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Politique
Le
cocker excité de l’Élysée
Philippe Randa
Philippe Randa
Jeudi 6 décembre 2007 Qui se
rappelle aujourd’hui de Roger Gicquel ? Pas les moins de
quarante ans, sauf peut-être quelques admirateurs de Coluche qui
a immortalisé ce célèbre présentateur vedette du journal télévisé
de TF1 de 1975 à 1980 dans un sketch : « Docteur Gicquel, il
arrive. Toute la misère du monde !? Il a dû être mazouté avec
les autres oiseaux là-haut, hein ? Dans les dégazages.? Quand y
a un avion qui s’écrase dans le monde, c’est sur les pompes
à Roger Gicquel ! »
Toute la France entière a bien rit à l’époque !
Nicolas Sarkozy est aujourd’hui le Roger Gicquel de la politique
et pas uniquement pour leur même tête de cocker, triste et
fatigué pour le deuxième, triste et excité pour le premier.
Les mouettes mazoutées et les crashs des avions sont passés de
mode. Il y en a trop eu. Les prises d’otages dans le monde sont
un business bien plus avantageux pour la communication : infirmières
bulgares, hier ; Ingrid Bettancourt hier, avant-hier,
aujourd’hui et demain si nécessaire… Qui se risque à
reprocher au Zorro élyséen d’en parler ? Sinon, peut-être,
ceux qui se préoccupent davantage des injustices sur le palier de
la France que de s’ingérer dans les affaires intérieures de
pays à l’autre bout du monde.
Plus personne n’est dupe, même si on fait encore semblant, de
ces saltimbanques qui s’engagent pour de grandes causes à
chaque nouvel impératif de promotion qui de sa nouvelle chanson,
qui de son nouveau spectacle, de son nouveau livre ou tout
simplement pour la simple obsession qu’on parle d’eux.
Leurs discours sont toujours stéréotypés, dégoulinants de
compassions forcées, martelant les mêmes mots qu’ils n’hésitent
pas à répéter pour mieux tenter de convaincre de leur sincérité.
Nicolas Sarkozy, lui, est en campagne électorale permanente.
Pragmatique, cynique et dénué de scrupules, il applique les
recettes du moment qui marchent si bien.
Dans deux messages, l’un radiodiffusé, l’autre télédiffusé,
adressé l’un aux Forces armées révolutionnaires de Colombie
(FARC) qui détiennent la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt et
un autre à leurs otages, Sarkozy les a tous repris, tous copiés,
tous plagiés, un festival de sentiments compassionnels qui donne
la nausée… C’est du Patrick Bruel, de l’Enrico Macias ou du
Florent Pagny dans le texte : « Je forme un rêve »… « au
milieu des siens pour Noël »… « Je m’engage de mon côté
à continuer à m’impliquer personnellement dans la recherche
d’une solution humanitaire »… « Lettre si profondément émouvante
et désespérée qu’elle a adressée à sa mère ne peut laisser
personne indifférent »… « La flamme est en train de s’éteindre
dans cette femme »… « … L’audace, dont le courage force
l’admiration de ceux qui la connaissent »… « Où est donc
passé son sourire ? »… « Je m’adresse à vous… en mon nom
personnel, mais surtout au nom des 62 millions de Français et, je
crois pouvoir le dire, au nom de toutes les femmes et de tous les
hommes de bonne volonté qui, partout dans le monde, à
l’unisson, réclament… »… « La France ne vous oubliera pas
»… « Elle ne vous oubliera jamais » (bis repetita)…
« En ce moment même, la France recherche de nouveaux moyens »…
« Vous rendre aux vôtres et à la vie » (bis repetita)… «
L’urgence d’une solution est devenue encore plus évidente aux
yeux de tous »… « Le seul objectif qui m’intéresse : votre
liberté »… « Je poursuivrai sans relâche cette action en
m’assignant une obligation de résultat » (un de ses
slogans de campagne)… « Je veux vous dire (…) mon
admiration pour votre dignité »… « Pour votre courage dans
une situation »… « Où des êtres plus faibles auraient perdu
jusqu’à leur humanité »… « Ingrid, nous ne vous laisserons
jamais tomber »…
En ce qui concerne sa dignitié, qu’en sait-il ? Et à propos de
son courage, a-t-elle vraiment le choix ? Et puis, c’est quoi,
au juste, perdre son humanité quand on est otage ?
Gageons qu’un amuseur contemporain n’aura qu’à changer à
peine le texte du clown en salopette du siècle dernier : «
Président Sarkozy, il arrive. Toute la misère du monde !? Il a dû
être secoué par les autres enfants, dans son enfance, hein ?
Dans les cours d’école.? Quand y a un otage menacé dans le
monde, c’est aussitôt pour les caméras et micros à Sarko ! »
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