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Corse
La République des
traîtres
Jean-Guy Talamoni
Jean-Guy Talamoni - Photo Alta Frequenza
Jeudi 27
août 2009
Il y a quelques mois, nous avions intitulé l’un de ces billets
« Le ministère du mensonge ». Il s’agissait de dénoncer une
« contre-vérité » manifeste, émanant du ministre français de
l’intérieur. En écrivant ces mots, nous n’étions pas même à
mi-chemin de la réalité : ce n’est pas seulement un ministère,
mais bien l’ensemble de la République française qui a fait du
mensonge et de la trahison un mode de gestion politique, voire
une sorte d’engagement spirituel… Nous en voulons pour preuve un
gouvernement pour partie composé de transfuges dont la figure
emblématique, un ancien dirigeant du parti socialiste, fut
naguère comparé à Judas à la « une » d’un magazine parisien.
Figure archétypale du traître, ce ministre – que Nicolas Sarkozy
s’amuse, non sans perversité, à faire applaudir tout
particulièrement lors des meetings ! – est caractéristique de ce
qu’est devenu la politique française. Regardez son visage : il
n’est assurément pas celui qu’il avait à la naissance, même
transformé par les ans. Observez ses expressions, son regard
fuyant : il porte les stigmates de la trahison… Comme s’il
s’attendait avec anxiété à rejoindre ses congénères dans le
neuvième cercle de l’enfer, résidence que la Divina Comedia
leur a assignée. D’autres sont plus assurés et promènent leur
traîtrise avec toupet, si ce n’est avec superbe : des Talleyrand
du 21e siècle, le talent en moins. Des « diables
boiteux » au petit pied, en somme.
Et chaque nomination ministérielle est soumise à un nouveau
concours de traîtrise…
Ne jouons pas les innocents : la duplicité a toujours existé
dans la vie publique. Elle figure d’ailleurs parmi les préceptes
machiavéliens : « Si fecisti, nega. » (Si tu l’as fait,
nie le)… Mais chez Machiavel comme chez d’autres politiques
traditionnels, le mensonge et le reniement des engagements
étaient considérés comme des moyens, dans certaines situations,
justifiés - même s’il s’agissait d’une piètre justification -
par la « raison d’Etat ». Ainsi, le fameux « Algérie
française ! » du Général de Gaulle, épisode qui n’ajouta rien à
sa gloire, réelle par ailleurs.
Mais aujourd’hui, c’est tout autre chose que l’on observe :
l’immoralité s’assume avec la hauteur que lui confèrent les plus
brillantes responsabilités. Un ministre français (au demeurant
d’origine corse) avait, il y a quelques années, donné le ton :
« Les promesses n’engagent que ceux qui y croient ! ».
Le reniement de la parole donnée suit immanquablement le moindre
engagement. La question du rapprochement des prisonniers corses
en est un exemple éloquent. Plus anecdotique est l’attitude de
Jean-Marie Bockel, secrétaire d’Etat chargé des questions
pénitentiaires (et autre transfuge du PS !). Après avoir
lui-même proposé - pour calmer le jeu - de rencontrer les
représentants des familles, il a purement et simplement annulé
cet entretien. La manœuvre (promesse puis reniement) avait pour
misérable objectif d’éviter un rassemblement - et donc un
éventuel incident - lors de sa visite en Corse. Le représentant
des familles de prisonniers a commenté ce revirement en
constatant que Monsieur Bockel n’était pas un homme d’honneur.
S’il l’avait été, il n’aurait ni changé de camp, ni participé à
un gouvernement au sein duquel le mensonge et la trahison ne
constituent pas seulement une « culture d’entreprise » : ils
sont inscrit dans l’ADN de cette nouvelle et singulière forme de
« république ». Et celle-ci croit dissimuler ses turpitudes en
dispensant généreusement des leçons (Cf. l’hilarant discours de
l’Université de Dakar qui restera longtemps dans les mémoires
africaines !).
Aujourd’hui, au plan international, une prise de position
française n’est plus un événement, pas même une information.
Tout juste un sujet de plaisanterie…
Quant au bal des traîtres, il continue à battre son plein.
Dossier Corse
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