Vendredi 13 mars 2009
« Mon devoir est de parler, je ne veux pas être
complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de
l’innocent qui expie là-bas, dans la plus affreuse des tortures,
un crime qu’il n’a pas commis. »
Emile Zola, « J’accuse », L’Aurore du 13 janvier 1898.
Aujourd’hui, la communication est devenue un élément
essentiel de la défense, en particulier en matière politique,
lorsqu’un accusé innocent est sur le point d’être broyé par un
procès kafkaïen. L’affaire Colonna, révoltante à tous égard - et
plus encore depuis quelques heures - a déjà donné lieu à
quelques articles courageux, y compris dans la presse
parisienne. D’autres journalistes, plus réservés ou plus
prudents, retiennent encore leur plume, se bornant à rendre
compte de façon « neutre » des propos des uns et des autres :
président de la Cour, avocats de la défense, des parties
civiles… Mais la neutralité, dans un tel cas, participe
passivement de l’injustice. Sans compter certaines locutions
malheureuses revenant mécaniquement dans les commentaires,
telles l’absurde expression « assassin présumé » : dans le droit
de n’importe quel pays civilisé, la « présomption » ne peut être
que présomption d’innocence. Dans le cas contraire, par un
incroyable renversement de la charge de la preuve, ce serait à
l’accusé d’établir son innocence !
Pourtant, c’est l’honneur du journaliste que de se
refuser à hurler avec les loups, de dénoncer l’inadmissible,
d’exprimer ses convictions, de s’engager et de dire : la
situation faite à cet homme n’est pas acceptable.
Ce faisant, il peut changer les choses…
C’est la raison pour laquelle il nous faut aujourd’hui
en appeler à l’ensemble des commentateurs, corses ou autres :
dîtes ce que vous avez sur le cœur, témoignez de ce que vous
avez vu et entendu.
Ne vous rendez pas complices d’une infamie.
Dénoncez-là avec force.
Aidez-nous !
Comme l’a fait votre prestigieux confrère en 1898,
accusez les accusateurs.
Jean-Guy Talamoni