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Mon agression par les gendarmes
Addelaziz Chaambi
Abdelaziz Chaambi - Photo: David Friedman / MSNBC.com
Samedi 31 janvier 2009 Suite à mon agression par
des gendarmes devant le Casino des Partouche Le Lyon Vert à
Charbonnières Les Bains 69, dans lequel se déroulait le repas
annuel du CRIJF, je tenais, avant de vous relater les faits, à
remercier très sincèrement toutes les personnes qui m’ont
apporté des messages de sympathie, d’encouragements et de
soutiens dans cette épreuve qui m’a certes amoché physiquement,
mais renforcé moralement et politiquement. Les messages reçus de
France et de l’étranger m’ont fait chaud au cœur, et renforcé ma
détermination à continuer la lutte et à résister à l’oppression
et à l’injustice.
Compte tenu des massacres qui ont eu lieu à Gaza
et sachant que des hommes et femmes politiques (dont le
président du Sénat Mr Larcher) complices par leur silence ou
leur approbation allaient venir à ce diner du CRIJF, nous avons
voulu manifester notre désapprobation en petit groupe et de
manière pacifique.
Arrivés sur les lieux et alors que nous aurions
pu nous infiltrer par un petit chemin jusqu’à l’entrée du
Casino, nous avions opté pour la transparence et la visibilité
en marchant sur la route principale en direction de l’entrée, en
commençant à crier nos slogans. C’est alors que nous avons vu
arriver sur nous un groupe de gendarmes très violents, qui ont
commencé à nous brutaliser, nous bousculer, et tenter de nous
enlever les mégaphones, la percussion, en nous repoussant loin
de l’entrée qui se trouvait déjà à 100 mètres .
Nous avons expliqué que nous venions mener une
action citoyenne non violente qui visait à dénoncer les
massacres commis à Gaza et le soutien apporté par le CRIJF à
l’action criminelle des sionistes. Les gendarmes ont alors
temporisé leurs actions en attendant du renfort, et au bout
d’une heure environ, on a vu arriver des dizaines de gendarmes,
qui étaient alors plus d’une cinquantaine, pour une vingtaine de
manifestants, nous foncer dessus et nous obligeant à reculer
pour être à environ 150 mètres (distance exigée d’après eux par
le Préfet pour que ces convives puissent manger sans être
incommodés par nos slogans) .
Devant cette brutalité et cette violence
gratuite que rien ne justifiait, ni le nombre ni l’attitude ni
les slogans, ni la proximité du lieu, nous avons expliqué que
nous ne faisons rien de mal et qu’on exprimait une opinion
politique. J’ai personnellement pris le mégaphone pour expliquer
que c’était une manifestation non violente, qu’on ne devait pas
provoquer ou répondre aux provocations, et que nous devions nous
asseoir, ce que tout le monde a fait. Mais rien n’y fait, les
gendarmes continuent à charger, à nous transporter un par un et
à un moment, j’entends l’un d’eux dire « c’est lui, tire le,
tire le », et c’est alors que j’ai été arraché du groupe par
cinq gendarmes qui m’ont retiré en arrière pendant que leurs
collègues en masse ont continué à repousser notre groupe, de
façon à ce qu’un rideau de gendarmes se forme entre mes amis
(qui ne voyaient plus ce qui se passait) et moi.
C’est alors que le calvaire commence, après
m’avoir soulevé en l’air, ils m’ont jeté à terre et se sont rués
sur moi et m’ont littéralement lynché : une rouée de coups de
poing et de pieds qui m’ont mis à terre, j’avais beau crier que
je n’avais rien fait que j’étais prêt à les suivre rien n’y
faisait, alors que j’étais à plat ventre et que deux gendarmes
me tenaient le cou et les épaules à l’arrière, un autre me
tenait les jambes et deux autres se sont jetés sur mon dos pour
me donner des grands coups de genoux à hauteur des poumons ce
qui m’a fait suffoquer. Je n’arrivais plus à respirer, ni à
crier ni à faire quoi que ce soit, j’ai senti mon visage écrasé
sur le goudron par un coup de pied.
Après m’avoir menotté les mains dans le dos, ils
m’ont relevé pour me mettre dans leur voiture et ont alors
réalisé que je n’arrivais pas à respirer et que je commençais à
perdre connaissance. J’ai trouvé la force de leur dire que
j’avais un flacon de ventoline dans ma poche, et que j’étais
asthmatique, et c’est un homme en civil (je pense un de leurs
supérieurs) qui l’a pris et m’en a donné pour que je retrouve
mon souffle. Ils m’ont ensuite chargé dans la voiture avec les
mains menottées dans le dos en me disant, on va t’emmener au
poste et on va t’expliquer les choses. Puis à mi chemin, ils ont
reçu un message dans leur radio et ont fait demi-tour pour me
ramener au lieu du rassemblement. Les copains avaient exigé
fermement mon retour.
Alors que j’étais souffrant, que je respirai
très difficilement et blessé, ils m’ont jeté sur la route dans
un froid glacial sans répondre à ma demande d’appeler le Samu.
J’ai appelé moi-même le 112, qui m’ont orienté sur le Samu qui
me dit on vous envoie la Police. J’explique alors que j’ai été
agressé par des gendarmes et que j’ai besoin d’une ambulance ou
d’un médecin, mais rien n’y fait.
On ne verra ni Police ni médecin. Un médecin de
passage en voiture a voulu s’arrêter pour me soigner et voir mon
état, mais les gendarmes l’en ont empêché, et j’ai attendu une
heure sans couverture sans soins et malgré les appels successifs
des manifestants au 15, les pompiers ne sont arrivés qu’une
heure après le premier appel, et lorsqu’on leur a demandé depuis
combien de temps ils ont été appelés, ils nous répondu 5 ou 10
minutes, ce qui veut dire que durant 50 à 55 minutes le Samu n’a
pas mobilisé de secours, mettant ainsi ma santé et ma vie en
jeu.
J’ai été pris en charge à l’Hôpital Saint Joseph
à Lyon où j’ai eu droit à 8 jours d’arrêt de travail et 4 jours
d’ITT et au constat que j’avais une entorse cervicale, de
nombreuses dermabrasions des membres et du visage, avec des
atteintes à la colonne vertébrale, une épaule démontée, des
douleurs et traces de coups à la tête, un nerf du bras abimé
avec la main droite insensible à motié.
La leçon qu’on peut tirer de cette agression,
c’est qu’aujourd’hui en France un degré dans l’inacceptable
vient d’être franchi par les autorités, qui , après avoir
diabolisé et criminalisé des militants, après les avoir chassés
du monde du travail et jetés dans la précarité, cherchent à les
éliminer physiquement et à les empêcher de parler de certaines
causes et en particulier la cause Palestinienne.
Il est impératif de réagir avec la plus grande
fermeté et de ne pas baisser les bras jusqu’à obtenir la
garantie que cette agression ne restera pas impunie et que les
droits à dénoncer les crimes et les politiques sionistes soient
garantis dans ce pays et partout. L’enjeu consiste donc à tenter
de préserver le peu d’espace qu’il reste à notre liberté
d’expression , de manifestation et de condamnation de l’infamie
et de l’injustice.
Plusieurs organisations, mouvements et
associations s’apprêtent à mener des actions pour dénoncer ce
que j’ai personnellement subi ainsi que cette atteinte grave aux
libertés et à l’intégrité des citoyens. Merci à toutes et à
tous, la résistance continue !!!
Publié le 1er février 2009
avec l'aimable autorisation d'Oumma.com
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