Tunisie-Politique
«Ils peuvent tuer
les révolutionnaires mais pas la
révolution»
Yüsra N. M'hiri
Jeudi 14 novembre 2013
La forte pluie de ce
mercredi n'a pas eu raison du
rassemblement hebdomadaire «Qui a tué
Chokri? Qui a tué Brahmi?», sur l'avenue
Habib Bourguiba, à Tunis, pour exiger la
vérité sur ces deux assassinats
politiques.
Par
Yüsra N. M'hiri
Les manifestants, qui ont été au
rendez-vous pour la 40e fois depuis
l'assassinat de Chokri Belaïd, le 6
février dernier, se sont rassemblés,
comme à l'accoutumée, pancartes et
parapluies à la main. Le frère de Chokri
Belaïd, Abdelmajid, sa veuve Besma
Khalfaoui, son camarade, et successeur à
la tête du Parti des patriotes
démocrates (Watad), Zied Lakhdhar, et
plusieurs dirigeants de partis
d'opposition, notamment Issam Chebbi et
Maya Jribi d'Al Jomhouri, ainsi que
Samir Ettaieb d'Al Massar, étaient
également présents.
La forte
pluie de ce mercredi n'a pas eu raison
du rassemblement hebdomadaire pour la
vérité
Les larmes de
Besma Khalfaoui
«Nous sommes ici pour Chokri et
Mohamed, en soutien au Front populaire
et à tous les Tunisiens qui exigent la
vérité sur l'assassinat de ces deux
dirigeants. Le gouvernement Larayedh
nous doit cette vérité», explique
Maya Jribi.
Tous les manifestants scandent des
slogans hostiles au gouvernement dominé
par les islamistes d'Ennahdha,
illégitime depuis le 23 octobre 2012.
Les slogans, au ton acerbe, demandent au
gouvernement de dégager et,
particulièrement, à son chef, Ali
Larayedh, à qui ils incombent la
responsabilité directe de la lenteur de
l'enquête sur ces deux meurtres.
Samir
Ettaieb au premier rang des manifestants
Le portrait du chef du gouvernement
est jeté par terre et piétiné avec rage
par quelques manifestants.
Besma Khalfaoui, militante et mère
courage de deux orphelines, qui a repris
le flambeau de son mari, emble ébranlée
par l'émotion. Elle laisse, en tout cas,
couler quelques larmes, lorsque les
manifestants commencent à crier:
«Chokri et Mohamed, vous êtes vivants à
jamais, nous mourrons tous s'il le faut,
mais la vérité sera dévoilée».
Maya Jribi
et Issma Chebbi d'Al-Jomhouri
Larmes vite essuyées, Mme Khalfaoui
lèvera la tête et le poing et reprendra
les slogans scandés par la foule.
Les quelques bribes d'informations
lâchées par le ministère de l'Intérieur
ne font pas la lumière sur l'état
d'avancement de l'enquête, laissent
planer un doute sur le sérieux des
enquêteurs et ne calment pas la soif de
vérité des familles des deux défunts, de
leurs partisans et des tunisiens en
général.
Le
portrait de Larayedh piétiné par un
manifestant
Les manifestants, dont la majorité
sont des militants du Front populaire,
pensent que certaines parties, qui n'ont
pas intérêt à voir la vérité éclater un
jour, cherchent à les aveugler par de
fausses révélations et à les tromper en
multipliant les mauvaises pistes, mais
ils pensent aussi que les Tunisiens ne
sont pas dupe et ils se battront
jusqu'au bout pour démasquer les
assassins et leurs commanditaires.
Ali Larayedh
pointé du doigt
«Ces deux crimes, qui ont aggravé
la crise politique en Tunisie, ne sont
toujours pas élucidés. Les autorités
gagnent du temps et ne font pas preuve
de transparence», lance Zied
Lakhdhar, secrétaire général du Watad,
le parti d'opposition dont Chokri Belaïd
était le dirigeant historique.
La douleur
de Besma Belaid est toujours aussi
intense.
Ali Larayedh, accusé par l'Instance
pour la recherche de la vérité sur les
assassinats de Chokri Belaïd et Mohamed
Brahmi (IRVA) d'avoir été informé de la
menace de mort pesant sur les deux
défunts et de n'avoir rien fait pour les
protéger, en tant que ministre de
l'Intérieur puis en tant que chef du
gouvernement provisoire, a été convoqué
par le juge d'instruction pour une
audition à laquelle il n'a pas voulu
répondre. Il a annoncé, par ailleurs,
qu'il déclinera toute convocation...
«Nul n'est au dessus de la loi.
Son entêtement à refuser le face-à-face
avec la justice est une preuve
irrévocable de son implication»,
crie une militante du Front populaire.
Avant d'ajouter : «Ils peuvent tuer
les révolutionnaires mais pas la
révolution. Nous sommes là et nous ne
lâcherons pas. Chokri nous l'a demandé».
Les noms de Chokri Belaïd et Mohamed
Brahmi résonnent toujours dans le coeur
des Tunisiens et des Tunisiennes. Leurs
voix grondent toujours, contre
l'injustice, la violence, le terrorisme,
dont ils ont finalement été victimes.
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Publié le 14
novembre 2013 avec l'aimable
autorisation de Kapitalis
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