MADANIYA
Monde arabe : Une « génération
perdue »
du fait de la violence
René Naba
Lundi 12 février 2018
Sida, assassinats, suicide, violence…Un
avenir sombre pour le Moyen-Orient,
faute de stabilisation.
Le suicide et les
assassinats ont décuplé en Asie
occidentale produisant une «génération
perdue», particulièrement dans la
catégorie masculine de la population.
Telle est la
principale conclusion d’une étude de
«The International Journal of Public
Health» publiée par le site en ligne Ar
Rai Al Yom, dont la version arabe est
sur ce lien pour le lecteur arabophone:
La violence a coûté
la vie à 1,4 millions de personnes en
2015 au sein des 22 pays constituant
l’Asie occidentale, notamment les pays
suivants: Afghanistan Arabie Saoudite,
Irak, Iran, Pakistan, les principautés
pétrolières du Golfe, Somalie, Soudan et
Syrie.
«144.000 personnes
ont trouvé la mort à titre de dommage
collatérale des guerres régionales. Et
la violence ancrée et permanente a
produit une génération perdue
particulièrement dans la catégorie
masculine de population, notamment les
jeunes et les enfants», poursuit la
publication qui prédit «un avenir»
sombre pour le Moyen Orient s’il n’est
pas trouvé un moyen de stabiliser la
zone dont la population s’élève à 600
millions de personnes.
Les troubles
psychiatriques et psychanalytiques.
Le rapport note un
accroissement considérable du nombre de
personnes atteintes de troubles
psychiques et mentaux, notamment la
schizophrénie, la paranoïa, les troubles
bipolaires, la dépression et les crises
d’angoisse.
Le suicide est
prohibé par la religion musulmane. Mais
en dépit de cet interdit, le nombre des
suicides s’est élevé à 30.000, en 2015,
alors que 35.000 ont trouvé la mort du
fait des violences faites par autrui
(meurtre, assassinat). Soit une
augmentation de 152 pour cent au cours
du dernier quart de siècle (1990-2015)
Le rapport déplore
le manque de spécialistes dans le
domaine de la santé mentale: En Libye et
au Soudan le nombre de praticiens est
dérisoire de l’ordre de 0,5 médecin pour
100.000 habitants, contre 40 praticiens
pour 100.000 habitants en Europe.
Les ravages du
SIDA
Les décès
imputables au SIDA ont décuplé entre
1990 et 2015, en un quart de siècle, les
victimes étant situées dans leur grande
majorité dans la Corne de l’Afrique,
Djibouti, Somalie et le Soudan.
Docteur Charbel Al
Bachrawi, Professeur assistant à
l’Institut d’évaluation de la politique
médicale, a évalué que les malades de
Sida atteints dans cette zone
géographique avaient une vie infiniment
plus courte que dles malades vivant dans
d’autres parties du Monde du fait de
l’absence d’une infrastructure
sanitaire, des conditions d’insalubrité
de l’environnement et du faible niveau
de ravitaillement médicamenteux.
L’étude comporte 15
monographies. 2300 personnes de 132 pays
ont apporté leur contribution à ce
rapport dont le lien suivant renvoie au
site officiel de la publication
La
multiplication des mariages précoces de
mineures
La précarité
économique résultant de la multiplicité
des guerres régionales s’est accompagnée
de la multiplication de mariages
précoces de mineures tant en Irak, qu’en
Syrie, qu’au Liban et en Jordanie, ces
deux derniers pays du fait de l’afflux
de réfugiés syriens.
Depuis le début de
la guerre civile en Syrie, plusieurs
organisations et agences ont tenté
d’attirer l’attention sur la hausse des
mariages précoces chez les réfugiés
syriens au Liban. En 2014, une enquête
de l’ONU a alerté sur le fait que le
mariage précoce était devenu un
phénomène très répandu, «à des taux plus
élevés que les moyennes observées en
Syrie avant l’éruption de la crise
humanitaire, avec 18 % des jeunes femmes
interrogées âgées entre 15 et 18 ans
affirmant avoir été mariées».
En Jordanie, selon un report de l’ONG
internationale Save the Children
intitulé «Too Young to Wed» (Trop jeunes
pour être mariées), un mariage sur
quatre entre réfugiés syriens dans le
pays implique une fille âgée de moins de
18 ans. En 2011, le chiffre était de 12
%.
En Irak, le nombre
de mineures syriennes ayant contracté un
mariage a également augmenté, et une
similaire hausse a aussi été constatée
en Égypte et en Turquie. 3.210 mineures
syriennes ont contracté mariage en
Jordanie en 2016.Un nombre sensiblement
égal au Liban.
L’Europe, cible prioritaire, et l’Asie
de l’Est, lieu d’implantation future de
l’État Islamique.
En dépit de la
pression militaire exercées sur les
groupements djihadistes, Daech et Al
Qaida ont maintenu leur mobilité et leur
capacité manœuvrière au premier semestre
de 2017, estime un rapport d’expert
présenté le 10 août 2017 au conseil de
sécurité de l’ONU, dont le site en ligne
«Ar Rai Al Yom» publie un condensé sur
ce lien
http://www.raialyoum.com/?p=724621
Daech est toujours
en mesure de parvenir de la Trésorerie à
ses partisans en dehors du Moyen orient,
utilisant pour ce faire, afin d’échapper
aux contrôles, des virements d’un
montant modique.
L’Europe demeure la
cible prioritaire des groupements
djihadistes, mais le rapport prête à
l’Etat Islamique l’intention de
s’implanter en Asie de l’Est avec pour
point de mire le sud des Philippines,
qui abrite une importante minorité
musulmane dans l’Île de Minahouet.
Selon le rapport,
le nombre de volontaires pour l’Irak et
la Syrie a diminué
«La résistance de
l’EI à Mossoul montre que sa structure
de commandement et de contrôle n’a pas
été complètement cassée et que le groupe
reste une menace militaire
significative.»
Outre son
utilisation de drones trouvés dans le
commerce, l’EI «a développé une capacité
de les modifier et de construire ses
propres modèles» pour diffuser sa
propagande, faire de l’observation ou
pour emporter de petites bombes ou
explosifs, notent également les experts.
Al Qaida au
Sahel et en Afrique de l’Ouest
En Afrique de
l’Ouest, en Afrique de l’Est et dans la
péninsule Arabique, notamment au Yémen,
Al-Qaida conserve de son côté des
réseaux puissants. En dépit de
la«compétition stratégique» que se
livrent les deux organisations, des
alliances et des coopérations permettent
dans plusieurs régions des mouvements de
combattants entre différents groupes,
relève aussi le rapport.
Au Sahel, Al-Qaida
continue de représenter «une menace
significative», comme en Afrique de
l’Est où les membres affiliés à ce
groupe et à l’organisation Etat
islamique seraient entre 6.000 et 9.000.
Depuis
l’établissement de ce rapport, les
groupements djihadistes ont perdu
plusieurs de leurs places fortes tant en
Syrie qu’en Irak. Outre Alep, en
décembre 2016, Nord de la Syrie;
Mossoul, Irak, en juin 2017, et Ersal,
frontalière libano syrienne, en Août
2017, enfin Raqqa (Syrie) en octobre
2017.
Les chiffres du
terrorisme
Depuis le début du
XXI me siècle et jusqu’en 2014, 151.618
actes terroristes ont été dénombrés à
travers le Monde (dans 151 pays), dont
62.312 au cours des deux dernières
années (2013-2014), une période
correspondant au surgissement de Da’ech
et Jabhat An Nosra sur le théâtre du
Moyen-Orient et la montée en puissance
de Boko Haram en Afrique.
Les pertes
économiques résultant du terrorisme se
sont chiffrées, depuis le début du XXI
me siècle et jusqu’en 2014, à 5
trillions de dollars. (Un trillion
équivaut à mille milliards de dollars).
Un chiffre suffisant à lui seul pour
résoudre le problème du chômage dans la
totalité des pays à hauteur de 65 pour
cent des cas.
Le nombre des tués
du fait du terrorisme, en 2013 -2014,
s’est élevé à 632.716 personnes et les
blessés à 1.763.802 personnes. Le nombre
des déplacés et réfugiés a bondi à 18
millions de personnes à travers le Monde
du fait du terrorisme.
12,5 millions de
femmes subissent la loi directe du
terrorisme ainsi que toutes sortes de
forme de répression et de sauvagerie.
17 millions
d’enfants sont victimes d’abus et de
violences, sans la moindre possibilité
d’intervention en leur faveur. Des
exécutions quotidiennes sont commises
dans la plus grande discrétion échappant
de ce fait à la connaissance de
l’opinion publique; des enfants victimes
d’abus sexuels; des lois qui n’avaient
pas cours même au Moyen-âge sont
désormais appliquées avec vigueur sur
fond d’une sauvagerie sans pareille, et
son cortège de désolation et de
malheurs.
Le coût
économique de la guerre contre le
terrorisme: 22 trillions de dollars pour
la période 2011-2014
En 2001, 80% des
actions terroristes impliquaient l’usage
d’armes primaires (basiques) et
d’explosifs à faible effet. Depuis lors
72% des assauts mettent en œuvre des
armes sophistiqués et d’explosifs à fort
pouvoir détonateur, ainsi que la haute
technologie et des procédés
d’intelligence inhabituels.
Avant 2011, les offensives terroristes
prenaient pour cible, dans 90 % des cas,
des groupements hostiles clairement
définis, alors que pour la période
s’étendant de 2010 à 2014, les assauts
terroristes ciblaient l’autre pour son
altérité, sans autre motif d’hostilité
et cela dans une proportion de 81%.
Au delà des pertes économiques
mentionnées de l’ordre de cinq trillions
de dollars, le budget global consacré à
la lutte contre le terrorisme s’est
élevé à 22 trillions de dollars durant
les trois dernières années (2011-2014).
Pour aller plus
loin: Le terrorisme en chiffres
Le verdict du
rapport sur «L’INJUSTICE DANS LE MONDE
ARABE ET LES MOYENS D’Y METTRE FIN»
(Une œuvre
collective dirigée par la Palestinienne
Rima Khalaf, ancien Haut fonctionnaire
des Nations Unies, en signe de
protestation contre la censure de ce
rapport)
«Le Monde arabe est
l’unique zone du Monde où subsiste un
fait colonial classique (Palestine), la
première zone du XXI me siècle, théâtre
d’une occupation officielle étrangère
(invasion américaine de l’Irak en 2003).
Bon nombre de pays arabes ont été forgés
par le colonialisme et pâtissent de ce
fait d’un défaut de légitimité
structurelle. Les pays arabes ne
jouissent pas d’une réelle indépendance.
Bien au contraire, leur dépendance vis à
vis de l’extérieur s’est accentuée. Le
rapport fait, semble-t-il,
particulièrement allusion aux
pétromonarchies du Golfe passées du
protectorat britannique à l’imperium
américain, sans le moindre délai de
latence, dans la foulée de
l’Indépendance octroyée par le Royaume
Uni aux anciennes principautés de la
Cote des Pirates, dans la décennie 1970.
« La répression et
la corruption constituent les fondements
du pouvoir arabe en ce que la majorité
des gouvernements arabes ne tire pas sa
légitimité de la volonté populaire, mais
d’un appui extérieur; un fait qui les
conduit à mener une politique conforme
aux intérêts de leurs protecteurs.
« En dépit des
dégâts infligés par les forces
étrangères en Palestine et en Irak, les
élites dirigeantes du Monde arabe
continuent de solliciter leurs
interventions, alors qu’il est de
notoriété publique que les forces
étrangères ne protègent que leurs
propres intérêts et ne tranchent une
bataille qu’en leur faveur.
L’injustice est à
la base de la destruction du Monde
arabe. L’amplification de la violence
dans le Monde arabe, de même que la
montée en puissance des idéologies
éradicatrices et frappant d’apostasie
quiconque prône la diversité,
parallèlement, à l’accentuation dans le
tiers des pays arabes ont été générées
par l’injustice dans toutes ses
déclinaisons ».
Les guerres d’extermination menées ces
cinq dernières années (printemps arabe)
ont provoqué la mort de 500.000 civils
et de milliers de blessés et de
disparus, générant un flux migratoire
sans pareil depuis la II me Guerre
mondiale (1939-1945). La répression des
protestations populaires a entraîné une
radicalisation du mouvement et sa
militarisation.
LA PALESTINE : UNE
PARFAITE INCARNATION DE L’INJUSTICE
SUBIE PAR SON PEUPLE ET DE L’INJUSTICE
QUI PLANE SUR LE FONCTIONNEMENT DE SES
ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS
Les Palestiniens
subissent le joug de l’occupation, leurs
droits spoliés y compris leur droit à
l’autodétermination et le droit au
retour des réfugiés dans leurs foyers.
Les épreuves des Palestiniens se
doublent du racisme dont font preuve à
leur égard les autorités d’occupation
qui croient en la suprématie d’un groupe
religieux sur un autre, s’autorisant,
par ce biais, à s’affranchir de la
légalité internationale, en établissant
un État fondé sur la discrimination.
La fin de la non belligérance entre
Israël et les pays arabes, via des
négociations globales entre les deux
parties, objectif latent de la
diplomatie atlantiste, revient à placer
les pourparlers sous la menace atomique
israélienne. Or, paradoxalement, trois
puissances nucléaires du Tiers Monde ont
accédé à la capacité nucléaire du fait
du soutien technologique occidental,
mais le camp atlantiste frappe néanmoins
d’embargo l’Iran pour entraver son
accession au rang de puissance de seuil
au prétexte de la lutte contre la
prolifération nucléaire.
En 2015, le Monde
arabe a alloué 190 milliards de dollars
à ses dépenses d’armement, alors que le
montant global des dépenses militaires
dans le monde s’est élevé à 1,7 trillion
de dollars; une somme qui englobe les
dépenses des puissances majeures de la
planète (Chine, États Unis, Russie,
Inde, Pakistan, France, Royaume Uni).
L’Arabie saoudite
et les Émirats Arabes Unis figurent
parmi les 15 premiers client de
l’industrie d’armement dans le Monde.
L’Irak a enregistré la plus forte hausse
durant la décennie 2005-2015. en 2015,
l’Irak a dépensé 13 milliards de dollars
en armement, en augmentation de 35 pour
cent par rapport à 2014.
Les pays en développement enregistrent
une perte annuelle de 100 milliards de
dollars, soit 4,4 pour cent de leurs
recettes fiscales du fait des
manipulations des cours opérées par les
Multinationales, souligne le rapport qui
déplore «l’instrumentalisation des
crimes contre l’humanité» à des fins
politiques, de même que la course aux
armements.
Les réformes de
façade ne sont plus de mise. Peu de
choix s’offrent désormais aux Arabes. La
reconfiguration géopolitique de la zone
se fait loin de leurs capitales
respectives, au sein plutôt des salles
d’état major. L’unique choix qui s’offre
désormais aux Arabes est le suivant:
Soit qu’ils soient les artisans de leur
propre changement, soit qu’ils subissent
les lois de l’étranger
Les paumés de
l’islam
Le bilan est
éloquent: Les six «sales guerres» de
l’époque contemporaine sont situés dans
la sphère de l’Organisation de la
Conférence Islamique (Syrie, Irak,
Afghanistan, Somalie Yémen et Libye)
générant 60 millions d’enfants musulmans
pâtissant de la pauvreté, de la maladie,
des privations et de l’absence
d’éducation, alors que 12 pays musulmans
comptent le taux le plus élevé de
mortalité infantile et que 60 % des
enfants n’accèdent pas à la scolarité
dans 17 pays musulmans.
(Cf à ce propos
Haytham Manna, président de l’Institut
Scandinave des Droits de l’Homme dans
son ouvrage «La Résistance civile,
contribution à l’auto-immunisation des
sociétés» -SIHR 2 ème édition 2015).
Le panorama se
passe de commentaires: La précarité
économique avec son cortège de
marginalisation, de réclusion sociale,
de délit de faciès, de délinquance, de
récupération religieuse, à
l’arrière-plan d’une dynamique de groupe
sur des êtres fragilisés dans un univers
carcéral constituent autant de facteurs
de trébuchement, voire de basculement.
En superposition
avec une infantilisation religieuse, sur
fond de démagogie et
d’instrumentalisation de l’islam comme
arme de combat contre l’athéisme
soviétique (Afghanistan 1980-1989), puis
contre les pays arabes laïcs (Libye,
Syrie) avec la complicité des pays
occidentaux (2011-2014) ces facteurs ont
fini par générer, au terme d’une
séquence houleuse d’un quart de siècle,
un être hybride, paumé de l’Islam et
paumé de la République, djihadiste par
filière de la délinquance, un fou de
Dieu, un zombie criminogène.
Reçu de René Naba pour publication
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