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La transition d'Obama : un who's who de la
politique impérialiste
Alex Lantier
19 novembre 2008
La contradiction entre les aspirations et les espoirs de
millions d’Américains qui ont voté pour répudier la politique de
guerre et de réaction sociale du gouvernement Bush et le
caractère de classe du futur gouvernement Obama devient de plus
en plus évidente depuis l’élection il y a deux semaines.
La nomination dans l’équipe de transition d’Obama de
personnalités du monde de la finance, de groupes de pression et
de fonctionnaires de la défense donne une preuve tangible de ce
qui est en préparation. La composition de l’équipe dont Obama
avait dit qu’elle « assurerait autant que possible une
transition sans faille en ce qui concerne la sécurité
nationale », montre que son gouvernement sera composé de
vétérans avérés de l’establishment de Washington qui, en
matière de défense des intérêts de l’impérialisme américain,
sont réputés être plus compétents, mais non moins impitoyables
que ceux du gouvernement Bush.
Les précédents nouveaux gouvernements avaient fait des
concessions à l’opinion publique en nommant à des postes de
second plan des personnages populaires auprès du public. En
1977, le président Jimmy Carter dont le gouvernement avait
représenté un virage droitier significatif du Parti démocrate,
avait néanmoins nommé au poste d’ambassadeur des Etats-Unis aux
Nations unies un militant de longue date pour les libertés
civiles, Andrew Young. Ce dernier avait ensuite été renvoyé
après avoir rencontré des responsables de l’Organisation de
libération de la Palestine.
Comptant sur l’énorme animosité de la population américaine à
l’égard du gouvernement Bush méprisé et sur son statut de
premier président afro-américain, Obama ne ressent pas la
nécessité de procéder ainsi. En effet, il s’est efforcé de se
solidariser avec des politiciens droitiers. Lundi, Obama a
rencontré John McCain à Chicago, son concurrent républicain lors
des élections. Dans une interview accordée la veille à
l’émission de télévision américaine « 60 minutes » de CBS, il a
fait connaître sa décision de nommer des républicains dans son
équipe gouvernementale et ses conseillers ont largement lancé
l’idée de la possibilité du maintien de Robert Gates au poste de
secrétaire à la Défense.
L’équipe de transition d’Obama découle de ces
manœuvres. Elle est co-présidée par Valérie Jarrett, PDG d’une
société de gestion immobilière de Chicago et conseillère d’Obama
et par John Podesta, ancien secrétaire général du président Bill
Clinton et président du Podesta Group, un groupe de pression de
Washington. L’équipe de transition emploie 450 personnes et
dispose d’un budget de 12 millions de dollars. Elle comprend
plusieurs « équipes d’experts » chargés de préparer les
recommandations pour les nominations et la politique du futur
gouvernement.
Les co-présidents de l’équipe d’experts en charge du Trésor
américain sont Josh Gotbaum, un ancien partenaire et gérant de
la banque d’investissement Lazard Frères et qui a occupé de
nombreux postes dans le gouvernement Clinton, et Michael Warren
qui travaille pour la société de conseil aux multinationales,
Stonebridge International CC.
Les co-présidents de l’équipe d’experts du département d’Etat
[Affaires étrangères], sont tous deux d’anciens responsables du
département d’Etat du gouvernement Clinton. Tom Donilon est un
ancien grand lobbyiste de la firme de refinancement
hypothécaire Fannie Mae, récemment renflouée avec l’argent des
contribuables américains ; il est à présent un associé chez
O’Melveny and Myers, [un cabinet d’avocats international]. Il
fait partie de plusieurs grands groupes de réflexions
internationaux. Wendy Sherman est une responsable au plus haut
niveau de la hiérarchie du Groupe Albright, une société de
lobbying fondée par la secrétaire d’Etat du gouvernement
Clinton, Madeleine Albright.
Les co-présidents de l’équipe d’experts du département
américain de la Défense sont John White qui avait été le
sous-secrétaire à la Défense dans le gouvernement Clinton et qui
a dirigé dernièrement la « Middle East Initiative » de la
Kennedy School à l’Université Harvard, et Michèle A. Flournoy,
ancienne vice secrétaire adjointe à la Défense dans le
gouvernement Clinton et présidente du groupe de réflexion Center
for a New Americain Security (CNAS).
Les membres du CNSA, un groupe de réflexion plutôt petit,
situé à Washington, et comptant 30 employés a été fondé en 2003
par Podesta et Flournoy, jouent un rôle plutôt démesuré dans
l’équipe de transition d’Obama. Les conseillers d’Obama ont dit
au Wall Street Journal que Flournoy pourrait bien devenir
la première femme américaine à occuper le poste de secrétaire
d’Etat à la Défense. Wendy Sherman, qui siège au conseil
d’administration du CNAS, s’attend à obtenir un emploi de haut
rang au département d’Etat. Deux conseillers du CNAS, Susan Rice
et James Steinberg, auraient été présélectionnés par Obama pour
être conseillers à la sécurité nationale.
Il est possible que le nombre de membres du CNAS à rejoindre
le gouvernement Obama soit tellement important que des
responsables du CNAS ont dit au Journal qu’ils
s’inquiétaient de ce que le groupe de réflexion puisse
disparaître après l’investiture d’Obama. Ils ont toutefois
ajouté qu’ils espéraient recruter des officiels venant du
gouvernement Bush pour occuper les postes vacants au CNAS.
Les publications du CNAS dont un certain nombre sont
disponibles sur leur site web, montrent clairement que la
politique étrangère du gouvernement Obama aura un caractère
totalement impérialiste. Un rapport du CNAS daté de juin 2008 et
rédigé par Flournoy et d’autres employés du CNAS appelle à un
« engagement conditionnel » des troupes américaines en Irak et à
s’oppose à un calendrier fixe pour un retrait américain, une
position adoptée à présent par Obama. Le rapport défend un
déploiement à grande échelle de troupes américaines au sol en
Afghanistan et au Pakistan afin de poursuivre une politique du
type « montée en puissance » comme en Irak en soudoyant des
chefs militaires locaux et en massacrant ceux qui résistent.
Le CNAS préconise aussi une politique impliquant le Japon et
l’Inde dans le but de contenir la Chine en Asie de l’Est et du
Sud. Le 11 novembre, il avait publié un rapport sur la puissance
navale américaine, mettant en garde contre une éventuelle guerre
dans l’Océan pacifique émanant d’une grande puissance et
appelant la marine américaine à garder son avance sur la marine
chinoise. Un éditorial intitulé, « Une armée pour un nouveau
monde dangereux » et publié le 16 novembre dans le New York
Times, reprenait ces recommandations en mettant en garde
contre le risque que la Chine « n’augmente la taille de sa
marine opérant en eaux profondes », en disant que les Etats-Unis
ne pouvaient pas « céder les mers » et ne pouvaient pas
« admettre qu’un pays quelconque vienne s’immiscer dans les
passages maritimes vitaux ».
Le fait qu’Obama envisage de nommer Hillary Clinton au poste
de secrétaire d’Etat souligne de plus la fausseté de son
attitude à se poser en opposant au militarisme du gouvernement
Bush. Au cours de la campagne des primaires démocrates, il avait
attaqué Clinton pour avoir de par son vote permis à Bush
d’attaquer l’Irak, en qualifiant ceci de bavure stratégique. Il
l’avait également critiquée pour avoir voté en faveur d’une
résolution du Sénat qualifiant la Garde révolutionnaire
iranienne d’organisation terroriste. Durant la campagne des
primaires, Clinton avait déclaré que les Etats-Unis
« oblitéreraient» l’Iran s’ils attaquaient Israël. A présent,
Obama envisage de la placer à la tête de la diplomatie
américaine.
Tous ces développements éclairent une vérité politique
fondamentale : Obama a été le choix de la faction de l’establishment
politique américain qui a vu en lui la figure de proue idéale
pour reconditionner et recalibrer la politique impérialiste des
Etats-Unis.
(Article original paru le 19 novembre 2008)
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Publié le 21 novembre 2008 avec l'aimable autorisation du WSWS
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