majoritairement étrangers. Parmi eux,
une douzaine de Français ont requis le
statut de prisonniers de guerre en
faisant connaitre leur grade, leur
identité et leur lieu d’affectation.
L’un d’entre eux est un colonel des
transmissions de la Dgse. La France a
fait appel à la Fédération de Russie
pour négocier avec la Syrie leur
libération!
En l’absence de traités justifiés, la
guerre secrète conduite par le président
Sarkozy et son gouvernement est un acte
sans précédent dans la Ve
République. Il viole l’article 35 de la
constitution française et constitue un
crime passible de la Haute Cour selon
l’article 68.
On peut penser ce que l’on veut du
président Bachar El Assad. Il défend son
pays avec courage et abnégation contre
une coalition dont le but est la
destruction de la Syrie conformément aux
injonctions d’Israël. Il est certain
qu’il fait l’objet d’une campagne féroce
fondée sur de gros mensonges. Cet
acharnement des médias occidentaux a
pour but de nous faire accepter une
agression criminelle contre un pays
souverain en transgressant les lois
internationales.
Ce scénario déjà testé en Irak, en
Libye... manque de légitimité et n’obéit
qu’à une volonté aveugle des pays qui
croient pouvoir dominer le monde et
écraser ceux qui osent lever la tête et
s'opposer à leur dictature.
L’Asl est présentée par la presse
occidentale comme une organisation
révolutionnaire pacifiste, alors qu’il
s’agit au contraire d’une formation
contre-révolutionnaire armée par des
parties étrangers à la Syrie, passée
progressivement des mains des monarchies
réactionnaires du Golfe à celle de la
Turquie agissant pour l’Otan.
Pour les Etats occidentaux et leurs
presses, le peuple syrien, assoiffé de
démocratie, s’est soulevé selon le
modèle tunisien pour reverser leur
dictateur Bachar El Assad. Celui-ci
aurait tué et torturé des manifestants
pacifiques. Ce prétexte leur permet de
penser sérieusement à une intervention
militaire sous le parapluie des Nations
unies, comme ils l’ont fait pour la
Libye. C’est manquer d’éthique, et
contre le droit. Mais voilà, les Russes
et les Chinois s’y seraient opposés, et
ainsi leur funeste plan est déjoué.
Obama au
parlement turc (avec Erdogan), en avril
2009
La main très
visible des Américains
La réalité pour tous les Etats qui ne
se sont pas vassalisé par les Usa et
Israël, les Etats-Unis aurait lancé une
opération contre la Syrie et ce, selon
un plan préétabli de longues dates.
Rappelons quelques faits pour
l’histoire.
Le 15 septembre 2001, juste après les
attentats de New-York et de Washington,
perpétrés par les Marines de l’armée
américaine et non par Al-Qaïda(1)
G. W. Bush, lors d’une réunion à Camp
David avait prévu d’intervenir en Syrie
et simultanément en Libye pour montrer
sa capacité d’action sur un double
théâtre d’opération. Cette décision est
attestée par le témoignage du général
Wesley Clark, ex-commandant de l’Otan,
qui y a été opposé.
En 2003, le Congrès a adopté deux
lois donnant instruction au président
des Usa de préparer une guerre contre la
Syrie et la Libye.
En 2004, la Syrie est accusée par
Washington de cacher des armes de
destruction massive que l’on ne
parvenait pas à trouver en Irak. Cette
accusation a fait long feu, faute de
preuve.
En 2005, après l’attentat contre
Rafik Hariri, les Usa ont tenter
d4entrer en guerre contre la Syrie, mais
n’y sont pas parvenu car ils ont retiré
leur armée du Liban. Par contre, ils ont
fabriqué des témoignages contre le
président El Assad pour l’accuser
d’avoir commandité l’attentat. Il ont
créé un tribunal international
d’exception pour le juger, mais
finalement ils étaient contraints de se
retirer après que leurs manipulations
aient été mises à jour.
En 2006, les Usa ont préparé un plan
dénommé «révolution syrienne».
Il s’agissait du Syria Democracy Program
portant sur des groupes d’opposition
qu’il y a lieu de créer et de financer
par le Département d’Etat et par la Cia
via une association californienne la
Democracy Concil.
En 2006, lors de la guerre d’Israël
contre le Liban, les Etats-Unis avaient
tenté d’impliquer la Syrie pour pouvoir
y intervenir, mais la victoire du
Hezbollah a fait échouer ce plan.
En 2009, la Cia a mis en place des
stations de propagande anti-syrienne,
comme la chaine Barada TV basée à
Londres et Orient TV basée à Dubaï.
En février 2011 s’est tenu une
réunion autour de John Mc Cain, Joe
Lieberman et Bernard-Henry Lévy avec des
Libyens comme Mahmoud Jibril et des
Syriens comme Malik al-Abdeh et Ammar
Qurabi. De cette réunion est parti le
feu vert aux opérations secrètes, soit
le 15 février à Bengahazi et le 17
février à Damas.
En janvier 2012, le département
d’Etat et le ministère de la Défense US
mettent en place le groupe de travail «The
day after, Supporting a democratic
transition in Syria» qui rédigea
une nouvelle constitution et un
programme pour le futur gouvernement.
En mai 2012 est mis en place le «Working
Group on economic Recovery and
Development of the Friends of the Syrian
people» par l’Otan et le Conseil de
coopération du Golfe (Ccg) sous une
présidence allemande et émiratie. Ossen
el-Kadi, un économiste syro-britannique
y élabora un partage des richesses
syriennes entre les Etats membres de la
coalition à appliquer après le
renversement du régime par l’Otan.
Quelle éthique! C’est ce qu’on
appelle vendre la peau de l’ours avant
de l’avoir tué.
Des
combattants de l'Armée de la Syrie libre
à Qusair près de Homs.
Le président Obama, en rendant une
visite surprise au siège de la Cia au
début de cette année, déclara qu’il ne
ferait plus les fautes commises par ses
prédécesseurs quant à l’emploi de
l’armée US sur les prochains théâtres
d’opération, car cela coûte cher au
budget, en armement et en logistique, en
vies humaines américaines et en
prestige! Il préconise l’emploi de
mercenaires étrangers en provoquant par
ses services spécialisés les tensions
inter-ethniques ou inter-religieuses.
Aujourd’hui, la propagande est
actionnée depuis la Maison-Blanche par
le conseiller de la sécurité nationale
Ben Rhodes, chargé des communications
stratégiques. En collaboration avec le
M16 britannique, Rhodes a imposé comme
principale source d’information des
agences de presse occidentales une
structure fantôme: l’Observatoire syrien
des droits de l’homme (Osdh).Cette
structure fantôme, qui n’a ni locaux ni
personnel, est devenue la source
d’information des chancelleries
européennes depuis que la Maison-Blanche
les a convaincues de retirer leur
personnel diplomatique de Syrie.
La situation aujourd’hui est grave
non seulement pour la Syrie, mais pour
le reste du monde. Il est difficile de
prévoir la fin des violences dans ce
pays. Si le club de la voyoucratie sort
vainqueur, d’autres pays seront leurs
prochaines cibles tel que l’Iran, et
même les Etats de la péninsule arabique,
leurs alliés d’aujourd’hui.
Note :
1- Pour ceux que cette révélation
étonne, différentes enquêtes
scientifiques ont démontré que les tours
jumelles et le building de la Cia se
sont effondrés suite à l’explosion des
grandes charges d’explosif placées à
leurs bases, et non par l’impact d’un
avion.
On peut se reporter à divers ouvrages
parus récemment aux USA, notamment la
traduction en français d’un livre ‘‘La
route vers le nouveau désordre mondial’’
de Peter Dale Scott (éd. Demi Lune, août
2011), qui décrit la façon dont les
choix de politiques étrangères des
Etats-Unis ont conduit à la mise en
œuvre d’activités criminelles et leur
dissimilation.
Copyright © 2011
Kapitalis. Tous droits réservés
Publié le 27 août 2012 avec l'aimable
autorisation de Kapitalis
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