Rapport
Souvenirs d’un détenu politique :
torture à nu et privation de sommeil (1)
CPI
Photo: CPI
Samedi 28 février 2015
Cisjordanie – CPI
Le jeune Palestinien Motassim Samir Saqf Al-Hit, 26 ans,
vient de quitter la prison de l’autorité
palestinienne de Janid, dans la ville de
Naplouse. Il n’est pas encore prêt
d’oublier les moments difficiles et la
dure torture qu’il a subis dans cette
prison de Janid et dans celle d’Ariha.
Motassim a survécu un mois des plus
difficiles de toute sa vie, pour des
raisons politiques.
Le jeune Motassim
parle de ses souvenirs douloureux, de ce
qu’il a subi durant sa détention,
débutée le 13 janvier 2015. Et notre
Centre Palestinien d’Information (CPI)
publie son mémoire en deux épisodes,
sans commentaire. En voilà le premier :
Motassim
raconte son calvaire
« Le 13 janvier 2015,
une convocation m’a demandé de passer au
siège du service des renseignements,
dans la ville de Naplouse, dans la zone
d’Al-Makhfiyya. Après deux heures
d’interrogation sur place, on m’a
transféré à la prison de Jénid.
» Dans la prison de
Jénid, l’enquête a débuté sans parler
d’un sujet particulier. D’emblée,
l’enquêteur m’a dit : "Allez ! Vide ce
que tu as !". Je lui ai répondu : "Je
n’ai rien à dire". Il m’a dit : "Tu sais
bien pourquoi nous t’avons convoqué.
Allez, parle !". Je lui ai répondu :
"Non, je n’en sais rien". A cette
réponse, l’enquêteur a commencé à me
menacer, en me disant : "Ton dossier, tu
vas le fermer et tu vas en parler, sans
force ou avec".
» L’enquêteur m’a
demandé : "Quelle est la période la plus
longue passée dans les prisons ?". J’ai
lui répondu : "On m’a interrogé
plusieurs fois aux centres d’Al-Jalma,
de Batih Takfa et du siège du service
préventif". Il m’a dit : "Moi, je vais
faire le record avec toi. Tu vas passer
la plus longue période d’enquête ; tu
vas voir" ».
La
position à nu
« Vers deux heures de
l’après-midi du premier jour, le jour où
la Palestine vivait l’orage neigeux Hoda,
l’enquêteur m’a dit : "Je vais appliquer
un plan avec toi. Je vais te poser une
question toutes les demi-heures. Si tu y
réponds, ce sera bon. Sinon, tu laisses
tomber un de tes vêtements. Il a
vraiment commencé à me poser des
questions, mais qui n’avaient rien à
voir avec moi. Au bout de trente
minutes, il me pose une question et me
demande de quitter un de mes vêtements,
jusqu’à ce qu’il ne me reste que ma
culotte », raconte Motassim.
» Bien que je tremble
de froid, l’enquêteur a versé un seau
d’eau sur mon corps. De plus, il a
ouvert la porte et une fenêtre afin de
laisser le courant d’air me ravager. Peu
après, il a demandé à un policier de lui
apporter un ventilateur. Lorsque ce
dernier lui a dit qu’ils n’en avaient
pas, il est parti chercher, lui-même,
dans les autres divisions, en me
menaçant : "Par Allah, je te
transformerai en un chiffon sec. Je te
sècherai ce soir.
» Nu face à un air
froid, j’ai commencé à sentir les
crampes envahir tout mon corps, surtout
le dos et les bras. Je ne pouvais plus
les bouger. L’enquêteur continuait ses
questions. Avec des histoires créées de
toute pièce, il voulait se donner les
prétextes pour me torturer. Une fois, il
me giflait, une autre fois, il me
donnait des coups au visage, une
troisième fois, il pinçait fortement mon
corps.
» L’enquêteur avait
une copie de mon relevé du compte
bancaire, montrant une somme de quelques
milliers de shekels, quelque deux mille
dollars. Il me demandait d’où je
l’avais, cette somme. Lorsque je lui ai
dit que cela venait de mes salaires
versés par l’autorité, étant un captif
libéré, il s’est mis dans une colère
bleue. Il a commencé à crier : "Vous
n’êtes que des insectes qui prennent nos
salaires. Comment ça se fait que vous
recevez des salaires de l’autorité ?"
Puis il a recommencé à me frapper sur
tout le corps nu avec une règle en
fer ».
Un sac sur
la tête
« Vers le coucher du
soleil, l’enquêteur m’a couvert la tête
avec un sac en plastique et l’a serré
comme s’il voulait m’étouffer. Cinq
minutes plus tard, j’ai senti la mort
s’approcher. Le sac s’est collé à ma
bouche et mon nez, à cause de la sueur
qui inondait mon visage. Suite à mon cri
et ma colère, il l’a retiré.
» Puis il m’a laissé
tomber par terre, les mains liées par
derrière, devant la fenêtre et la porte
ouvertes, nu, jusqu’à deux heures du
matin. A cette heure, il m’a laissé
prendre mes vêtements, mais allongé sur
le sol, mouillé de son eau. Au fil des
heures, il s’absentait, puis il revenait
pour me frapper, m’humilier, m’insulter,
insulter le mouvement du Hamas. Cela a
duré jusqu’à l’aube ».
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