L'Humanité
Palestine « Ne pas condamner qu’en
paroles
la colonisation »
Pierre Barbancey
AFP
Lundi 18 avril 2016
Le
président palestinien,
Mahmoud Abbas, alerte
l’opinion après sa visite en
France. Si Paris se veut à
l’initiative, Hollande n’a
parlé ni de colonisation, ni
d’occupation, ni d’État
palestinien.
Dans un
Moyen-Orient divisé et
déchiré, les Palestiniens
peuvent se sentir isolés. Le
président de l’Organisation
de libération de la
Palestine (OLP), également à
la tête de l’Autorité
palestinienne (AP), Mahmoud
Abbas, le sait bien. Sa
visite à Paris, à la fin de
la semaine dernière,
s’inscrit justement dans
cette volonté de saisir
toutes les opportunités pour
desserrer l’étau qui écrase
le peuple palestinien, face
à un gouvernement israélien
qui poursuit sans cesse sa
politique d’occupation et de
colonisation.
Pas
étonnant, dans ces
conditions, que Mahmoud
Abbas ait tenu à rencontrer
François Hollande. Paris se
veut à l’initiative pour la
reprise du dialogue entre
Palestiniens et Israéliens.
« L’initiative de paix
française lancée par Laurent
Fabius est extrêmement
importante pour nous, a
souligné le président
palestinien, samedi, lors
d’une rencontre informelle à
laquelle était conviée
l’Humanité. Nous avons
commencé à aménager des
choses, avec des pays arabes
et non arabes, en vue
d’aboutir à une rencontre du
même type que celle
d’Annapolis. Elle sera
convoquée sur le même mode
(…) Il s’agit d’établir un
mécanisme pour sortir de la
situation actuelle,
d’établir des règles du jeu
pour la période qui vient.
Les thèmes principaux de
cette réunion porteront
notamment sur le respect de
la légalité internationale
et des résolutions de l’ONU,
les dispositions du plan
arabe de paix, la solution
des deux États comme réponse
au conflit. Nous attendons
du groupe d’appui qui
sortira de cette réunion
qu’il suive l’exécution et
la mise en pratique des
décisions prises, selon un
calendrier précis. Il s’agit
de sortir de la logique des
résolutions jamais mises en
œuvre. L’obstacle
fondamental à cette
démarche, ce sont les
colonies, qui connaissent un
essor jamais vu depuis 1967.
C’est le principal obstacle
à la paix. »
L’initiative française ne
doit pas susciter trop
d’espoir
Si cette
initiative française ne peut
qu’être soutenue, elle ne
doit cependant pas susciter
trop d’espoir. La référence
à Annapolis (en 2007) – qui
prévoyait la création d’un
État palestinien pour la fin
2008 – ne prête guère à
l’optimisme. D’autre part,
la volonté de certains pays
arabes de présenter une
résolution à l’ONU dénonçant
la colonisation israélienne
se heurte à de nombreux
obstacles, y compris de la
part de pays européens –
dont la France – qui, en
paroles, condamnent la
colonisation mais en réalité
n’agissent en rien contre.
Et puis, il y a les
déclarations de François
Hollande vendredi, à l’issue
de sa rencontre avec Mahmoud
Abbas. Le président français
a utilisé un langage qui
laisse pantois. Il a d’abord
souligné que les entretiens
avaient porté sur la «
sécurité », c’est-à-dire
celle d’Israël. « Il y a des
violences, des tragédies et
l’on voit ce que le blocage
de la situation peut avoir
comme effets (sic). » S’il a
bien parlé d’un « processus
qui doit conduire à la paix
», il n’a, en revanche, pas
eu un mot pour dénoncer la
poursuite et l’accélération
de la colonisation,
l’aggravation de
l’occupation. Et surtout, il
n’a même pas évoqué la
création de l’État
palestinien. Comme s’il en
avait traduit aussitôt que
l’attitude française
exprimait un nouveau degré
d’acceptation de
l’arbitraire israélien au
sein de la communauté
internationale, Benyamin
Netanyahou a proclamé hier
que la partie annexée du
plateau syrien du Golan «
restera pour toujours dans
les mains d’Israël ».
Au
lendemain de sa visite à
Paris, Mahmoud Abbas faisait
remarquer : « Une question
est posée dans ces pays,
dont des pays amis, comme la
France : Quand
franchiront-ils le pas de la
reconnaissance ? (…) Si l’on
défend la solution de deux
États, alors pourquoi n’en
reconnaître qu’un ? »
© Journal
L'Humanité
Publié le 19 avril 2016 avec l'aimable
autorisation de
L'Humanité
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