Al-Ahram Hebdo
La voix d'Obama à
l'Unesco
Mohamed Salmawy
Photo Al-Ahram
Mercredi 9 septembre 2009
Au moment où le monde arabe est encore sous le charme du
discours du président américain Barack Obama en juin dernier au
Caire, un autre son de cloche a commencé à se faire entendre à
l’Unesco, guerroyant avec véhémence contre le candidat retenu
par le monde arabe et islamique, sans compter les pays africains
et quelques pays asiatiques et latino-américains.
Les informations provenant de sources avisées au sein de
l’Unesco à Paris font état d’une contradiction flagrante et
inquiétante entre les propos d’Obama au Caire et les actes dans
les couloirs de l’organisation du représentant américain. De
quoi saper la crédibilité de la nouvelle politique américaine
envers les Arabes, les musulmans et le tiers-monde de façon
générale. De quoi aussi contredire toutes les déclarations
américaines, ces derniers temps, affirmant que les relations
avec l’Egypte sont stratégiques et très solides.
Ainsi, à l’approche des élections au poste du
directeur général de l’Unesco, prévues le 18 septembre prochain,
l’activité du représentant américain s’est intensifiée pour
tenter de dissuader les pays ayant apporté leur soutien au
ministre égyptien de la Culture Farouk Hosni de continuer à le
faire. Pour ce faire, il a eu recours à tous les stratagèmes. A
commencer par raviver les accusations juives qui y voient un
antisémite dont la politique repose sur l’incinération des
livres (!!) jusqu’à insinuer que les Etats-Unis pourraient
couper leur aide financière à l’Unesco.
Il a même été question de semer la zizanie
dans le bloc arabe en tentant de convaincre certains pays de
voter pour une autre candidate d’Amérique latine arguant du fait
qu’elle est d’origine arabe.
Si ce représentant avait été un résidu de
l’administration Bush, on aurait dit qu’il continue à agir selon
d’anciennes directives que la nouvelle administration n’a pas
cru bon de réviser. Or, la représentante officielle des
Etats-Unis du temps de Bush a été rappelée après la fin de son
mandat et elle a été remplacée par un nouveau représentant qui
est supposé travailler selon les orientations de la nouvelle
administration.
Depuis la nomination de Hillary Clinton, il a
souvent été dit qu’en ce qui concerne la question de l’Unesco,
elle œuvrerait à satisfaire les communautés juives. Et ce ne fut
pas un hasard de voir entrer suite à cela dans la course au
poste de directeur général de l’Unesco une candidate
latino-américaine qui a des origines arabes et a une relation
d’amitié avec Hillary Clinton.
Israël s’est engagé devant le président Hosni
Moubarak à stopper sa campagne contre le ministre Farouk Hosni
bien qu’opposé à sa candidature. Mais il semblerait que Tel-Aviv
ait délégué ce rôle aux communautés juives à travers le monde.
Et voilà que les Etats-Unis se sont aussi substitués à Israël au
sein de l’Unesco. Une situation humiliante pour ce grand pays et
en totale contradiction avec les politiques annoncées par
l’administration américaine. Bref, une situation qui ne sert en
rien les intérêts américains.
J’ai rencontré l’un parmi des grands hommes
politiques américains lors de sa visite au Caire en préparation
à celle de Barack Obama. Il avait eu des entretiens avec
plusieurs personnalités égyptiennes à la résidence de
l’ambassadrice américaine. Je lui ai alors posé une question sur
la position de la nouvelle administration face à la candidature
égyptienne à l’Unesco. Il a fortement nié toute opposition à
cette candidature et l’un des membres de la mission diplomatique
américaine au Caire est intervenu affirmant que la partie
américaine n’a aucun conflit avec le ministère égyptien de la
Culture. Et que durant toute la période de son travail au Caire,
les relations égypto-américaines dans le domaine culturel ont
été plus positives en déclarant devant le grand responsable
américain : « Nous n’avons ici aucun problème avec le ministère
de la Culture ».
Avec la fin du mandat de l’ancienne
représentante des Etats-Unis à l’Unesco, l’hostilité américaine
s’est beaucoup atténuée et nous nous sommes imaginés que la
nouvelle administration a refait ses calculs quant à cette
question comme à tant d’autres. Mais voilà qu’elle adopte la
même position que celle officiellement abandonnée par Israël,
devenant ainsi le principal obstacle à l’accession de l’Egypte à
la tête de l’Unesco. Est-ce donc la politique officielle
américaine ou la politique du secrétariat d’Etat en l’absence de
directives claires de la Maison Blanche ?
Nous avons osé imaginer que la politique de
soutien infaillible à Israël aux dépens des droits arabes avait
changé lorsqu’Obama avait clamé haut et fort de toute sa voix
ses nouvelles tendances. Or, il semblerait que cette voix n’a
pas porté plus loin que Le Caire. A l’Unesco, les Etats-Unis
parlent d’une autre voix qui n’est en rien différente de celle
qu’on entendait du temps de Bush. Une voix aux intonations
faites de pressions, de menaces et d’insinuations de suspendre
l’aide financière à l’organisation si cette dernière se plie à
l’opinion de la majorité des peuples du monde et froisse Israël.
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Publié
le 12 septembre 2009 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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