Opinion
Syrie : les cartes
se sont redistribuées
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Lundi 10 juin
2013
Depuis
quelques jours, l'Observatoire syrien
des droits de l'homme (OSDH), duquel il
faut toujours dire qu'il «s'appuie sur
un vaste réseau de militants et de
sources médicales civiles et
militaires», n'a plus tellement
d'informations et ne produit plus que
des hypothèses et des suppositions
mêlées de ses «inquiétudes»
londoniennes. Qu'à cela ne tienne, il
continue d'être cité et de servir de
référence. Samedi dernier, l'un de ses
communiqués fait le tour de la presse
mondialisée, où il se pose cette
question : «Où sont les centaines de
civils et de blessés qui ont fui Qousseir pour se réfugier à Boueida al-Charqiya
? On n'a aucune nouvelle d'eux.» Les
journaux, qui l'ont reprise, avaient
pourtant tout le loisir de s'enquérir
des faits à partir de reportages-live
des localités citées. Ils seraient au
moins plus avancés sur la chose. Mais en
ont-ils l'intention ? Certainement que
non, puisqu'ils se réfèrent aussi à
l'OSDH en tant que source sur
l'offensive de l'armée syrienne qui,
pourtant, est officiellement annoncée
sur tous les canaux disponibles,
accompagnée d'images et de déclarations.
Et bien non ! On ne change pas d'agence,
fut-elle coupée de tout, quand on en a
fait «la voix de la vérité» depuis le
début de la guerre propagandiste. Et
puis, à la guerre comme à la guerre,
tous les coups sont permis, même au prix
du discrédit le plus profond. Un
exercice auquel se livre le Monde qui
perd tout sens de la mesure, au point de
rivaliser avec la télévision de l'émir
qatari, Al Jazeera. Comme on a pu s'en
convaincre avec l'incroyable prétention
de ses reporters de s'ériger en
spécialistes accrédités des armes
chimiques. Hier, c'est au service d'un
professeur des universités à Sciences Po
qu'il fait appel, une coutume qui
s'installe, si on tient compte du fait
que cela a été fait récemment concernant
l'Algérie. Cette fois-ci, c'est à propos
de la Syrie qu'un docte personnage livre
un article intitulé «La Syrie passe sous
contrôle de l'Iran et du Hezbollah».
Très accrocheur, le titre. Mais on
s'attendrait plutôt à une analyse
circonstanciée et fouillée du sujet. On
est vite déçu, car le texte débute en
reportage de guerre. Ce qui est pour le
moins inattendu d'un enseignant qui n'a
pas bougé de son bureau. «L'essentiel de
la contre-insurrection urbaine est
assuré par les commandos du Hezbollah,
encadrés par les pasdarans iraniens –
gardiens de la révolution – alors que
l'armée du dictateur syrien assure le
soutien de l'artillerie et de ses
blindés.» Comme s'il y était et plus que
cela. Il ose cette description des
combats quand même l'OSDH et ses relais
médiatiques sont plus circonspects sur
l'appui du mouvement de résistance
libanais à l'armée syrienne. Ensuite, il
peut tout se permettre pour atteindre
l'objectif qu'il s'est assigné, celui de
mettre face à face les chiites et les
sunnites, seuls sur le terrain. Exit les
«révolutionnaires laïcs» de ce qui est
appelé ALS, exit le pouvoir syrien laïc
lui aussi, plus que le Hezbollah et le
front Ennosra. Pour que tombe ce cri du
cœur : «Il faut sauver au plus tôt le
peuple syrien du choc entre les
apprentis sorciers de la fin des temps.»
Toute la détresse non pas d'un
intellectuel préoccupé de l'humain, mais
d'un colonialiste privé de sa victoire.
Article publié sur
Les Débats
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