Vu du Droit
Loi anticasseurs censurée :
comment se moquer du monde
Régis de Castelnau

Jeudi 4 avril 2019
Victoire , le Conseil constitutionnel de
Fabius et Juppé a censuré une mesure
phare de la loi anti-casseurs !
Ah les braves gens ! Victoire ! Victoire
! La liberté triomphe ! Alléluia, faites
sonner les cloches dans tout le pays !
Comment le petit freluquet de l’Élysée
et le barbu du Havre ils n’ont pas été
mouchés !
« Heuh, mais
Tonton, pourquoi tu tousses ? Pourquoi
tu tords le nez ? Qu’est-ce qu’il y a
encore ? T’es jamais content Tonton !
– Ben c’est
seulement la disposition relative à
l’interdiction administrative préalable
de manifester ordonnée par le préfet qui
a été retoquée. Elle était intenable et
son annulation était inéluctable, mais
LE RESTE, TOUT LE RESTE DE CETTE LOI
SCÉLÉRATE A ÉTÉ VALIDÉ. Pour que ça
passe tranquille dans les bruits de
l’orchestre.
– Ah merde !
– En plus le
Conseil n’a pas invalidé le principe
(liberticide) de l’interdiction
préalable. Il a été malin, il faut lire
le considérant numéro 24 qui se conclut
par la phrase : « Dès lors, les
dispositions contestées laissent à
l’autorité administrative une latitude
excessive dans l’appréciation des motifs
susceptibles de justifier l’interdiction.
». Joli, non ? Si on lit bien on
comprend que si le texte avait été un
peu plus rigoureux et avaient laissé au
préfet une latitude qui ne soit pas «
excessive » pour porter atteinte à une
liberté fondamentale, eh bien cela
aurait pu coller.
– Tu crois ?
– C’est assez
évident, parce qu’en fait le considérant
numéro 24 explique en détail ce qu’il
aurait fallu faire pour que ça passe.
Voilà ce que nous disent les sages : «Ainsi,
le législateur n’a pas imposé que le
comportement en cause présente
nécessairement un lien avec les
atteintes graves à l’intégrité physique
ou les dommages importants aux biens
ayant eu lieu à l’occasion de cette
manifestation. Il n’a pas davantage
imposé que la manifestation visée par
l’interdiction soit susceptible de
donner lieu à de tels atteintes ou
dommages. En outre, l’interdiction peut
être prononcée sur le fondement de tout
agissement, que celui-ci ait ou non un
lien avec la commission de violences.
Enfin, tout comportement, quelle que
soit son ancienneté, peut justifier le
prononcé d’une interdiction de
manifester. » L’interdiction
administrative individuelle préalable
est une hérésie au regard des principes
qui guident les libertés publiques
constitutionnelles dont fait partie le
droit de manifestation. ELLE EST ICI
VALIDÉE DANS SON PRINCIPE ! Il
suffit simplement de l’aménager comme la
décision elle-même le conseille. On peut
même dire qu’elle fournit le mode
d’emploi. Message reçu et il ne faut pas
être grand clerc pour imaginer
qu’Emmanuel Macron et sa petite bande
vont très bien le comprendre et remettre
leur ouvrage sur le métier à la première
occasion.
– Donc on se fout
de nous ?
– Faut croire. Il y
avait un indice qui permettait de
prévoir cette entourloupe. À votre avis,
qui a déféré au Conseil constitutionnel
la loi anticasseurs pour qu’il en
examine la constitutionnalité ? Eh bien,
pour la première fois dans l’histoire de
la Ve République c’est le président
d’icelle. Pour se donner le beau rôle,
Emmanuel Macron a utilisé l’article 61
de la constitution et ajouté son nom à
ceux des parlementaires qui avaient
utilisé leurs propres prérogatives. Tout
ceci était cousu de fil blanc. »
Laurent Fabius et
Alain Juppé ont un point commun : ils
sortent tous les deux de l’École Normale
Supérieure et de l’ENA . Malheureusement
cela ne garantit pas l’exercice d’un
minimum de probité républicaine.
Félicitations
également aux parlementaires LR qui en
proposant et en votant cette loi
liberticide ont prêté la main à cette
opération.
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