Deux batailles électorales auxquelles participent deux
composantes du peuple palestinien, chacune à part, et de façon
distincte : l'une se situe en Cisjordanie et dans la bande
de Gaza, avec quelques habitants de la ville occupée d'al-Quds,
pour élire le conseil législatif palestinien, dans le cadre de
l'Autorité nationale palestinien, à la souveraineté
limitée, et une autre à laquelle participent les Palestiniens
à l'intérieur de la ligne verte, des élections parlementaires
pour élire des représentants dans un Parlement qui n'est pas
le leur dans un Etat qui n'est pas le leur, qui est la Knesset
israélienne.
Ces élections qui se déroulent en même temps, des deux côtés
de la ligne verte, éclairent la situation. D'un côté Israël
domine politiquement la scène, dans le cadre d'une politique
unique, une vision globale, concrétisée par le projet sioniste
dans ses diverses manifestations, et de l'autre, qui est
probablement la même, mais dans une autre perspective, où
chacune des deux composantes du peuple palestinien agit, comme
si elle était isolée de l'autre et isolée des réfugiés
qui se trouvent hors du pays, et de ce fait, sont devenus hors
du cadre de la prise de décision palestinienne. Tout cela du
fait de l'absence de l'Organisation de libération de la
Palestine, et la mainmise de l'Autorité palestinienne sur son rôle,
avec une bénédiction et une pression internationales.
L'absence de l'OLP fut accompagnée par l'écartement
du projet national de libération et, au fur et à mesure que
l'action politique palestinienne s'en éloigne, la partition du
peuple palestinien s'aggrave et la relation entre les différentes
stratégies de ses composantes se relâche. Si l'OLP est
toujours debout avec la conception d'un mouvement de libération
nationale pour le peuple palestinien, il aurait pu en émerger
des stratégies différentes qui prennent en compte la
particularité du lieu de chaque composante du peuple
palestinien, mais dans le cadre d'un projet palestinien et intégral
de libération. Cependant, en son absence, c'est l'état d'éparpillement
qui est dominant sur la réalité palestinienne, avec comme conséquences
la faiblesse des réalisations palestiniennes.
Cela ne nous avance pas beaucoup de dire que l'étape actuelle
est une étape de recul général, car le peuple palestinien et
ses forces actives ne sont pas spectateurs, mais font partie intégrante
des acteurs de la situation palestinienne et de la situation générale,
y compris israélienne. La marche et la lutte du peuple
palestinien ont montré que ce peuple a pu affronter et
mener sa lutte de libération au cours d'étapes de recul local,
régional et international.
Dans la situation présente, le cadre de la direction des
Palestiniens en Cisjordanie et dans la bande de Gaza est
l'Autorité palestinienne, et en Israël, le cadre dirigeant est
"le Haut comité de suivi des masses arabes". Tous les
deux sont reliés au plafond israélien, contrairement à l'OLP,
historiquement, et même contrairement à un conseil palestinien
qui serait élu à l'intérieur d'Israël qui organiserait cette
composante du peuple palestinien, et qui ferait partie des
constituants de la direction de ce peuple.
L'état de fragmentation est ce qui domine, sur le plan
palestinien. Il fut imposé par la stratégie sioniste, et Israël
essaie, depuis six décennies, à l'imposer et à le reproduire
en tant que vision stratégique sioniste, visant à démanteler
la structure du peuple palestinien, en tant que peuple, en détruisant
ses droits et son projet de libération. Il vise à morceler la
question palestinienne, en en faisant des questions sur les
Palestiniens, sans aucun lien palestinien entre elles.
Concernant les élections législatives palestiniennes,
c'est Israël qui définit où elles auront lieu (la question de
la ville occupée d'al-Quds), il essaie d'imposer ses résultats
par avance, en essayant d'empêcher la participation du
mouvement de la résistance islamique (Hamas), il définit
pratiquement, avec le soutien américain absolu et
international, les conditions de la participation de tel courant
ou tel courant, par rapport à sa position envers Israël. Il définit
où se mèneront les campagnes électorales, tout cela sous
occupation, dans un état de siège et de domination et
d'interdiction de se déplacer, rétrécissant au maximum
l'espace du déplacement palestinien. Dans une grande mesure,
Israël essaie de définir le plafond et la géographie de
l'action palestinienne, selon "la solution finale"
qu'il essaie d'imposer au peuple palestinien, d'après la stratégie
de Sharon, qui est devenue la stratégie de l'unanimité du
pouvoir israélien.
Concernant les élections de la Knesset, Israël possède
ce parlement, et pose comme condition à tout parti voulant y
participer d'admettre la judaïté de l'Etat, sans parler de sa
légitimité absolue, et sur le plan palestinien, le refus de
soutenir le droit du peuple palestinien à résister à
l'occupation. Tout parti est obligé de se comporter avec soi-même
hors de la question palestinienne et à l'intérieur de l'équation
israélienne et les règles de son jeu. Les élections israéliennes
ne sont pas le moyen pour organiser une partie importante
du peuple palestinien dans sa patrie, à l'intérieur de la
ligne verte. Car le maximum auquel ce cadre pourrait aboutir est
un soutien unilatéral des palestiniens à l'intérieur de la
ligne verte à l'autre côté de la ligne verte, mais dans le
cadre d'une stratégie d'une solution à deux Etats selon la
formule israélienne actuelle, qui signifie une solution à deux
Etats, selon la nouvelle unanimité israélienne, un Etat
palestinien en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, sans la
ville d'al-Quds, avec le maintien des blocs de colonisation, au
détriment des droits fondamentaux du peuple palestinien, et
notamment du droit au retour, du droit à l'autodétermination,
avec une souveraineté et des constituants limités.
Mon propos n'est pas de discuter l'efficacité de la
participation ou de la forme, à ces élections. Il s'agit
essentiellement d'indiquer la limite de l'action parlementaire
palestinienne, non pas au niveau de ses réalisations ou capacités,
mais la limite de la marge d'action et de l'horizon, bien que
les élections, des deux côtés de la ligne verte, bénéficient
d'un large soutien et qu'une majorité évidente se prononce
pour soutenir la participation, y compris au sein des
Palestiniens à l'intérieur de la ligne verte. Les résultats
attendus concernent le renouveau de la vie politique,
l'organisation partielle de la société palestinienne,
notamment en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Mais ce n'est
pas l'essentiel.
Ce que je veux indiquer est que les élections, dans les deux
situations, et malgré les différences, n'ont pas pour objectif
l'organisation du peuple palestinien et de son projet de libération
sur la base de l'intégralité d'un peuple, mais vont,
objectivement, dans le sens du rétrécissement du projet de libération
au plafond imposé par le rapport de force actuel entre Israël
et l'Autorité palestinienne d'une part, et Israël et les
masses palestiniennes, citoyens non organisés au niveau
palestinien, d'autre part, chaque composante demeurant isolée,
sans réactions palpables, ni quantitativement, ni
qualitativement,entre les représentations parlementaires dans
les deux situations. Toutes les deux participent au cadre d'un
comportement fragmentaire, imposé par la force, il est vrai,
mais aucune initiative n'est prise pour s'en débarrasser, au
contraire, il est même reproduit sur le plan palestinien.
Ce qu'il faut affirmer, dans cette situation, c'est qu'il y a
une tâche commune, qui est l'élaboration d'une vision intégrale
palestinienne, par l'organisation du peuple palestinien
dans tous les lieux où il est présent. C'est le défi que nous
devons affronter, sans lequel toutes les élections, ici et là-bas,
demeureront hors de la souveraineté palestinienne, et nous
continuerons à tourner autour, au lieu de définir son trajet.
Haïfa - Palestine
le 13 janvier 2006
Traduit par Centre d'Information
sur la Résistance en Palestine