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Après le Hamas, quoi?
Gershon Baskin (1)

[il semble qu¹à travers l¹opération de Gaza, Israël ait pour but stratégique de faire tomber le gouvernement Hamas. Oui, mais après ?]


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Jerusalem Post, 4 juillet 2006

Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant


La plupart des analystes de la campagne militaire d¹Israël à Gaza affirment que l¹objectif ultime, au-delà, bien sûr, de la libération du soldat Gilad Shalit, est d¹abattre le gouvernement du Hamas.

L¹arrestation de plus de 80 ministres, députés et militants, ce qui a poussé dans la clandestinité la grande partie de sa direction à Gaza, est destinée à ôter au gouvernement de l¹Autorité palestinienne toute existence et toute fonctionnalité. Certains médias israéliens ont même émis l¹hypothèse que des dirigeants du Fatah soutiendraient les mesures israéliennes, censées
démanteler le leadership du Hamas. Israël, pour sa part, a annoncé que personne "impliqué dans le terrorisme" ne bénéficierait d¹une quelconque impunité, et que même le premier ministre Ismail Haniyeh pourrait être une cible légitime.

Devant ces arrestations, la communauté internationale est restée muette. Les tentatives de faire condamner Israël par le Conseil de sécurité ont échoué.
Les Etats-Unis et la plupart des pays européens ont exprimé leur inquiétude face aux initiatives israéliennes, mais rien de plus. Cela ne veut pas dire que les réactions seraient les mêmes si Israël devait assassiner Haniyeh ou d¹autres dirigeants du Hamas.

Alors que le ministère israélien des affaires étrangères prétend ne pas faire de distinction entre les branches militaire et politique du Hamas, les services du renseignement militaire et le Shin Bet parlent tous de branches distinctes qui obéissent à des commandements séparés. Selon eux, Haniyeh n¹a aucune influence sur l¹aile militaire du Hamas. Et il y en a même qui doutent de l¹autorité du leader politique à Damas, Khaled Mesh¹al sur cette branche militaire. En tout cas, Mesh¹al affirme qu¹il n¹en a pas.

Il est probable que l¹attaque contre la base de Kerem Shalom n¹a pas été commanditée par Mesh¹al et le politburo de Damas. Mesh¹al n¹en a été probablement été informé qu¹après coup, et l¹a exploitée pour gagner de l¹influence à Gaza. Il ne fait aucun doute que l¹enlèvement de Shalit est très populaire chez les Palestiniens, qui voient en lui le seul espoir de faire libérer leurs prisonniers (environ 10.000) des prisons israéliennes.
Ils savent qu¹Israël a cédé face au Hezbollah et à son chef Hassan Nasrallah, et qu¹il a échangé des centaines de prisonniers pour récupérer les corps de trois soldats. Alors, pourquoi ne pas espérer qu¹un soldat vivant produise de meilleurs résultats ?

Israël est piégé. Si l¹armée et le renseignement sont incapables de localiser la cachette des ravisseurs, et si un raid militaire pour libérer Shalit ne peut être entrepris, l¹option de la négociation devient tout à fait réelle. Mais si Israël négocie avec les ravisseurs, on peut être
certain que des enlèvements se répéteront chaque semaine. Cela étant donné, Israël a entrepris d¹abattre le gouvernement du Hamas. Cela sonne bien, et aurait très certainement l¹assentiment de Washington, mais qu¹arrivera-t-il une fois que le gouvernement du Hamas aura été renversé?

Le président Abbas peut-il prendre le pouvoir ? Peut-il déclarer l¹état d¹urgence et nommer un gouvernement Fatah ? Se trouverait-il un seul Palestinien pour penser que ce gouvernement a une véritable légitimité ?
Israël peut-il pénétrer et réoccuper les territoires et prendre la responsabilité de les gouverner ? Israël est-il prêt à demander à la communauté internationale d¹intervenir et d¹assumer les responsabilités d¹un gouvernement ? La communauté internationale est-elle prête à le faire ?

La réponse à toutes ces questions est non.
Si Israël fait tomber le gouvernement du Hamas, le scénario le plus plausible sera celui de l¹anarchie et du chaos. Personne ne pourra faire régner l¹ordre, et personne ne sera en sécurité : ni les Palestiniens, ni les Israéliens.
L¹enlèvement de Gilad Shalit a pris au même piège la direction du Hamas, Abbas et Israël. Personne ne veut y être et personne ne sait comment en sortir. Israël aimerait exploiter la situation pour obtenir des gains militaires contre d¹autres cibles telles que les roquettes Qassam, mais une invasion militaire de Gaza sur une grande échelle ne peut atteindre cet objectif. Certains dirigeants israéliens de droites comme Effie Eitam ont proposé d¹exterminer toute la direction du Hamas. D¹autres, y compris le maire de Sderot Eli Moyal, frustré à juste titre, ont proposé de rendre invivables Beit Hanoun et Beit Lahya [ville et camp de réfugiés de la bande
de Gaza proches de la frontière avec Israël, d¹où sont tirées la plupart des roquettes]. Ehoud Olmert et Amir Peretz auraient probablement de meilleurs sondages s¹ils adoptaient cette politique folle et contraire aux valeurs morales du judaïsme, et Israël se condamnerait encore davantage à une impasse sans aucune issue.

Ce qui est tragique dans cette situation politique, c¹est que tous les leaders, pour le moment, apparaissent comme perdants. Olmert, Peretz, Abbas et même Haniyeh. Même Khaled Mesh¹al, qui au début a vu sa popularité monter en flèche, essentiellement parce que les Israéliens lui ont attribué plus de crédit qu¹il n¹en méritait pour l¹attaque contre Kerem Shalom, est aujourd¹hui perdant, parce qu¹en réalité, il ne contrôle pas grand-chose sur le terrain, à Gaza ;

A court terme, le plus important est de ramener Gilad Shalit sain et sauf à la maison. A plus long terme, il est très important de conserver des chances de rebâtir de la stabilité et la porte ouverte à de futures négociations.
Sans stabilité et sans retour à la négociation, il ne peut y avoir aucune "convergence", et Israël sera condamné à conserver des territoires dont il ne veut plus.

Il est très intéressant de noter qu¹en hébreu, il n¹existe pas de mot pour désigner une "désescalade", ce qui explique peut-être la difficulté de la concevoir et de la mettre en oeuvre. Des deux côtés, on a besoin d¹une échelle pour descendre de ses positions. Le seul scénario qui puisse sauver des vies (y compris celle de Gilad Shalit) est de trouver un moyen de parvenir à un cessez-le-feu bilatéral qui comprendrait une libération de prisonniers. La libération des prisonniers pourrait être liée au respect du cessez-le-feu et non à l¹enlèvement. Le fait de tuer des centaines de Palestiniens, même s¹ils soutiennent le Hamas, n¹aidera en rien la position
stratégique d¹Israël. Si le Hamas est mis à genoux, Israël aura face à lui le Jihad islamique et al-Qaida, ou pire. Tuer des Palestiniens ou les humilier n¹a jamais produit une modération du côté palestinien. Il y a encore une chance, sans garantie, mais prendre le risque d¹un cessez-le-feu qui libérerait Shalit paraît le meilleur prix à payer face à toute autre solution.


(1) Gershon Baskin est le co-directeur israélien de l¹IPCRI (Israel/Palestine Center for Research and Information). http://www.ipcri.org

 



Source : Liste de diffusion La Paix Maintenant
Inscription : http://www.lapaixmaintenant.org/liste


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