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Communiqué du MRAP
Légitime explosion de colère au Gabon:
la France doit cesser d'être le soutien historique de la
dictature
Jeudi 3 septembre 2009
Depuis ce jeudi 03 septembre 2009, la colère des couches
populaires et des démocrates au Gabon a commencé à exploser.
Elle n’est que trop légitime, après 42 années de règne sans
partage d’un président unique, Omar Bongo, auquel devrait
succéder maintenant - selon ce que les décideurs politiques ont
préparé - son fils.
Ce midi, le résultat officiel de l’élection présidentielle
dans ce pays pétrolier d’Afrique centrale a été rendu public.
Prétendument, Ali Bongo, jusqu’ici ministre de la défense, en
charge de l’armée, aurait gagné avec un peu moins de 42 % des
voix, dans une élection à un seul tour. Ces résultats semblent
peu crédibles. Les exemples de manipulations qui ont été
allégués sont nombreux. Ainsi, notamment, l’encre prétendument
indélébile, censée garantir que chaque personne ne puisse voter
qu’une fois, pouvait , semble-t-il, se laver facilement à l’eau
fraîche.
Malgré une intention proclamée de neutralité, la France avait
fort probablement décidé, dès avant le scrutin, de miser sur une
succession « dynastique ». Le magazine « Jeune Afrique » a ainsi
rapporté, dès le mois de juillet 2009, que les services de
renseignement français étaient très actifs au Gabon depuis la
mort d’Omar Bongo - intervenue le 08 juin dernier -, et que le
"Paris officiel" aurait fait le choix de préférer Ali Bongo pour
la succession de son père. Tous les candidats de poids ont,
d’ailleurs, choisi de faire une partie de leur campagne à Paris,
pour tenter de rassurer leurs interlocuteurs que les intérêts de
la France - ou, plutôt, ceux de la France des milliardaires et
des militaires - resteraient bien protégés au Gabon.
C’est que la France, et particulièrement TOTAL (anciennement
ELF), tellement ancré dans la Françafrique, ont grandement
profité des richesses du sous-sol gabonais, à la différence de
la population de ce pays, potentiellement aussi riche que les
émirats arabes du Golfe. mais livré à des réseaux de corruption
dans lesquels s’unissent protagonistes locaux et français. La
France officielle, en faisant intervenir les parachutistes, a
sauvé militairement la mise au président Omar Bongo en mai 1990,
alors qu’il était déjà menacé par un mouvement revendiquant la
démocratie au Gabon. A l’époque, des émeutes populaires avaient
éclaté à Port-Gentil, l’une des grandes villes du pays. Avant
lui, son successeur Léon Mba avait déjà été sauvé par l’armée
française, en février 1964. Une base militaire française se
trouve d’ailleurs encore à Libreville, la capitale gabonaise.
Ainsi il n’y a rien d’étonnant à ce que des manifestants
aient pris, ce jeudi 03 septembre, des symboles des « intérêts
français » pour cible : le consulat français à Port-Gentil - là
où le mouvement démocratique de 1990 a été écrasé - tout comme
des locaux du groupe TOTAL qui ont ainsi été attaqués. La raison
en réside dans le soutien que la France officielle continue
d’apporter en réalité à une clique corrompue au pouvoir, tandis
que la majeure partie de la population continue à être maintenue
dans la pauvreté.
Bernard Kouchner a demandé, jeudi 03 septembre, « un
dispositif militaire » pour « protéger les ressortissants
français au Gabon ».
Le MRAP lance une forte mise en garde contre tout risque
d’intervention armée qui attacherait indélébilement l’image de
la France à la clique de ceux qui se sont enrichis sans honte
pendant plus de 40 ans au dépens des citoyens gabonais.
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