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Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (47)
Photo CPI
Lundi 28 septembre 2009
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage
Hamas : Son histoire de l’intérieur
de Dr. Azzam Tamimi s’inscrit dans
une volonté de montrer au monde la vision du mouvement du
Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le département
français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a donc
jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète,
diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
Hors de la Jordanie (7)
Après environ deux semaines, le groupe se lança dans une grève
de la faim pour exiger leur libération. Cela suivit une seconde
apparition devant la cour militaire à Marka, où deux autres
charges furent ajoutées à leur procès-verbal qui conduisait
potentiellement à la peine de mort. Les nouvelles de leur grève
de la faim atteignirent le monde extérieur par le biais de
parents en visite. Trois jours plus tard, trois des compagnons
furent emmenés au centre médical Al-Hussein à Amman pour un
traitement d’urgence. Le vendredi 15 octobre, des centaines de
Palestiniens au camp de réfugiés d’Al-Wihdat, près d’Amman,
organisèrent une manifestation en solidarité avec les grévistes
pour demander la libération des leaders et activistes du Hamas.
Pour empêcher que la manifestation ne sorte des limites du camp,
les forces de sécurité bloquèrent ses principales entrées,
déployant des véhicules blindés et une police anti-émeute à
proximité. Quelques officiels des Ikhwan participèrent à la
manifestation et s’adressèrent à la foule avant qu’elle ne se
soit dispersée.
Cinq jours plus tard, la grève de la faim fut annulée, en
réponse aux demandes répétées d’un groupe de personnalités
jordaniennes majeures, qui promirent d’intervenir pour mettre
fin à la saga. Les prisonniers du Hamas furent invités par une
rangée d’éminentes figures, dont l’avocat Zuhayr Abu Al-Raghib,
Dr. Ishaq Al-Farhan, Abd Al-Majid Dhunaybat et Haytham Abu Al-Raghib
des Ikhwan jordaniens, ainsi que le ministre de la justice
Hamzah Haddah, représentant le gouvernement. Une équipe de
médecins rendirent visitent aux prisonniers pour exprimer leur
solidarité avec eux de la part de l’Association Médicale
Jordanienne. Ils effectuèrent des examens médicaux et
prescrirent des médicaments pour ceux qui en avaient besoin.
Izzat Al-Rishiq fut finalement arrêté le 7 novembre. Les
autorités surveillaient nombre de ses connaissances, dont deux
journalistes, Samih Al-Ma’aytah, qui travaillait pour le journal
Al-Arab al-Yawm, et Mahmud Al-Khatib, qui avaient tous
deux travaillé dans le passé avec Al-Rishiq à Amman. Al-Ma’aytah
demanda à Al-Khatib de contacter Al-Rishiq pour dire qu’il avait
besoin de le voir rapidement, car il avait un message important
pour lui. Quarante-cinq minutes après qu’Al-Rishiq et Al-Khatib
aient atteint la résidence d’Al-Ma’aytah à Zarqa, à l’est
d’Amman, des agents du DRG soutenus par la police pénétrèrent
dans la maison et arrêtèrent les trois hommes. Ils furent
retenus dans le bureau du DRG à Zarqa, où Al-Rishiq fut
gravement torturé pendant six heures. Le DRG voulait connaître
les allers et venus de Muhammad Nazzal, mais Al-Rishiq n’avait
en réalité aucune idée d’où se trouvait Nazzal. Il expliqua que
chacun avait sa propre maison sûre et que s’ils voulaient se
rencontrer, ils le faisaient en se laissant des messages par des
connaissances communes. Le DRG ne le crut pas. Ils l’emmenèrent
jusqu’à sa précédente maison sûre, un appartement meublé de la
rue Mekkah, où ils espéraient piéger Nazzal, qui bien sûr
n’apparut jamais. Deux amis d’Al-Rishiq vinrent à l’appartement
le jour suivant. Ils furent battus pour qu’ils divulguent le
lieu où se trouvait Nazzal, mais ils n’avaient pas plus idée
d’où se trouvait Nazzal qu’Al-Rishiq. Al-Rishiq et ses deux
compagnons furent envoyés à la prison d’Al-Juwaydah, où ils
rejoignirent leurs autres camarades du Hamas. Désespérées, les
autorités intensifièrent leur recherche pour trouver Nazzal. Des
agents du DRG dans deux voitures surveillaient sa maison et une
furent plusieurs fois convoqués aux quartiers généraux du DRG à
Amman pour être interrogés sur sa résidence, mais Nazzal
continuait à s’échapper.
Le gouvernement se décida. La présence du Hamas en Jordanie
devait prendre fin pour de bon, et ses leaders devaient choisir
soit de quitter la Jordanie avec le Hamas, soit de rester sans
lui. Alors que la crise s’approfondissait, les autorités
jordaniennes cherchèrent une fois encore l’assistance des Ikhwan
jordaniens, espérant qu’ils convainquent les leaders du Hamas
d’accepter de s’en aller paisiblement. L’intention était que
leur départ apparaisse comme étant le résultat d’une initiative
volontaire. Cela aurait pu laisser la porte ouverte à la
restauration des relations à une date future entre le Hamas et
le gouvernement jordanien. Les Ikhwan, qui étaient divisés sur
la manière de procéder, déclarèrent que leur objectif était une
résolution amicale de la crise.
Le 11 novembre, le premier ministre Abd Al-Ra’uf Al-Rawabidah
rencontra une délégation des Ikhwan comprenant Abd Al-Majid
Dhunaybat, le leader des Ikhwan, et Abd Al-Latif Arabiyat, le
secrétaire général du Front de l’Action Islamique, ainsi que
Jamil Abu Bakr et Salim Al-Falahat, membres du bureau exécutif
des Ikhwan. Cette rencontre signalait l’échec du gouvernement à
persuader les officiels du Hamas de renoncer à leur droit de
rester en Jordanie. Des négociations devaient être conduites
avec les deux membres du bureau politique du Hamas à Damas, car
ceux qui étaient emprisonnés en Jordanie refusaient de s’engager
dans des discussions alors qu’ils manquaient de liberté. La
tentative finale du gouvernement pour résoudre la question vint
dans un message du directeur du DRG Samih Al-Battikhi, remis à
Khaled Meshaal et à ses collègues détenus par Abdullah al-Akaylah,
un membre du parlement en Jordanie et un ancien haut officiel
des Ikhwan. Il fut offert à ceux qui étaient en prison
l’opportunité de continuer à être des citoyens jordaniens et à
être autorisés à rester dans le pays à condition qu’ils
abandonnent toute association avec le Hamas. Meshaal répondit :
« Nous ne renonçons pas à nos principes et nous n’abandonnerons
jamais notre mouvement ». Le gouvernement devait maintenant
faire quelque chose pour mettre un terme à la crise, qui
commençait à coûter cher à la Jordanie. De nombreux Jordaniens
n’étaient pas contents du traitement réservé aux leaders du
Hamas emprisonnés qui remportaient la sympathie de plus en plus
de gens chaque jour.
Le 20 novembre 1999, les détenus du Hamas à Al-Juwaydah reçurent
la visite de leur avocat, Salih Al-Armuti, accompagné du
président de l’Association Jordanienne Bar, Sayf Al-Sharif.
Al-Sharif dit qu’il apportait un message du premier ministre Abd
Al-Ra’uf Al-Rawabidah, demandant à ce qu’ils quittent la
Jordanie de façon volontaire. En échange, promesse serait donnée
qu’ils pourraient visiter la Jordanie tous les deux ou trois
mois, après un arrangement préalable avec les autorités de
sécurité. On leur promettait aussi, s’ils acceptaient l’offre,
de ne pas être enchaînés lorsqu’ils seraient déportés. Khaled
Meshaal et Ibrahim Ghosheh rejetèrent tous deux cette
proposition de façon catégorique. Ils dirent qu’ils préféraient
être traînés de force enchaînés hors du pays que d’accepter
volontairement de partir. Leur avocat quitta la prison pour
tenir une conférence de presse, où il déclara que le
gouvernement avait déjà décidé de déporter les leaders du Hamas,
en dépit de leur volonté de ne pas partir. Le premier ministre
Al-Rawabidah fut irrité par le communiqué de presse de l’avocat,
car l’affaire était supposée être confidentielle. Il dit à la
presse que le gouvernement n’avait pas pris de telle décision.
Le premier ministre parla aux journalistes avec une figure-clé
des Ikhwan jordaniens à ses côtés, qui assura aussi la presse
que le gouvernement n’avait pas décidé de déporter les leaders
du Hamas.
Moins de vingt-quatre heures plus tard,
toutefois, les leaders du Hamas furent placés dans un avion,
contre leur volonté, et envoyés au Qatar. N’ayant pas réussi à
trouver Muhammad Nazzal, les autorités jordaniennes avaient
apparemment décidé de le laisser en liberté dans le pays.
Hamas: son histoire de
l'intérieur (46)
Hamas: son histoire de
l'intérieur (48)
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
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