[le Hamas a rejeté l¹ultimatum d¹Abbas à propos du référendum
sur le "document des prisonniers". Ce document, ainsi
que l¹initiative d¹Abbas, mettent en porte-à-faux aussi bien le
Hamas que le gouvernement israélien, toujours attaché à des
mesures unilatérales. Il reprend en filigrane les propositions de
la Ligue arabe, et de ce fait, il semble adopter, d¹après
certains juristes, une position relativement souple sur le droit
au retour]
http://www.haaretz.com/hasen/spages/720662.html
Ha¹aretz, 29 mai 2006
Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant
Il y a deux manières d¹estimer la distance parcourue par
certains personnages clés du Hamas comme Abdel Khaleq al-Natshe,
la personnalité la plus haut placée dans la hiérarchie du
mouvement qui soit détenue en Israël, et qui est l¹un des
initiateurs du document de Réconciliation Nationale (connu également
sous l¹appellation de "Document des Prisonniers") qui
prévoit un accord avec Israël sur la base des frontières du 4
juin 1967. La première de ces manières est de mesurer la force
des protestations de la part de certains opposants à un tel
accord, comme Khaled Meshal, dirigeant du Hamas en Syrie. La
seconde est d¹attendre les réactions de ceux en Israël qui sont
partisans d¹une politique unilatérale, comme Haïm Ramon,
ministre de la justice, du parti Kadima (ex-travailliste).
Meshal et ses amis condescendront à parler à Israël après que
nous aurons renoncé à la loi du Retour, en d¹autres termes, après
que nous aurons dissous le mouvement sioniste. Pour que Ramon
renonce à son jouet de l¹action unilatérale en faveur de négociations
politiques, les Palestiniens doivent avant tout déclarer qu¹ils
renoncent au droit au retour, en d¹autres termes qu¹ils éliminent
le mouvement national palestinien.
Si les Palestiniens n¹avaient pas exigé qu¹Israël reconnaisse
leur droit au retour, Israël aurait dû l¹inventer. Autrement,
comment le premier ministre Ehoud Olmert pourrait-il prendre le
"Document des Prisonniers", rédigé par un groupe
considéré comme le "grand rabbinat" de l¹opinion
palestinienne, qui sanctifie la ligne Verte comme la frontière définitive
entre Israël et la Palestine ? Comment Olmert expliquerait-il le
tracé envahisseur de la "clôture de sécurité", et
comment pourrait-il demander au monde de reconnaître les
"blocs de colonies" ? Tant que le "droit au
retour" est dans l¹air, les politiques peuvent se détendre.
Ils peuvent toujours dire que
l¹exigence de ramener les réfugiés n¹est rien d¹autre qu¹une
tentative de détruire l¹Etat juif par des moyens démographiques,
et que, par conséquent, l¹accord sur l¹existence de deux Etats
sur les frontières de 1967 n¹est qu¹une partie du "plan
par étapes" pour éliminer Israël.
Il est difficile de comprendre pourquoi Israël se permet de déclarer
à l¹avance que "Jérusalem demeurera unie pour
toujours", ou que "Ariel fait partie de l¹Etat d¹Israël",
alors que les Palestiniens doivent adapter leurs positions d¹ouverture
à celles d¹Israël. De plus, si les Palestiniens abandonnent à
l¹avance le droit au retour, ils risquent aussi, ce faisant, de
voir refuser aux réfugiés le droit de réclamer des
compensations financières pour leurs biens.
Malheureusement, cette fois encore, comme ce fut le cas lors de la
décision de la Ligue arabe à Beyrouth en mars 2002 (1), la voix
des apparatchiks des partis israéliens est plus forte que la voix
de la raison.
Quelques jours après le sommet de Beyrouth, le professeur de
droit Eyal Benvenisti, expert international dans le domaine des réfugiés,
écrivait que cette décision "reconnaît de fait que les réfugiés,
ou l¹entité qui les représente, n¹ont aucun droit absolu. Leur
exigence de retour est un objet de négociation tripartites, entre
les représentants des Palestiniens, les pays "hôtes"
des réfugiés et le gouvernement israélien. Tout accord qui
interviendrait entre les parties éteindrait les revendications
des réfugiés.
Ceux qui ne se satisferaient pas de cet accord auraient du mal à
faire appel en entreprenant des procédures judiciaires auprès d¹un
quelconque tribunal (Ha¹aretz, 4 avril 2002).
Benvenisti interprétait cette importante décision comme un
signal donné par la Ligue arabe à Israël : elle reconnaissait
et respectait sa crainte de voir disparaître le caractère juif
de l¹Etat d¹Israël à cause d¹un afflux massif des réfugiés
de 1948. Elle était même prête à imposer aux
Palestiniens une position contraire à leur exigence sans
concession, et de les réveiller de leur rêve de retour.
"Depuis la création de l¹Etat, Israël attendait une
pareille prise de position arabe", disait ce professeur de
droit, en concluant son article. Et il posait la question :
"Allons-nous maintenant être d¹accord pour accepter la
proposition de la Ligue arabe et en faire un accord contraignant
?"
Plus de quatre ans plus tard, après des milliers de morts, après
le chaos au sein du Fatah, cette question est plus actuelle que
jamais. Le gouvernement Sharon-Peres a ignoré la proposition de
la Ligue arabe, et a préféré l¹assassinat ciblé du partenaire
palestinien et les mesures unilatérales. Le gouvernement
Olmert-Peres a reçu de la part des prisonniers, de Mahmoud Abbas
et de groupes modérés des territoires une deuxième chance de
parvenir à un accord. Il se pourrait bien que ce soit la dernière.
(1) Cette proposition de la Ligue arabe réunie à Beyrouth
faisait suite à ce qu¹il est convenu d¹appeler "l¹initiative
saoudienne ". Pour une discussion sur cette initiative et sur
Beyrouth, voir (entre autres) : "A propos de l¹initiative de
paix saoudienne" :
http://www.lapaixmaintenant.org/article649