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La Section
palestinienne
de l'Union internationale
de la presse francophone
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Le
français dans les médias palestiniens
La
langue française dans les médias palestiniens était le thème de
l'atelier organisé par la Section palestinienne de l'UPF le 2 juin
dernier au Village des arts et de l'artisanat, en présence des principaux
acteurs et consommateurs de la francophonie dans la région, dont Régis
Koetschet Consul général de France à Jérusalem et Mohammad
al Whidi nouveau Directeur général de la télévision palestinienne (PBC).
Hassan Balawi, secrétaire général de la Section , après avoir
chaleureusement accueilli l'auditoire, a demandé une minute de silence
pour les journalistes palestiniens et étrangers morts dans l'exercice de
leur fonction et en particulier pour le journaliste libanais d'origine
palestinienne Samir Kassir, mort le jour même dans l'explosion d'une
voiture piégée à Beyrouth.
Régis Koetschet a rendu hommage au travail de la Section
palestinienne de l'UPF, notamment à sa solidarité avec les journalistes
français enlevés en Iraq et a lancé un nouveau vibrant appel à la libération
de Florence Aubenas et de son guide Hussein Anoun.
Parmi les points forts de son intervention, soulignons :
. L'importance de la langue française
dans les médias palestiniens :
o Apport de l'information
palestinienne en français en Palestine et diffusée dans le monde par la
chaîne satellitaire et Internet, qui montre qu'entre autres on peut faire
de l'information rigoureuse et de qualité même dans des conditions
difficiles. Par exemple les émissions de la radio universitaire de
Naplouse sont rediffusées en France sur des radios locales.
o Communication importante de la
diversité culturelle et linguistique.
Toutes les langues sont des vecteurs de communication. L'information pour
la diversité culturelle doit se faire dans toutes les langues.
o Formation : témoigner de l'usage de
la langue des médias dans le processus de formation linguistique comme
par exemple le magazine Crayon palestinien. Le consulat souhaite également
accompagner la formation de journalistes et propose de mettre les
CCF (centres culturels français) à la disposition des médias
palestiniens. Le centre culturel franco-allemand de Ramallah a déjà reçu
du matériel d'Arte, symbole de diversité linguistique et du rôle de la
presse dans ce domaine.
. La pertinence de
l'atelier qui vient à point nommé après neuf ans d'expérience, moment
de réflexion pour aller de l'avant, l'information étant au service du développement
: promouvoir les médias pour un développement citoyen.
. L'opportunité de développement
de la coopération décentralisée avec les médias locaux
francophones.
Mohammad al Whidi a salué les apports capitaux de la France dans la
naissance et le développement des médias palestiniens, notamment la télévision.
Il a précisé que la télévision palestinienne est dans une phase
d'inspiration du modèle français notamment le CSA (conseil Supérieur de
l'Audiovisuel).
Mohammad al Shrafi, président du syndicat des journalistes, s'est félicité
de l'usage de la langue française dans les médias palestiniens, une
langue certes difficile pour les palestiniens, mais belle et riche qui
exprime les valeurs d'égalité, de fraternité et de solidarité de la révolution
française qui ont inspiré la lutte palestinienne. Il a ensuite souligné
les positions politiques courageuses de la France et de son président à
l'égard de la Palestine , notamment en accueillant le président Yasser
Arafat lors de son dernier voyage.
Ali Hussein président de la section palestinienne de l'UPF, a
placé la naissance et le développement des médias palestiniens
francophones dans le contexte de l'évolution des relations
franco-palestiniennes contemporaines.
Contrairement à beaucoup de mouvements de luttes d'indépendances de l'époque,
l'OLP s'est tournée en plus de l'Union Soviétique vers l'Occident et en
particulier la France.
Ce processus est parti de la position du Général de Gaulle contre
l'occupation israélienne de 1967 et de la rencontre de son représentant
avec Yasser Arafat chef de la résistance palestinienne en Jordanie en
1968. De là est né le premier bulletin palestinien francophone. Mahmoud
Al Hamshari, premier représentant du Fatah en France, crée le bulletin
francophone "Fatah-Info" en 1970. Après l'assassinat de Mahmoud
Al Hamshari en 1972, Ezzedine El Kalak, premier directeur du
"bureau de liaison et d'information" de l'OLP en France reconnu
par les autorités françaises, reprend en 1974 "Fatah-Info"
devenu par la suite "Palestine-Info". C'est à cette époque
qu'a lieu la première rencontre à Beyrouth entre le chef de l'OLP,
Yasser Arafat et Jean Sauvagnargues, ministre des affaires étrangères
français. En 1979, l 'Information Unifiée de l'OLP (organe regroupant
tous les médias de l'OLP), lance depuis Beyrouth le magazine
"Palestine" en anglais et en français jusqu'au départ de l'OLP
du Liban en 1982. L 'édition francophone est ensuite réalisée en
Belgique avant d'être installée à Tunis jusqu'en 1994. Toujours dans
les locaux de l'Information Unifiée, "Palestine" continue à
sortir en français, en plus des éditions anglaise et espagnole. Autres
publications éditées en français : "Lettre de Palestine", sur
un nombre réduit de pages, sans oublier la "Revue d'études
palestiniennes" de l'Institut des études palestiniennes, publiée à
Paris à partir de 1980 sous la direction de l'écrivain et poète Elias
Sanbar. Elle regroupe l'élite des écrivains palestiniens de pays arabes
et européens. De retour en Palestine, le jeune Ministère de
l'Information reprend en 1995 la publication du bulletin "Lettre de
Palestine", diffusé dans un public francophone de plus en plus large
en Palestine, et envoyé dans les pays francophones. Hassan Balawi a
ensuite résumé le développement du programme français à la
PBC "Palestine-Info"(en hommage à Ezzedine El Kalak) démarré
le 9 janvier 1996.
L'équipe d'abord composée de bénévoles francophones sans formation
journalistique, a acquis une expérience sur le terrain et a été salariée
un an plus tard. Son contenu s'est diversifié, allant de l'actualité
palestinienne à l'actualité internationale, en passant par des
reportages sur la vie culturelle et sociale. La Francophonie dans ses
diverses manifestations a occupé, et occupe encore une place importante
sur "Palestine-Info". Son contenu s'est également enrichi de
l'apport essentiel de CFI (Canal France International) qui a offert à la télévision
palestinienne un décodeur permettant de recevoir tous les jours un
bulletin d'informations en français, des images sans logo, des
documentaires et des variétés, pas seulement utiles au programme français
car certains sujets doublés ou sous-titrés arabe profitaient à tous. Le programme
francophone permet de renforcer les liens de la PBC avec des institutions
médiatiques euro-méditerranéennes, telles que la CMCA et la COPEAM.
C'est ainsi que l'équipe de "Palestine-Info" a coordonné une série
de co-productions entre plusieurs télévisions étrangères et la télévision
palestinienne. C'est aussi l'équipe francophone qui assure des projets importants pour la télévision
palestinienne, tels que le CAPMED sur la conservation des archives
audio-visuelles dans tout le bassin méditerranéen.
S'en est suivi un duplex avec les radios de Ramallah (Voix de Palestine),
Hébron (radio Mara), et Naplouse (radio al Najjah) qui ont chacune un
programme en français.
Fatima Nasser, responsable du programme français à la radio Voix de
Palestine est intervenue depuis Ramallah en rappelant que le programme est
né en mars 1996 et que l'équipe de trois personnes prépare un programme
d'une demi-heure quotidienne sur l'actualité avec une revue de presse, un
reportage sur le patrimoine palestinien et un programme de variétés.
Isabelle Auras enseignante de français à l'université el Najjah de
Naplouse a donné par téléphone une courte présentation du programme
mensuel, transmis par Internet en France. Comme l'indiquait une étudiante,
ce programme contribue à l'amélioration de leur niveau en français.
Chantal Abu Eisheh de Association d'échanges culturels Hébron-France a
expliqué depuis Hébron la naissance de leur programme bilingue
"regards croisés", bihebdomadaire avec une revue de presse, des
interviews, des sujets de société et des variétés.
Une radio est en cours d'élaboration également à Bethléem à la faculté
et gestion hôtelière et de sciences humaines.
Nathalie Pépiot coordinatrice de l'enseignement du français à Gaza a présenté
le magazine Crayon palestinien publié à trois mille exemplaires, créé
par et pour les élèves, se félicitant de cette graine de francophonie
et de ce ferment journalistique.
Walid el Louh du Comité général de l'information (SIS), a présenté sa
page quotidienne en ligne traitant de l'actualité et destinée aux
journalistes et ONG. Liée à la deuxième l'Intifada, et démarrée en
2002, elle est rédigée par deux fonctionnaires non formés et un
budget très réduit. Ils sont aidés de façon ponctuelle par des bénévoles
internationaux de passage.
Après la présentation des différents médias, Hassan Kashef écrivain
et conseiller du ministre de l'information, a estimé que tout ce
qui a été présenté n'était pas suffisant et que les médias
palestiniens francophones devaient faire un effort pour développer les
programmes. Il a ajouté que la francophonie devait être une contre
culture américaine et que les palestiniens "souhaitaient consommer
de la culture francophone", précisant que les médias devaient
s'adresser à la jeunesse et non plus seulement à une élite et qu'ils
devaient promouvoir des programmes pédagogiques et éducatifs avec entre
autres des dessins animés absents de ces médias.
Marianne Blume, enseignante au département français de l'université el
Azhar, après avoir rappelé que la francophonie ce n'était pas seulement
la France , a mis l'accent sur l'importance d'adapter le langage à la
cible et donc qu'il ne suffisait pas de traduire de l'arabe en français
pour être
compris par l'Occident mais qu'il était nécessaire de s'adapter à
la forme de pensée occidentale pour que le message puisse passer.
Ziad MedouKh, responsable du département français à l'université al
Aqsa a regretté que la PBC soit peu regardée par les étudiants, au
profit de TV5. Il a indiqué qu'il se servait lui-même de ce programme
dans ses cours et a proposé que soient élaborés des programmes pédagogiques
dans lesquels les étudiants seraient impliqués.
Rami Fayyad, Coordinateur des écoles a rappelé que 80% du public
potentiel des médias francophones étaient les élèves des collèges et
lycées et les étudiants d'universités. A ce titre, il était important
de promouvoir leur travail par une couverture médiatique qui
participait à l'essor de la francophonie pour les encourager. La
transmission par la chaîne satellitaire palestinienne des ces programmes
contribuerait également à donner une image positive et dynamique de la
Palestine. Des programmes d'apprentissage linguistique pourraient être développés
à la PBC , et les élèves devraient pouvoir être partie prenante dans
la création d'émissions de Palestine-Info.
Dynamique de l'atelier :
La Section palestinienne de l'UPF tiendra prochainement une réunion pour
tirer les enseignements et les conclusions de cet atelier-débat, une
autre est prévue entre les acteurs de la francophonie dans les médias
palestiniens pour élaborer des propositions concrètes.
Pour autant, nous pouvons déjà dégager un certains nombre
d'enseignements qui ouvriront le débat :
La présence du nouveau directeur général de la PBC et celle du
conseiller du ministre de l'information, en ces temps où les médias
palestiniens sont dans une phase de transition, marquent une continuité
de l'intérêt que porte l'Autorité Nationale Palestinienne au développement
de la francophonie dans les médias palestiniens.
Au-delà de son soutien moral, Régis Koetschet Consul général de France
a donné sa définition d'axe d'intérêt commun entre la francophonie et
les médias palestiniens.
Il est clair à partir de cet atelier que ceux qui sont intéressés au développement
de la francophonie disposent d'une première ébauche de base de données
sur les actions en faveur de la francophonie dans les médias
palestiniens. Une première évaluation dans le public a permis aux
journalistes de ces médias et leurs responsables de se rendre compte de
l'écho de leur travail d'en tirer surtout les enseignements :
Cet atelier a permis aussi de donner des orientations vers lesquelles les
médias palestiniens doivent concentrer leur travail, notamment dans le
domaine pédagogique et éducatif, collaboration avec les écoles et les
universités.
Cet atelier a aussi permis d'établir un lien entre les acteurs à Gaza et
ceux de la Cisjordanie. Des perspectives d'actions communes sont déjà en
préparation.
Un sondage réalisé actuellement auprès du public va nourrir
encore les réflexions à venir.
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