MADANIYA
Israël-États Unis :
Bye Bye Barack Obama, sans regret
René Naba
Mercredi 25 janvier 2017
Le
président Barack Obama quitte la scène
présidentielle au terme d’un mandat de
huit ans marqué par une normalisation
des relations des États Unis avec deux
des principaux contestataires à
l’hégémonie américaine, Cuba et l’Iran,
en contrechamps d’une gestion intrigante
de la séquence du «printemps arabe»,
complétée par le dépassement du
contentieux douloureux avec le Japon
(Pearl Harbor et Hiroshima), mais d’une
passivité ahurissante à l’égard du
premier ministre israélien Benyamin
Netanyahou, qu’il gratifiera à la fin de
son mandat d’un cadeau exorbitant : Une
subvention militaire de 38 milliards de
dollars.
Une
passivité insultante pour le leadership
américain. Une complaisance corrosive
pour la crédibilité et le prestige de la
diplomatie américaine.
Retour sur le mandat du premier
président noir des États Unis.
Le
premier Prix Nobel de la Paix jamais
attribué à un président en activité,
-qui plus est à sa prise de fonction et
non au terme de son mandat – a achevé sa
double mandature présidentielle
(2008-2016) par une aide record à l’un
des états les plus bellicistes de la
planète.
Celui
qui a inauguré son mandat par un
retentissant «Salam Aleikoum» au Monde
arabe depuis l’Université du Caire, dans
sa célèbre déclaration prononcée à la
date symbolique du 4 Juin 2009, a achevé
son magistère par une gratification
exorbitante de 38 milliards de dollars
au dirigeant le plus méprisable à son
égard tout au long de sa double
mandature présidentielle.
«Le
nouveau départ» («A New Beginning»)
destiné à améliorer les relations
américaines avec le Monde arabe et
Musulman, en rupture avec l’ère
belliciste de George Bush jr, s’est
révélé être un retour en arrière et ses
critiques à l’égard d’Israël, une
plaisanterie de mauvais goût.
Plutôt
que de rabaisser le caquet de son
interlocuteur israélien,
l’afro-américain a ravalé son chapeau,
assortissant sa reculade d’un cadeau
royal d’un président masochiste à un
dirigeant xénophobe qui aura constamment
bafoué son autorité et mis en échec ses
tentatives de règlement du conflit
israélo-palestinien.
Qualifier, de surcroît, de «géant du XXe
siècle», Shimon Pérès, l’équipementier
atomique d’Israël à Dimona, par ailleurs
«ordonnateur de la boucherie de Cana
(sud Liban)- le massacre de 106 civils
libanais réfugiés dans un camp sous la
protection des «Casques Bleus» de l’ONU,
tués par l’artillerie israélienne, en
1996- et pire, le hisser au rang de
Nelson Mandela, l’ancien doyen des
prisonniers politiques dans le monde,
propulsé au rang d’icône planétaire
absolue des peuples en lutte pour leur
liberté, relève sinon de la flagornerie
bas de gamme à tout le moins d’un excès
de zèle contre-productif.
« Comparer Shimon Pérès à Mandela, c’est
cracher à la figure de Mandela »,
tonnera Rony Brauman, un des fondateurs
des «Médecins sans frontières» dans un
vigoureux rappel au sens de la mesure au
président américain.
Pis,
dans son oraison funèbre, sans doute
emporté par une envolée lyrique, le
président américain aura l’outrecuidance
de qualifier «Jérusalem, capitale
d’Israël», s’attirant un vigoureux
rappel ordre du Département d’Etat,
infamant pour une personnalité à un tel
niveau de responsabilité.
Certes,
l’adoption par le congrès de la Loi
JASTA, quinze ans après le raid contre
les symboles de l’hyperpuissance
américaine, le 11 septembre 2001,
autorisant les Américains à poursuivre
le Royaume saoudien en dédommagement des
dégâts subis par les pirates de l’air,
-dont 14 des 19 membres étaient de
nationalité saoudienne-, a placé l’épée
de Damoclès en suspension au dessus de
la dynastie wahhabite, mais Barack Obama
a, dans le même temps, cautionné
l’agression saoudienne contre le Yémen
et témoigné d’une certaine connivence
avec les groupements djihadistes du
terrorisme islamique, notamment en
Syrie.
Le
premier président noir des États-Unis a
ainsi conforté dans son même élan de
générosité de fin de mandat, sans la
moindre contrepartie, un état qui traite
ses propres noirs israéliens «les
Falashas» éthiopiens en citoyen de
seconde zone, parqués dans des ghettos,
aux emplois aléatoires et résiduels.
Une aide
militaire scandaleuse, destinée en
priorité à massacrer davantage les
Palestiniens et à poursuivre sa
phagocytose de la Palestine, au mépris
de la légalité internationale dont son
pays en sa qualité de membre permanent
des Nations Unies en a la charge de la
garde et de la défense.
Trente
huit milliards de dollars des États-Unis
à Israël, au détriment du peuple
américain, alors que près de 40 millions
de citoyens afro-américains vivent au
dessous du seuil de la pauvreté, et que
70 millions de citoyens américains ne
disposent d’aucune couverture sociale en
dépit du modeste Medicare d’Obama.
Porteur
des rêves de la communauté noire des
États-Unis et de tous les peuples
basanés du quart monde, il n’a cessé
mois après mois, année après année, de
démontrer qu’il n’était qu’un BASP
(Black Anglo-Saxon Protestants), une
variante chromatique du WASP (White
Anglo-Saxon Protestant).
Le Président le plus « cool » du Monde
aura donc été, jusqu’au bout, le plus
décevant au regard des espoirs qu’il
avait suscités.
La résolution 2334
Pris
d’un remord tardif devant tant de
laxisme face au pays qui passe pour le
plus important producteur de barbelés au
monde, soucieux en outre de brider les
pulsions expansionnistes de Benyamin
Netanyahou, Barack Obama lui a adressé
un coup de semonce en s’abstenant de
voter- et non d’opposer son veto- à un
texte dénonçant la colonisation
israélienne.
La
résolution 2334, adoptée au Conseil de
sécurité le 23 décembre 2016, a
recueilli 14 voix en sa faveur, passant
grâce à l’abstention américaine. Elle
fera date dans les annales diplomatiques
internationales en ce que le veto
américain constitue un «précédent», le
premier vote en ce sens depuis un quart
de siècle, très exactement depuis le
Traité de Washington scellant la paix
entre Israël et l’Égypte, le 29 mars
1979. Il ouvre la voie au fait que le
parapluie diplomatique américain ne soit
plus désormais inconditionnellement
déployé pour le protection d’Israël et
que le veto ne soit plus désormais
acquis automatiquement pour tout ce qui
a trait à l’état hébreu.
Un
cadeau empoisonné à son successeur
xénophobe, populiste et ultra sioniste,
Donald Trump, dont l’ambassadeur désigné
en Israël, David Friedmann, a annoncé
son intention de s’installer à Jérusalem
et non à Tel Aviv, avec à la clé une
belle empoignade diplomatique
internationale en perspective pour le
nouvel élu lors des premiers cents jours
de son mandat présidentiel.
Le nombre de colons s’élève à 590 000 en
Cisjordanie et à Jérusalem-Est, dont 90
000 au-delà de la barrière de sécurité
construite par les Israéliens. Un projet
de loi à la Knesset envisage de
légaliser tous les avant-postes –
colonies sauvages et illégales au regard
du droit israélien, indice d’une grave
dérive colonialiste israélienne, à six
mois de la célébration du cinquantième
anniversaire de l’occupation de la
Cisjordanie, en juin 2017.
Constat
d’échec ? Aveu d’impuissance ? Geste de
dépit à l’égard d’un pays qui lui a
gâché son bilan diplomatique ?
L’admonestation tardive de John Kerry à
Israël, -un pays qu’il a visité 25 fois
en 4 ans de mandat-, relève de la même
démarche. Une repentance au rabais d’un
secrétaire d’état en fin de mission pour
la désinvolture avec laquelle il a
traité les aspirations légitimes du
peuple palestinien, en même temps qu’un
démarche destinée à couper la voie aux
débordements hyper sionistes du
successeur islamophobe du Président
Obama. En tout état de cause, l’indice
d’un vif agacement à l’égard d’un allié
qui pourrait apparaître à l’avenir de
plus en plus encombrant, dont les
passe-droits sont à l’origine du
discrédit moral des États Unis dans le
tiers-monde.
La liste des résolutions de
l’ONU non respectées par Israël :
À l’inverse de son prédécesseur George
Bush, artisan des invasions de
l’Afghanistan (2001) et de l’Irak
(2003), dans le cadre de la «guerre
globale contre le terrorisme», Barack
Obama a multiplié les guerres par
procuration contre la Libye et la Syrie,
-deux pays arabes sans endettement et
alliés du BRICS, particulièrement de la
Russie et de la Chine en Mer
Méditerranée-, développant,
parallèlement, les guerres furtives par
drone, amplifiant pour ce faire le
déploiement de bases américaines dans le
Monde : une soixantaine de bases sous
son mandat dont 34 en Afrique.
Près de
500 millions de dollars ont été investis
par l’armée américaine pour la formation
de supplétifs arabes dans leur
entreprise de balkanisation du Monde
arabe, notamment en Syrie et en Irak. En
Vain. Et pour prix du silence de
Washington à l’encontre des crimes de
guerre de l’Arabie saoudite au Yémen et
ailleurs, Barack Obama a consenti la
vente du matériel de guerre au Royaume
d’un montant de 151 milliards lors de
son double mandat présidentiel.
À Shimon
Pérès, à l’époque chef du parti
travailliste qui s’inquiétait du
comportement provoquant d’Ariel Sharon à
l’égard de l’administration américaine,
l’ultra faucon premier ministre
israélien de l’époque, l’inspirateur de
Benyamin Nethanyahu, aurait répondu :
«Sois sans crainte à propos des
pressions américaines sur Israël. Nous,
le peuple juif, exerçons une emprise sur
les États-Unis. Ils n’ignorent pas cette
réalité. Ils ne leur est pratiquement
pas possible de mettre en œuvre une
politique américaine au Moyen-Orient
sans l’aval des juifs américains.
«Les juifs américains maîtrisent
parfaitement les médias américains et
même des membres du Congrès. Le Lobby
juif ne tolérera pas que le Congrès
prenne la moindre mesure hostile à
l’encontre d’Israël, aurait fait valoir
Sharon à Perès lors de cet entretien le,
3 octobre 2001.
L’ambassade d’Israël à Washington
détermine l’ordre du jour du Congrès,
via les millionnaires juifs», a conclu
M. Sharon.
Pour le lecteur arabophone, sur ce lien
la totalité de la conversation Sharon
Pérès.
Pour
mémoire le montant de l’aide américaine
à Israël pendant la triple mandature de
Richard Nixon, Ronald Reagan, Bill
Clinton, a été infiniment plus
importante que le coût de la Guerre du
Vietnam (1955-1975), mettant en œuvre 2
porte-avions, une flotte aérienne de 500
avions de combats et autant
d’hélicoptères et un corps
expéditionnaire de 500.000 combattants.
Qu’un
président à la conquête d’un deuxième
mandat fasse preuve de démagogie en
flattant ses électeurs potentiels
pourrait être compréhensible, mais qu’un
président en fin de mandat, en solde de
tout compte, fasse preuve de gabegie en
dilapidant le budget national au
bénéfice d’un allié incontrôlable et
méprisant, est contre productif à long
terme.
Que n’a-il
laissé cette «sale besogne» à son
successeur ? Pourquoi tant de gratuité
envers un être méprisant et méprisable ?
Crainte d’être taxé d’antisémitisme ?
Obama ou le syndrome du Bounty, non le
révolté mais le soumis ?
Le titre de «meilleur allié d’Israël»
n’est pas, loin s’en faut, un titre de
gloire.
Songeons au destin maudit du
prédécesseur de Barack Obama, George
Bush jr, le pire président américain de
tous les temps ;
À ses compagnons d’infortune anglais,
Tony Blair et David Cameron ;
À leurs compères français, le quatuor
socialiste de sinistre mémoire :
- Guy
Mollet, l’homme de Suez et d’Alger,
la honte du socialisme français.
-
Lionel Jospin (Hezbollah terroriste
?), premier dirigeant socialiste
éliminé au 1er tour de la
compétition présidentielle, le
destin brisé en pleine gloire.
-
Dominique Strauss Khan, qui se
demandait chaque jour ce qu’il
pouvait faire pour la «grandeur
d’Israël», -et non de la France dont
il était l’élu-, avant que son
destin présidentiel ne trébuche sur
une femme de chambre.
-
François Hollande et ses sérénades
d’amour dans la cuisine du chef de
la droite xénophobe israélienne, le
plus impopulaire des présidents
français à égalité avec son collègue
post gaulliste atlantiste, le «sang
mêlé» Nicolas Sarkozy, destructeur
de la Libye et de la Syrie,
générateur du flux migratoire massif
de la rive sud de la Méditerranée
vers l’Europe.
Le titre
de «Meilleur ami d’Israël» constitue, à
l’épreuve des faits, une abdication de
souveraineté au niveau d’un état, une
aliénation mentale au niveau des
individus en ce qu’il annihile dans l’un
comme dans l’autre cas tout esprit
critique à l’égard d’un pays supposé
ami.
Au delà
du psychodrame électoral de la campagne
présidentielle américaine 2016, et du
traumatisme qu’il pourrait avoir généré
au sein de larges couches de la
population, les Américains sont conduits
tôt ou tard à purger leurs démons et
cesser de s’imaginer qu’ils pourront
continuer à ponctionner éternellement le
reste de la planète, à coups de bons de
trésor, pour préserver leur suprématie,
tout en demeurant captif d’Israël pour
la détermination de leur stratégie
globale ; tout en procédant à la
destruction de leurs contestataires,
sous forme de «chaos constructeur», pour
la survie de pétromonarchies décriées et
déconsidérées, aux antipodes des valeurs
de la démocratie américaine.
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Getty
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