Opinion
Gaza : But ultime
de l'agression israélienne
en fonction des circonstances !
Amin
Hoteit
Mardi 20 novembre
2012
Certains, naïfs, pourraient croire que
l'agression israélienne en cours contre
Gaza avec un armement US financé,
directement ou indirectement, par de
l’argent arabe, est une réaction au
lancement d’une roquette ayant visé une
cible militaire en Israël suite à une
énième provocation dans un contexte de
blocus qui dure depuis 5 ans, en
violation du droit international et
humanitaire. Un droit et des règles qui
n'ont pas leur place dans l’esprit
colonialiste sioniste…
Les véritables raisons de cette
opération israélienne portant le nom
symbolique de « Colonne de nuée » ou de
« Pilier de défense » résident dans le
fait que le « front d’attaque » contre
les Arabes et les Musulmans, tirant
profit des systèmes dépendants et
inféodés, en a eu besoin pour avancer
dans son projet de liquidation de
l’« Axe de la résistance », et donc le
projet de liquidation de la « Cause
palestinienne » voulue par Israël et ses
bailleurs de fonds. Tel est le principal
objectif de cette opération que les
exécutants ne peuvent avouer
publiquement, par crainte de retomber
dans les erreurs des guerres de 2006
[Liban] et de 2009 [Gaza] où
l’impossibilité d’atteindre l’objectif,
ostensiblement prédéfini, s’est
transformée en défaite pour Israël.
C’est pourquoi l’agression a été lancée
sans précision sur son « but ultime ».
Il n’empêche que nous y voyons nombre
d’objectifs d’ordre militaire, politique
et stratégique :
Objectifs militaires
Israël veut mettre un terme à la
consolidation des forces de la
Résistance à Gaza, maintenant que ses
dirigeants locaux ont refusé de prendre
le chemin tracé depuis les événements en
Syrie et d’obéir à ceux, d’entre eux,
qui ont pactisé avec les « ourbanes »
essentiellement représentés par les
dirigeants qataris notoirement inféodés
aux USA et à Israël. D’où trois
objectifs principaux :
1.
Liquidation des dirigeants militaires et
politiques insoumis, pour laisser place
à ceux qui ont capitulé en s’associant
au projet occidental ; ce qui signifie
qu’à Gaza, tout dirigeant récalcitrant
qui refuse de déposer les armes est
menacé.
2.
Destruction, autant que possible, de
l'arsenal de roquettes que la Résistance
a pu accumuler depuis l’opération
« Plomb durci » sur Gaza en 2008- 2009.
3.
Domestication de la situation à Gaza
pour en arriver à un statu quo qui
paralyserait, limiterait, voire
anéantirait la Résistance, comme cela se
passe en Cisjordanie à cause de la
répression sécuritaire imposée par les
« organes du pouvoir d’Oslo », en
coopération avec les services de
sécurité israéliens.
Objectifs stratégiques et militaires
Israël et l'Occident, sous leadership
US, veulent tester les gouvernements
nouvellement constitués dans la galerie
du « printemps arabe » mensonger [1],
pour s’assurer de la validité de leur
transaction « Pouvoir mondial pour nous,
contre autorité locale pour vous » [2]
avant de se précipiter à s’engager plus
en avant, politiquement et
militairement, sur le terrain de la
crise syrienne ; d’autant plus qu’il est
désormais certain que la réalisation de
leurs objectifs en Syrie exige qu’ils
s’assurent des véritables dispositions
de ces gouvernements concoctés à la hâte
et sous bannières religieuses, notamment
pour ce qui concerne la liquidation de
la Résistance dans la bande de Gaza.
Mais Israël a des objectifs plus directs
en relation aussi bien avec ses
prochaines élections législatives
qu’avec la récolte de renseignements
utiles sur l’organisation militaire, les
plans et les armes adoptés par la
Résistance pour fortifier son front
intérieur depuis 2006 et 2009 ; afin de
rétablir la force de dissuasion
israélienne et de restaurer son prestige
avant toute action contre le Liban, la
Syrie, ou l'Iran.
Plan en quatre étapes
Pour atteindre ses objectifs, il semble
qu’Israël ait adopté un plan
suffisamment souple pour lui permettre
de s’adapter à toutes les éventualités,
de telle sorte qu’il puisse le suspendre
à tout moment sans s’infliger une
nouvelle défaite, faute d’avoir pu
atteindre son but ultime ; celui
d’occuper à nouveau et momentanément la
bande de Gaza. Nous pensons que ce plan
est censé se dérouler en plusieurs
étapes :
1.
La première étape est telle que nous
l’avons constatée, intensive, et menée
essentiellement par l'aviation. Elle
vise la liquidation du maximum possible
de dirigeants intra-muros et de
roquettes stockées, avec le sempiternel
argument de ne cibler que des
terroristes et d’épargner les civils ! À
ce stade, Israël peut considérer avoir
atteint son objectif en assassinant
Ahmad al-Jaabari, l’un des plus
importants dirigeants de la Résistance,
et en ayant prétendument détruit une
grande partie de l’arsenal en stock.
2.
La deuxième étape est censée suivre, si
l'environnement local et international
s’y prête, sans oublier que la décision
israélienne dépendra aussi de la riposte
de la Résistance. Sa mise en œuvre
consistera probablement à assiéger la
bande de Gaza sur une profondeur allant
de 3 à 5 Kms pour interdire, autant que
faire se peut,
l'utilisation
des roquettes et détruire un maximum de
tunnels ; ce qui empêcherait le
réapprovisionnement. Là aussi, Israël
pourrait prétendre avoir atteint son
objectif.
3.
La troisième étape consisterait à
occuper des couloirs d’une largeur de 2
à 3 Kms à l’intérieur même de Gaza, afin
de diviser le terrain en plusieurs
compartiments qu’il suffira d’encercler
pour ne pas avoir à s’engager dans une
confrontation directe avec les
combattants en pleines zones
résidentielles.
4.
La quatrième étape autoriserait
l’occupation de toute la bande de Gaza
et l’éradication de l’organisation de la
Résistance ; ce qui rappelle le procédé
adopté en 1982 au Liban. D’ailleurs,
Israël a commencé la préparation des
deux dernières étapes en demandant le
rappel de 75 000 réservistes [3]
et en conditionnant l’opinion
internationale à accepter et sa décision
et ses conséquences !
C'est ce que nous pouvons déduire à
partir de la conduite des opérations sur
le terrain, et désormais il est devenu
très clair que la suspension ou la
poursuite de l'agression jusqu’à son but
ultime dépendent de deux facteurs :
1.
Le premier facteur relève des
performances de la Résistance, en
particulier de sa gestion des tirs pour
suffisamment inquiéter l’ennemi et
produire l'effet dissuasif souhaité.
Ici, nous rappelons qu’il n’est pas
nécessaire d’intensifier les tirs car
leur fonction n’est pas de détruire,
mais de dissuader. Sur ce point, nous
jugeons que le résultat est pour le
moment positif, d’autant plus que
certaines surprises sont venues
confondre le camp d’en face,
notamment les frappes précises de cibles
dans la région de Tel-Aviv.
2.
Le deuxième facteur relève des réactions
régionales et en particulier de celle de
l’Égypte qui pourrait peser
presqu’autant que les performances de la
Résistance, quoique nous constatons, au
moment où nous rédigeons cette analyse,
que les prises de position
internationale, régionale et de certains
des pays arabes
travaillent
plutôt en faveur d'Israël et
l’encouragent à poursuivre son
agression ; ce qui nous rappelle, là
aussi, l’environnement
de
la guerre de 2006 contre le Liban.
Ceci dit, la question est de savoir si
la complicité de ces pays arabes sera
aussi manifeste contre Gaza que contre
la Syrie, maintenant que nous avons
assisté à la trahison de leur « Ligue ».
Sinon, comment expliquer leur soumission
à Israël alors qu’ils ont sorti leurs
griffes contre la Syrie et le peuple
syrien ? Telle restera notre opinion et
notre souci sans révision aucune, tant
que l'Égypte ne menacera de geler ou
d’annuler les accords de Camp David, ne
brisera le siège de Gaza par la
réouverture, sans conditions, du passage
de Rafah, permettant à la Résistance de
se défendre par les armes ; tant que les
« ourbanes » ne cesseront de coopérer
avec les USA sur les dossiers arabes et
régionaux, à commencer par le dossier
syrien ; et tant que ces pays arabes ne
se dirigeront vers l'Assemblée générale
des Nations Unies pour condamner les
agressions israéliennes et les sommer de
cesser de s’opposer à la reconnaissance
de la Palestine en tant qu’ État
observateur.
Faute de telles prises de position, nous
considérons que leurs déclarations sont
creuses avec pour seules valeurs,
l’incitation d’Israël à poursuivre son
agression et la confirmation de leur
collusion avec l’ennemi. D’un autre
côté, il n’est pas possible de s’en
remettre aux vœux pieux de l’Occident ou
aux déclarations israéliennes en
espérant que l’agression cesse.
Cette agression ne s’arrêtera que par la
dissuasion armée d’une Résistance,
soutenue par son Axe véritable et par
les fermes positions des pays arabes,
initiées par l’Égypte.
Dr Amin Hoteit
19/11/2012
Article original : Al-Thawra
http://thawra.alwehda.gov.sy/_kuttab.asp?FileName=13333580720121119005433
Article traduit de l’arabe par Mouna
Alno-Nakhal [Biologiste]
Lire aussi :
[2] Syrie : Les signes avant-coureurs de
la faillite de l’Occident !?
http://www.mondialisation.ca/syrie-les-signes-avant-coureurs-de-la-faillite-de-loccident/5305261
[3] Israël rappelle 75 000 soldats sous
les drapeaux pendant que les
bombardements se poursuivent à Gaza
http://www.mondialisation.ca/israel-rappelle-75-000-soldats-sous-les-drapeaux-pendant-que-les-bombardements-se-poursuivent-a-gaza/5312286
Le Docteur Amin Hoteit est
libanais, analyste politique, expert en
stratégie militaire, et Général de
brigade à la retraite.
Les dernières mises à jour
|